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Fermeture des remontées mécaniques : les collectivités en attente des compensations

Les stations de ski s’orientent bel et bien vers une saison blanche : le gouvernement a douché les espoirs, lundi, d’une réouverture des remontées mécaniques pour les vacances d’hiver. Au-delà des mesures d’aides économiques déployées, les élus attendent de connaître le détail des compensations fiscales des collectivités.

Il n’y aura donc pas de réouverture des remontées mécaniques en février. L’information est tombée lundi soir à l’issue de la rencontre organisée par le Premier ministre, Jean Castex, avec les élus et professionnels de la montagne.

"L’évolution de la situation sanitaire ne nous permet pas, à ce stade, de rouvrir les remontées mécaniques. Il n’est pas possible de redonner une date de réouverture", a déclaré l’entourage de Jean Castex, lors d’une conférence de presse, se référant à la situation dans les autres pays européens notamment l’Allemagne et l’Italie qui ont pris la même décision. Andorre réserve ses pistes aux Andorrans et l’Espagne aux habitants des vallées, "il n’y a pas une tendance à la réouverture générale", argue la même source.

Alors que l’on s’oriente donc vers une année blanche pour les stations de ski, le gouvernement déploie le parapluie des aides aussi bien pour les entreprises des vallées que les saisonniers et les professions médicales. "Nous voulons que la montagne française ait un avenir. (…) On ne mégotte pas sur les moyens", a tenté de rassurer le secrétaire d’État au Tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne.

Fonds de solidarité

Ainsi, les entreprises situées en amont de la chaîne de valeur de l’activité de montagne (ingénierie, menuiserie, fabrication de remontes pentes…), ainsi que tous les magasins de location et de vente de matériel de ski seront intégrés aux secteurs faisant l’objet du "plan tourisme" (liste S1bis). En clair, ils pourront bénéficier du fonds de solidarité jusqu’à 10.000 euros par mois et jusqu’à 20% de leur CA dans la limite de 200.000 euros par mois pour celles qui perdent plus de 70% de leur chiffre d’affaires. Autre intérêt : ils bénéficieront d’un taux de prise en charge de l’activité partielle majoré, comme c’est déjà le cas pour les secteurs impactés par la crise (S1 et S1bis), dès lors qu’ils perdent 50% de leur chiffre d’affaires.

Une attention particulière est portée aux structures d’hébergement : résidence de tourisme, villages vacances… Le nouvel étage dit de "coûts fixes" du fonds de solidarité sera assoupli pour leur venir en aide : il se voit ainsi étendu aux entreprises qui génèrent moins de 1 million de chiffre d’affaires, ce qui n’était pas le cas auparavant. Ce seuil était jugé trop élevé pour les acteurs de la montagne. Le dispositif plafonné à 3 millions d’euros est destiné à garantir la couverture de 70% des charges fixes pour les secteurs les plus affectés par la crise. "Une vingtaine de structures représentent environ 70% des nuitées", a souligné Jean-Baptiste Lemoyne. Les coûts fixes intégreront le coût des congés payés des salariés en activité partielle et leurs frais de logement, précise Matignon, dans un communiqué.

Le gouvernement souhaiterait aussi permettre aux exploitants de remontées mécaniques de bénéficier de ces coûts fixe. Une mesure en attente d’un accord de la Commission européenne.

S’agissant des saisonniers et salariés en activité partielle, le gouvernement s’engage à ce que leurs frais de formation soient pris en charge à 100% dans le cadre du FNE-Formation.

Enfin, le gouvernement entend se porter au chevet des professionnels de santé (médecins, dentistes, pharmaciens…) qui subissent par ricochet une forte baisse de leur activité : ils feront l’objet d’un dispositif d’indemnisation pour couvrir leurs charges fixes professionnelles, "sur un modèle similaire à celui mis en place lors du premier confinement", précise Matignon, sans plus de détails.

Plan de relance pour la montagne

Au-delà de ces mesures d’urgence, le gouvernement propose un "plan de relance pour le montagne", qui n’est ni plus ni moins que le plan montagne promis par le Premier ministre lors du dernier congrès de l’Anem (Association nationale des élus de la montagne) à Corte (voir notre article du 30 novembre 2020). Ce plan d’investissement piloté par l’ANCT sera élaboré "en lien avec les collectivités territoriales, les entreprises et l’ensemble des acteurs de la montagne". Il s’agit de "répondre à des enjeux structurels qui dépassent la situation de crise", précise l’entourage du Premier ministre : transition écologique, diversification des activités de montagne, tourisme deux ou quatre saisons, compétitivité par rapport à des destinations comme les États-Unis ou l’Autriche qui sont passés devant la France en termes de fréquentation. Ce plan sera lancé "dans les prochaines semaines", "au printemps", à l’issue d’une concertation.

"Notre objectif n’est pas de mettre ces territoires sous cloche, mais d’améliorer la qualité de vie de la population permanente, en donnant à tous les habitants la capacité d’être les pionniers d’un mode de vie plus intégré et plus respectueux de l’environnement particulièrement fragile des zones de montagne", avait expliqué le secrétaire d’État à la Ruralité, Joël Giraud, lors d’un débat sur la montagne au Sénat, le 12 janvier, émettant l’idée qu’un "fonds de résilience du tourisme en montagne" puisse s’adosser à ce plan "de façon à associer relance et transition écologique".

Un "filet de sécurité" pour les collectivités

Mais les collectivités attendent aussi des précisions sur les mesures de compensations qui les concernent alors qu’elles voient leur recettes (taxes de séjour, taxes sur les remontées mécaniques, redevances DSP, d’assainissement, de stationnement, SEM…) fondre comme neige. Elles disposeront d’un "filet de sécurité" sur les recettes comme celui déjà mis en place en 2020, a expliqué Jean-Baptiste Lemoyne. Ce dispositif vise à garantir à chaque commune et intercommunalité que ses recettes fiscales et domaniales comme la taxe sur les remontées mécaniques ne soient pas inférieures en 2021 à la moyenne des recettes perçues au cours des trois dernières années. Ce qui permet d’ "éviter les à-coups", a expliqué le secrétaire d’État au Tourisme. Pour la taxe de séjour, l’année 2019 – qui a vu un ajustement au profit des communes de montagne – sert de référence. "Pus de 300 communes de montagne ont donc reçu un acompte en novembre. Le calcul définitif et individualisé pour 2020 aura lieu avant le 31 mai", avait précisé Joël Giraud le 12 janvier.

Mais le président de l’ANMSM (Association nationale des maires de stations de montagne), Jean-Luc Boch, a rappelé "l’urgence de connaître précisément les montants de compensation" et a fait savoir, sur Twitter, lundi, qu’il déposerait "cette semaine" à Matignon "un état précis des finances" des stations. L’association a effet sondé ses adhérents pour connaître leur situation : le document en question devrait être remis ce vendredi. Il vise à prendre en compte toutes les recettes non couvertes par le filet de sécurité. "Si celles-ci ne sont pas récupérées, certaines collectivités risquent de se retrouver en difficulté , alerte-t-on à l’ANMSM. C’est la même chose pour les commerces. C’est très bien de compenser mais si les aides ne sont pas suffisantes, de nombreux commerces vont fermer et l’effort ne servira à rien, on aura perdu des milliards."

Un autre sujet taraude les élus de montagne : le Fpic (fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales) que Laurent Wauquiez, se faisant le porte-voix de la montagne, a qualifié de "racket", vendredi dernier, lors d’une conférence de crise. Les élus en demandent l’annulation ou tout au moins le report.

"À ce stade, les acteurs de la montagne ont besoin au plus vite de disposer d’un calendrier de mise en œuvre des mesures d’urgence et d’un état précis des dispositifs envisagés. Les discours doivent laisser place aux actes pour une action rapide, massive et concertée", a souligné le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dans un communiqué, mardi. "L’urgence commande, sous huit jours, de fixer un nouveau rendez-vous pour évoquer ces modalités de mise en œuvre", estime-t-il. L’élu propose la création "d’un comité de pilotage de crise, par massif" afin de "territorialiser les décisions".

 

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