Culture - Extension des horaires d'ouverture des bibliothèques : Françoise Nyssen présente son plan
A l'occasion de la journée des bibliothèques, organisée le 10 avril par le ministère de la Culture, Françoise Nyssen a présenté son plan "Ouvrir plus, ouvrir mieux", dédié principalement à l'extension des horaires d'ouverture des établissements. Il est rare qu'un plan ministériel reprenne intégralement le contenu d'un rapport, mais c'est clairement le cas avec ce plan, qui décalque très largement le contenu du rapport "généreux, enthousiaste et inspirant" d'Erik Orsenna, de l'Académie française, et de Noël Corbin, inspecteur général des affaires culturelles, intitulé "Voyage au pays des bibliothèques - Lire aujourd'hui, lire demain". Cette reprise était d'autant plus attendue que les grandes lignes du plan avaient déjà été annoncées par Emmanuel Macron lors d'un déplacement à la médiathèque des Mureaux (Yvelines), le 20 février dernier, pour la présentation du rapport (voir notre article ci-dessous du même jour).
Des bibliothèques plus accessibles, qui deviennent des"maisons de services publics culturels"
Les préconisations du rapport Orsenna-Corbin ont donné lieu, dans les deux derniers mois, à une concertation avec les associations d'élus et de bibliothécaires, ainsi qu'à une consultation citoyenne en ligne, qui a recueilli plus de 7.000 contributions. Ces dernières "viennent largement valider les pistes sur lesquelles nous avions commencé à travailler avec les collectivités territoriales ; elles montrent aussi la détermination des professionnels à s'engager dans ce mouvement de fond", s'est félicitée la ministre.
Le plan d'action tiré du rapport et de cette démarche repose sur deux grands piliers : d'une part, rendre les bibliothèques plus accessibles ; d'autre part, faire de ces dernières des "maisons de services publics culturels". La ministre de la Culture a rappelé, pour l'occasion, que "nos bibliothèques ouvrent moins de 40 heures par semaine dans nos plus grandes villes, contre 78 heures à Londres, 84 à Amsterdam, 88 à New-York, et jusqu'à 98 heures par semaine à Copenhague". Par ailleurs, seule une infime minorité (130 sur un total de 16.000 points de lecture) est ouverte le dimanche.
20% d'ouverture en plus dans les villes de plus de 20.000 habitants
Le ministère entend par conséquent accompagner les extensions horaires, notamment le week-end, dans certains territoires jugés prioritaires : villes moyennes, quartiers de la politique de la ville, grandes villes au-delà de 100.000 habitants. Pour cela, Françoise Nyssen propose "des objectifs de progression, qui sans être des règles, peuvent servir de caps" : dans les villes de plus de 20.000 habitants, un accroissement horaire de 20% hebdomadaire d'ici à la fin du quinquennat et une ouverture moyenne de plus de 50 heures par semaine dans les villes de plus de 100.000 habitants.
Du côté des bibliothèques universitaires, deux structures supplémentaires seront ouvertes le dimanche dès cette année à Paris et, en lien avec le ministère de l'Enseignement supérieur, un appel à projet sera lancé pour de nouvelles ouvertures le dimanche en 2019.
Le plan propose aussi d'autres objectifs, comme l'intégration des bibliothèques prêtes à créer un espace numérique dans le "Plan d'inclusion numérique" du gouvernement, ou le projet d'une bibliothèque numérique de référence par département d'ici à la fin du quinquennat.
Des acteurs de l'inclusion, de la lutte contre les inégalités et de l'éducation à l'information
L'évolution des bibliothèques vers des maisons de services publics culturels ambitionne d'en faire des acteurs de l'inclusion (avec en particulier une bibliothèque référente par département pour l'apprentissage du français) et de la lutte contre les inégalités d'accès aux savoirs et à la culture (notamment à travers des partenariats entre écoles et bibliothèques).
Sur le registre de l'inclusion, la ministre entend encourager les actions "hors les murs" des bibliothèques vers les centres d'hébergement, les hôpitaux ou les prisons. En accord avec la ministre de la Justice, il est également prévu d'expérimenter des travaux d'intérêt général dans des bibliothèques volontaires.
Enfin, les bibliothèques devraient contribuer à un "autre grand combat de notre démocratie" : la lutte contre les "Fake News". Des ateliers de formation contre les "Fake News" et, plus largement, d'éducation à l'information devraient être proposés dans au moins trois bibliothèques par département et au moins une bibliothèque dans chaque ville de 100.000 habitants.
Une enveloppe de 8 millions d'euros et 400 services civiques
Du côté des moyens, le plan prévoit la mise sur pied d'un programme de 400 services civiques dédiés, qui "seront à disposition pour intervenir dans vos bibliothèques, en coordination avec les bibliothécaires". De même, la ministre insiste sur l'enveloppe supplémentaire de huit millions d'euros pour accompagner les extensions horaires (au-delà des 80 millions d'euros de la dotation générale de décentralisation). Pour Françoise Nyssen, "ces huit millions n'étaient pas acquis. Il s'agit quand même de 10% d'augmentation. Je me suis battue pour les obtenir. Et je me bagarrerai pour inscrire ce mouvement dans la durée, au-delà de 2018, et obtenir plus encore".
Implanter les nouvelles maisons de services au public dans les bibliothèques ?
Enfin, l'Etat va également mettre son ingénierie à disposition des collectivités, à travers les Drac (directions régionales des affaires culturelles) et favoriser la mutualisation des moyens, grâce à un "rapprochement avec des structures locales, comme les bureaux de Poste, les espaces numériques, ou encore les mairies". Françoise Nyssen a également demandé au ministre de la Cohésion des territoires "d'étudier systématiquement la possibilité d'implanter ses nouvelles maisons de services au public dans les bibliothèques des communes concernées".
Il reste que ces projets seront essentiellement portés par les collectivités territoriales, gestionnaires de la quasi totalité des bibliothèques. Le plan se fixe pour objectif de faire remonter 200 projets dès cette année, alors que plus de 150 bibliothèques volontaires se sont déjà manifestées. Ces projets seront valorisés au travers d'un label et leur mise en œuvre devrait débuter dès le second semestre de cette année.