Trois communes et des associations alsaciennes engagées pour la jeunesse (68)

C’est la prise de conscience commune d’un manque d’activités proposées aux adolescents, qui a rassemblé municipalités et associations : Wattwiller, Uffholtz et Steinbach, la Fédération des Foyers Clubs d'Alsace (adhérente au réseau national des Foyers ruraux), le Foyer Saint-Erasme (à Uffholtz) et le Foyer de Steinbach. « Sur notre commune, nous disposions bien d’une maison d’assistants maternels, d’un accueil périscolaire et d’un centre de loisirs. Mais rien pour les 11-17 ans, à un âge où, partis au collège, on les perd un peu », témoigne Bernadette Brender, adjointe au maire, en charge des services à la population et à la solidarité à la municipalité de Wattwiller. En 2020, le Foyer Saint-Erasme a mené une enquête auprès des jeunes, dans le cadre d’une demande de reconnaissance en tant qu’Espace de vie sociale (EVS) déposée auprès de la Caf. L’étude a permis de mieux connaître les besoins et envies des jeunes. « Ils demandaient un endroit et des activités pour se retrouver. Ils voulaient également faire des sorties, poursuit l’édile. C’était l’occasion de leur permettre de prendre des responsabilités et de créer un outil d’émancipation. »

Apprendre en faisant

Réunis au sein d’un comité de pilotage, les différents acteurs déterminent donc une politique active envers les adolescents. Le programme d’animations doit répondre certes à leurs souhaits, mais aussi être l’opportunité de les impliquer dans la vie locale et associative et de les faire participer à la construction des projets et des actions menées. « En 2023, nous avons par exemple organisé avec les jeunes un spectacle sur le thème de la prévention de la violence faite aux femmes », explique la coordinatrice de la Fédération des foyers clubs d'Alsace, Marie-France Renaux. « Ils ont aidé à la mise en place de la salle ainsi qu’à l’accueil des artistes et des spectateurs. À la fin du spectacle, des éducateurs ont débriefé le spectacle avec les jeunes. Ces derniers sont également mobilisés par exemple pour la préparation de leurs voyages. Ces différents projets leur apprennent la patience et l’anticipation. Cela leur permet d’acquérir des compétences, sans qu’ils s’en rendent toujours compte, puisqu’au départ, ils viennent juste pour se retrouver et sortir. » 

Un programme à la carte

Pour enclencher la dynamique, un programme d’activités à la carte et sans engagement leur est proposé durant l’été 2021. Une soixantaine d’adolescents répond présent, grâce à une information largement relayée par les trois municipalités et les associations locales. Une petite participation financière est demandée aux parents pour les sorties au zoo, au parc d’attractions, à l’accrobranche... Contrairement aux ateliers, où les jeunes sont davantage acteurs : cuisine, foot… Le budget est d’un peu moins de 9 000 euros pour le fonctionnement global (salaires du directeur deux animateurs, budget pédagogique…) Le bilan prometteur incite le comité de pilotage de la politique jeunesse, composé d’élus des trois municipalités et des représentants des foyers, à associer la Caf afin d’engager des actions plus pérennes avec les jeunes. « À l’adolescence, on se construit dans la relation avec ses pairs. Or, en raison notamment du temps passé sur les écrans, les moments où cela peut se faire sont de plus en plus rares. Et quand on en crée, il faut du temps pour qu’un climat de confiance s’installe où chacun puisse apporter quelque chose, commente la coordinatrice de la Fédération. C’est le recrutement de l’animateur qui nous a permis de franchir ce cap. »

Un animateur toujours présent

L’animateur a été recruté sur un temps plein annualisé et en CDI par la Fédération des Foyers Clubs d'Alsace, grâce à un financement par la Caf à hauteur de 20 000 euros annuels pour quatre ans, complété par les trois municipalités (entre 8 000 et 11 000 euros chacune selon le nombre de jeunes inscrits) et les foyers (10 000 euros au total chaque année). La Fédération des Foyers Clubs d'Alsace dispose déjà d’une équipe d’une douzaine de personnes pour ses propres activités, ainsi que d’un minibus -voire deux durant les vacances-, indispensable pour transporter les adolescents. L’animateur est aux côtés des jeunes durant les vacances et les week-ends, en plus des créneaux prévus en semaine : mercredis, vendredis soirs, samedis après-midi… Enfin, il dispose de temps de bureau au siège de la fédération située à Mulhouse. « Nous travaillons avec beaucoup d’associations et de structures locales différentes. Cela peut être les Restos du cœur pour collecter de l’aide alimentaire, une ferme pédagogique pour une visite, un IME pour une animation… À aucun moment les jeunes, majoritairement mineurs, ne sont seuls. Cela rassure aussi bien les partenaires impliqués que les parents », précise la directrice. Pour lever les différents freins à la mobilité des jeunes ruraux, des sorties sont aussi prévues en transports collectifs vers des villes importantes comme Strasbourg. « C’est une ouverture essentielle, pour qu’ils ne se sentent plus dévalorisés vis-à-vis des urbains. » 

96 % des parents satisfaits

Le bilan, dressé en septembre 2024, témoigne de la richesse de cette politique jeunesse. 252 jeunes, âgés de 11 à 18 ans, ont participé au projet depuis sa création. Chaque année, 90 animations sont proposées sur le temps périscolaires et 12 semaines d’ouverture sont assurées pendant les vacances. De nombreux séjours et sorties ont emmené les jeunes vers des sites proches (Zooparc de Beauval, Lac de Pierre percée…) et plus lointains comme les Alpes ou Londres. Les jeunes ont créé et animent tous les vendredis un club de jeux de société, de même que des soirées sans écran. Ils ont par ailleurs mené de nombreuses opérations de solidarité et de prévention et déterminé eux-mêmes les règles de vie de leurs activités. Un questionnaire distribué aux parents a affiché un taux de satisfaction de 96 %. « Ces activités contribuent à un attachement de ces jeunes à leur territoire. Ils seront plus enclins plus tard, à rester ou à revenir s’y installer », se félicite l’adjointe à la mairie de Wattwiller, qui explique par ailleurs comment les municipalités et les associations doivent se mobiliser pour chaque année sensibiliser de nouveaux jeunes.