État des ouvrages d'art en France : le gouvernement se veut rassurant, après la catastrophe de Gênes
"Il n'y a aucune situation d'urgence" concernant l'état des ponts en France sur le réseau routier non concédé, a assuré mercredi 22 août le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, à l'issue du conseil des ministres de rentrée au cours duquel la ministre des Transports, Élisabeth Borne, a présenté une communication sur le sujet. "Trente pour cent des ouvrages nécessitent des réparations mais en grande majorité ce sont des travaux mineurs", a-t-il déclaré. Après l'effondrement d'un viaduc autoroutier à Gênes, en Italie, qui a fait 43 morts, le gouvernement se veut rassurant sur l'état des routes et des ouvrages d'art en France, en particulier les ponts. En France "il y a un million de kilomètres de routes et à peu près 250.000 ouvrages d'art. La sécurité est évidemment la priorité en matière de transports et l'ensemble des infrastructures gérées par l'État sont dans un état de surveillance permanente", a souligné Benjamin Griveaux. "Tous les ponts sont suivis par des visites annuelles et vous avez des inspections techniques plus détaillées et plus poussées qui se tiennent tous les trois ans", a-t-il rappelé.
Selon un récent audit réalisé sur le réseau routier national par deux bureaux d’études suisses mandatés par le ministère des Transports, 7% des ponts nécessitent "des légers travaux, ce qui ne veut pas dire pour autant qu'ils présentent le moindre caractère de dangerosité", a poursuivi Benjamin Griveaux. "Nous avons intérêt à avoir ces réparations maintenant si on ne veut pas que la situation se dégrade", a-t-il ajouté, précisant que "la situation française ne peut en aucun cas être comparée à la situation italienne".
Il a rappelé que "la programmation pour la décennie à venir sera présentée à l'automne dans le cadre de la loi d'orientation sur les mobilités, avec un scénario arbitré avec une hausse progressive des dépenses d'entretien" des routes nationales. Celles-ci sont passées de 700 à 800 millions en 2018. Elles atteindront 850 millions en 2020-22 et "930 millions à partir de 2023, ce qui permet d'enrayer la dégradation de l'état des routes les plus empruntées du pays", a précisé Benjamin Griveaux. L'audit sur les routes nationales recommande de dépenser environ un milliard d'euros par an jusqu'en 2037 afin d'enrayer la dégradation du réseau et Élisabeth Borne avait indiqué en mai au Sénat vouloir "porter progressivement à un milliard d'euros le budget annuel d'entretien et d'exploitation (du) réseau" national.
Tous transports confondus, le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) a évalué début février - sur la base d'un "scénario médian" - à 3 milliards d'euros l'enveloppe nécessaire à la rénovation des infrastructures, contre 2,4 milliards actuellement. Le gouvernement s'étant engagé à réduire le déficit public de 2,6% du PIB l'an dernier à 0,9% du PIB en 2020, un recours à l'endettement semble exclu : on s'oriente donc vers la mise en place de modes de financement alternatifs. La loi d'orientation des mobilités (LOM), qui devrait être présentée fin septembre, devra "examiner comment procurer un certain nombre de ressources supplémentaires", a reconnu le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb.
Concernant les pistes de financement, plusieurs élus, dont l'ancien secrétaire d'État aux Transports Dominique Bussereau, ont proposé de rouvrir le débat sur l'écotaxe, abandonnée en 2014 après plusieurs mois de manifestations et de sabotages. Dans son rapport de début février, le COI formulait d'autres propositions, comme la mise en place temporaire d'une vignette forfaitaire pour les poids lourds. Selon son président, Philippe Duron, cette solution - consistant à faire payer les transporteurs pour une période donnée et non plus à la distance parcourue comme avec l'écotaxe - pourrait rapporter "un peu plus de 300 millions d'euros" par an.
Le COI a aussi proposé des péages sur des voies express ou certains ouvrages d'art, l'instauration de péages urbains, l'adoption de taxes immobilières locales ou la taxation "souhaitable" des livraisons à domicile. Philippe Duron a également évoqué - sans y croire - une augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), ainsi qu'une réforme du calcul de la "ristourne" accordée sur le gazole aux professionnels.