Droit - Environnement, urbanisme : ce qu'il faut retenir de la nouvelle loi de simplification de la vie des entreprises
Régimes d'autorisation préalable
Afin "d'alléger les contraintes pesant sur les entreprises", le gouvernement est autorisé à légiférer par ordonnance pour prendre "toute mesure relevant du domaine de la loi aux fins de supprimer ou de simplifier les régimes d'autorisation préalable et de déclaration auxquels sont soumis les entreprises et les professionnels dans le cadre de l'exercice de leur activité, de remplacer certains de ces régimes d'autorisation préalable par des régimes déclaratifs, et de définir, dans ce cadre, des possibilités d'opposition de l'administration, des modalités de contrôle a posteriori et des sanctions éventuelles, tout en préservant les exigences de garantie des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la santé publique, ainsi que de protection des personnes et des données à caractère personnel". A noter : il n'est pas fait mention de la protection de l'environnement dans ces "exigences de garantie" à préserver.
Développement des projets de construction
Selon l'article 12 du texte, le gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin "de favoriser le développement de projets de construction ou d'aménagement situés en entrée de ville ou dans des zones à dominante commerciale, lorsque les conditions de desserte par les transports publics réguliers le permettent et que l'opération répond à un objectif de mixité fonctionnelle, en faisant en sorte que le règlement du plan local d'urbanisme [PLU] ou du document d'urbanisme en tenant lieu puisse autoriser le dépassement des règles de hauteur ou de gabarit". Cette autorisation doit avoir lieu "dans le respect des autres règles établies par le document, et en veillant à ce que l'introduction dans le règlement de ce mécanisme de majoration des droits à construire s'effectue selon une procédure de modification simplifiée du plan local d'urbanisme". La loi définit également de nouvelles modalités alternatives à l'enquête publique pour les "demandes de permis de construire et de permis d'aménager portant sur des projets de travaux, de construction ou d'aménagement donnant lieu à la réalisation d'une étude d'impact après un examen au cas par cas effectué par l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement". Pour ces permis, les dossiers de demande sont soumis à une procédure de mise à disposition du public selon les modalités prévues aux II et III de l'article L.120-1-1 du Code de l'environnement.
Le texte modifie en outre l'article L.123-1-13 du Code de l'urbanisme pour intégrer le fait que la réalisation de plus d'une aire de stationnement par logement ne peut être exigée lors de la construction des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées et de résidences universitaires. Cette dérogation n'était auparavant prévue que pour les logements locatifs financés avec un prêt aidé par l'Etat. Par ailleurs, lorsque ces constructions sont situées à moins de cinq cents mètres d'une gare ou d'une station de transport collectif et que la qualité de la desserte le permet, le nombre d'aires de stationnement exigible par logement ne peut dépasser 0,5. Pour les autres catégories de logements qui répondent à ces critères (situés à moins de cinq cents mètres d'un transport public, qualité de desserte suffisante), il ne peut être exigé la réalisation de plus d'une aire de stationnement par logement. Les orientations d'aménagement et de programmation du PLU peuvent adapter la délimitation des périmètres, où s'applique le plafonnement de stationnement à proximité des transports, en fonction de la qualité de la desserte. Les plans locaux d'urbanisme peuvent, en outre, ne pas imposer la réalisation d'aires de stationnement lors de la construction des logements.
Mise en œuvre des plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUI) et dérogations aux règles de retrait
Lorsqu'un EPCI engage une procédure d'élaboration d'un plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) avant le 31 décembre 2015, les calendriers de mise en compatibilité du PLU avec le schéma de cohérence territoriale - Scot (article L.111-1-1 du Code de l'urbanisme), du PLU au regard des dispositions du Grenelle de l'environnement (article 19 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement), et de transformation des plans d'occupation des sols (POS) en PLU (article L. 123-19 du Code de l'urbanisme) ne s'appliquent pas aux PLU en vigueur sur son territoire si le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et du développement durable (PADD) a eu lieu avant le 27 mars 2017 et que le PLUI est approuvé au plus tard le 31 décembre 2019 (article 13 de la loi). Ces dispositions sont applicables aux procédures d'élaboration de PLUI engagées après la promulgation de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) et à la métropole de Lyon.
En outre, l'article 14 du texte modifie l'article L.123-1 du Code de l'urbanisme pour préciser qu'un EPCI "peut décider, le cas échéant après accord de la commune concernée, d'achever toute procédure d'élaboration ou d'évolution d'un plan local d'urbanisme, d'un document en tenant lieu ou d'une carte communale, engagée avant la date de sa création ou du transfert de [sa] compétence" en matière d'urbanisme. Cette mesure est applicable à la métropole de Lyon. Elle supprime une disposition de l'article 136 de la loi Alur qui prévoyait que les communautés de communes ou d'agglomération pouvaient achever ces procédures engagées par les communes avant la date du transfert de la compétence, avec l'accord de cette dernière.
Le champ d'application du régime de dérogations au règlement du PLU prévu à l'article L.123-5-1 du Code de l'urbanisme est étendu aux communes appartenant à une des zones d'urbanisation continue de plus de 50.000 habitants auxquelles s'appliquent les dispositions de l'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, à savoir l'encadrement des loyers. Par ailleurs, les règles de surélévations prévues à cet article du Code de l'urbanisme qui ont pour objet la création de logements, sont étendues aux travaux d'agrandissement de la surface des logements. Enfin, un autre cas de dérogation est prévu à cet article : il est désormais possible de "déroger aux règles de retrait fixant une distance minimale par rapport aux limites séparatives, dans des conditions précisées par décret en Conseil d'État, pour autoriser une construction destinée principalement à l'habitation, sous réserve que le projet s'intègre harmonieusement dans le milieu urbain environnant."
Urbanisme commercial à Mayotte
"Conformément à l'article 3 de l'ordonnance n° 98-526 du 24 juin 1998 réglementant l'urbanisme commercial dans la collectivité territoriale de Mayotte", l'article 16 de la loi indique que "lorsque le permis de construire porte sur un projet soumis à une autorisation d'exploitation commerciale, le permis ne peut être accordé avant la délivrance de cette autorisation". "Sa mise en œuvre ne peut être entreprise avant l'expiration des recours entrepris contre elle."
Energies renouvelables en mer
Le gouvernement peut légiférer par ordonnance pour prendre toute mesure visant à autoriser le préfet de département à délivrer aux porteurs de projets une décision unique pour les installations de production d'énergie renouvelable en mer situées sur le domaine public maritime, les liaisons électriques intérieures aux installations correspondantes et les postes de livraison d'électricité qui leur sont associés, ainsi qu'une autre décision unique pour les ouvrages de raccordement au réseau public de ces installations (article 18). L'ordonnance devra aussi déterminer les conditions dans lesquelles cette décision unique "peut tenir lieu des autorisations, déclarations, approbations et dérogations requises pour le projet au titre du Code de l'environnement, du Code forestier, du Code de l'urbanisme, du Code de l'énergie et du Code général de la propriété des personnes publiques" et indiquer les dispositions transitoires de mise en œuvre de ces décisions uniques. L'ordonnance devra en outre "préciser les conditions dans lesquelles le juge administratif peut être saisi d'un recours à l'encontre" de ces décisions, les "modalités de contrôle, les mesures et les sanctions administratives" et les "modalités de recherche et de constatation des infractions et les sanctions pénales".
Plans de prévention des risques technologiques
Selon l'article 19 du texte, le gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de cette loi, des mesures législatives relatives aux plans de prévention des risques technologiques (PPRT) ayant pour but de modifier les dispositions du Code de l'environnement afin "de prévoir des modalités d'application des PPRT adaptées aux biens affectés à un usage autre que d'habitation, notamment en privilégiant, lorsqu'elles existent, des solutions de réduction de l'exposition au risque alternatives aux mesures foncières et aux prescriptions de travaux de renforcement". Les dispositions du Code de l'environnement relatives aux PPRT seront également clarifiées "afin d'améliorer et de simplifier l'élaboration, la mise en œuvre et la révision ou la modification des plans de prévention des risques technologiques".
Autorisation unique pour les installations classées
L'article 20 de la loi modifie l'ordonnance sur l'expérimentation de l'autorisation unique pour les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). "En application des textes actuels, les demandes d'autorisation unique qui seront déposées avant la fin de l'expérimentation mais qui n'auront pu voir leur instruction se terminer pendant la durée des trois ans de l'expérimentation, ne pourront plus aboutir au-delà de ces trois ans. Ceci crée pour les porteurs de projet une incertitude juridique majeure", avait expliqué le gouvernement dans son exposé des motifs. L'article autorise les "préfets à poursuivre jusqu'à leur conclusion l'instruction les demandes déposées pendant la durée de l'expérimentation, en continuant à appliquer pour ces demandes les procédures expérimentales au-delà de cette durée".
Installations de cogénération
Selon l'article 21 de la loi, "les installations de cogénération d'une puissance supérieure à 12 mégawatts électriques et en exploitation au 1er janvier 2013 peuvent bénéficier d'un contrat transitoire qui les rémunère pour la disponibilité annuelle de leur capacité de production, aussi bien en hiver qu'en été, pendant une période maximale de trois ans qui se termine au plus tard le 31 décembre 2016". Ce contrat est signé avec EDF. La rémunération tient compte des investissements nécessaires jusqu'au 31 décembre 2016 et de la rentabilité propre des installations incluant toutes les recettes prévisionnelles futures. Elle tient aussi compte de l'impact positif de ces installations sur l'environnement. Cette rémunération est plafonnée par un montant maximal annuel et ne peut être cumulée avec celle résultant d'un contrat d'obligation d'achat ou d'un appel d'offres. La mesure s'applique à compter du 16 juillet 2013. Elle a été prise pour mettre en conformité le Code de l'énergie avec la décision du 18 juillet 2014 du Conseil constitutionnel, qui avait jugé l'actuel régime de soutien financier contraire à la Constitution.
Anne Lenormand
D'autres dispositions intéressant les collectivités
Secteur touristique
L'article 22 de la loi modifie le Code de l'environnement pour autoriser par dérogation le convoyage par des motoneiges de la clientèle vers les restaurants et hôtels d'altitude. Par ailleurs, l'article 49 autorise le gouvernement à prendre par ordonnance "toute mesure relevant du domaine de la loi permettant la simplification et l'adaptation dans le secteur touristique". Sont mentionnées en particulier la simplification des procédures de mises aux normes et d'urbanisme pour les équipements et aménagements touristiques, la simplification en matière d'organisation des offices de tourisme et l'adaptation des missions du groupement d'intérêt économique Atout France.
Dépénalisation du stationnement
L'article 36 autorise le gouvernement à prendre par voie d'ordonnance "toute mesure relevant du domaine de la loi et ayant pour objet de fixer les règles de recouvrement, de gestion et de contestation devant la juridiction administrative spécialisée de la redevance de stationnement, y compris du forfait de post-stationnement, mentionnée à l'article L. 2333-87 du Code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l'article 63 de la loi Maptam du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, ainsi que les règles de contestation des actes de poursuite pris par le comptable compétent".
Transposition des directives Marchés publics
L'article 42 de la loi correspond en fait tout simplement à la demande d'habilitation du gouvernement pour transposer par ordonnance les directives Marchés publics (secteurs classiques et spéciaux) publiées le 28 mars dernier au JOUE. Une consultation sur le projet d'ordonnance vient d'ailleurs d'être lancée par la direction des affaires juridiques de Bercy. Au-delà des seules directives européennes, la loi profite de leur transposition pour "rationaliser" et "harmoniser", là encore par ordonnance, le droit interne de la commande publique.
Conventions de mandat
Actuellement, les personnes morales de droit public, dont les collectivités, confient parfois à un tiers public ou privé, par une convention de mandat, l'encaissement de certaines de leurs recettes (ou le paiement de certaines de leurs dépenses). Cela vaut dans des domaines très différents, y compris par exemple pour la vente via un mandataire de billets d'entrée aux manifestations culturelles qu'elles organisent. Or il s'avère que ces conventions de mandat, bien que courantes, n'étaient pas vraiment légales. Une lacune que vient combler l'article 40 de la loi. Ces conventions pourront aussi bien concerner des dépenses d'investissement que de fonctionnement, des recettes tirées des prestations fournies que des redevances… Un décret viendra préciser les choses. Le syndicat national Force ouvrière des Finances publiques a "condamné fermement" cette mesure, qui selon lui "ouvre la voie à la privatisation du recouvrement de tous les produits des collectivités territoriales et des établissements publics, mission dévolue au comptable public". Elle juge cette évolution "extrêmement préoccupante pour l’avenir du réseau de la direction générale des finances publiques".
La création de Business France
C'est l'article 46 de cette loi qui a permis au gouvernement de créer par ordonnance Business France, en tant qu'établissement public unique fusionnant les deux opérateurs sur lesquels s'appuie l'Etat pour promouvoir l'attractivité du territoire français et favoriser le développement international des entreprises françaises, à savoir Ubifrance et l'Afii. Cette ordonnance du 24 décembre a déjà été concrétisée puisque Business France est effective depuis le 1er janvier 2015 (voir
notre article du 7 janvier).
C.M., avec A.L
Référence : loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives, JO du 21 décembre 2014 page 21647.