Élisabeth Borne : la crise "ne remet pas en cause les priorités en matière de transition écologique et de décarbonation des transports"
Durant son audition le 16 avril en visioconférence par les députés de la commission du développement durable, Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, a insisté sur la nécessité de distinguer les mesures d’urgence actuellement prises pour soutenir des secteurs de celles, toujours effectives, liées aux objectifs à atteindre en matière de transition écologique et de décarbonation des transports.
Décroche-t-on des objectifs environnementaux ? Le 16 avril la ministre Élisabeth Borne a rassuré les députés de la commission du développement durable sur la pleine mobilisation du gouvernement pour atteindre ceux fixés avant la crise dans deux textes importants, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire et la loi d’orientation des mobilités (LOM) . "Nous continuons à travailler sur leurs textes d’application en restant attentifs aux difficultés que rencontrent les acteurs et les entreprises qui sont consultées pour les élaborer", a-t-elle expliqué aux parlementaires. "La crise que nous traversons ne remet pas en cause les priorités du gouvernement en matière de transition écologique et de décarbonation des transports", a souligné la ministre.
Énergies renouvelables : aménagements de délais
Secteur par secteur, Élisabeth Borne a procédé à un rapide point intéressant en partie les collectivités. Du fait de l’arrêt des chantiers, des projets de développement d’énergies renouvelables sont suspendus. L’approvisionnement de certains méthaniseurs fabriquant du biogaz a été rendu compliqué. Des aménagements de délais ou d’ordre contractuel sont donc à l’ordre du jour et examinés au cas par cas par l’administration.
Nucléaire : adaptation du programme d'arrêt pour rechargement et maintenance
Du côté des énergies conventionnelles, de la capacité d’exploitation des centrales et du niveau de disponibilité au regard de la demande, la filière nucléaire ne rencontre pas de difficultés à court terme mais à moyen terme se pose l’enjeu d’adaptation du programme d’arrêt de tranches pour rechargement et maintenance. Celui-ci fera l’objet d’un plan conçu avec cette filière industrielle et présenté "dans les semaines qui viennent", en vue de minimiser les perturbations et la disponibilité d’énergie pour l’hiver prochain.
Déchets : du mieux dans les centres de tri
Dans les centres de tri des déchets menaçant de fermer, "la situation s’améliore", a-t-elle aussi rassuré. Une majorité de collectivités maintiennent selon la ministre un service de collecte sélective. Mais la fermeture des déchetteries publiques laisse poindre la crainte de voir s’accumuler des dépôts sauvages. "Nous voulons accompagner les collectivités dans leur réouverture progressive". De même pour les déchets de soins médicaux (Dasri) : pour faire face à l’augmentation des volumes, des solutions sont explorées (stockage temporaire, envoi pour traitement vers des régions moins touchées).
"Hygiénisation" des boues des stations d'épuration : vers un accompagnement des collectivités
Concernant les boues des stations d'épuration produites pendant l’épidémie, que l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) recommande de ne pas épandre "sans hygiénisation préalable", autrement dit sans traitements inactivant le virus (voir notre article du 7 avril), la ministre évoque là aussi un accompagnement ciblant les collectivités dénuées d’un tel dispositif et qui feront certainement face à des surcoûts pour trouver un processus d’hygiénisation.
Contrôle du respect des "exigences environnementales"
"La crise sanitaire que nous traversons, et avec elle les mesures d’urgence qui sont prises, ne signifie pas que nous nous relâchons sur les exigences environnementales", a assuré la ministre. Cela vaut pour les installations industrielles et leur sécurité, même si certaines d’entre elles sont à l’arrêt : "Les inspecteurs des installations classées restent mobilisés dans cette période d’activité dégradée". Dans les espaces naturels, l'Office français de la biodiversité (OFB) a aussi communiqué ce 17 avril pour assurer que ses inspecteurs de l'environnement restaient sur le front pour faire cesser des pollutions causant, notamment suite à des épandages d'effluents agricoles, des dommages à la faune ou à la flore dans les eaux superficielles.
Une cellule de soutien aux acteurs (zoos) détenant des animaux sauvages en captivité - la dite détention est en effet régie par le code de l'environnement et ses textes d’application - se met aussi en place. Elle apportera une aide qui fera l’objet d’un amendement au nouveau projet de loi de finances rectificative (PLFR) actuellement débattu à l’Assemblée nationale.
Transports publics : inquiétudes sur le versement mobilité
Côté transports, les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) s’inquiètent des répercussions de la crise, notamment du fait de la mise massive en chômage partiel des salariés par les entreprises, sur la non affectation du versement mobilité (VM) - lire notre encadré sur Île-de-France Mobilités. Le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) table sur une perte d’au moins un milliard d’euros de recettes du VM. Un accord aurait été trouvé pour verser un acompte aux AOM. "S’il est trop tôt pour faire les comptes, à terme il faudra le faire", a commenté la ministre.
Un plan national santé environnement à revisiter
Enfin, elle a appelé à revisiter le plan national santé environnement (PNSE 4) pour prendre en compte les enjeux des zoonoses (maladies infectieuses ou parasitaires transmissibles d'un animal vertébré à l’homme), mais aussi la qualité de l'air "qui peut sans doute avoir un impact aggravant sur les maladies respiratoires" telles que le Covid-19.
Ile-de-France Mobilités réclame 1 milliard d'euros à l'Etat
Le Conseil d'administration d'Ile-de-France Mobilités (IDFM) a mandaté ce 17 avril sa présidente Valérie Pécresse pour négocier avec l'Etat la compensation d'un milliard d'euros de pertes de recettes sur l'ensemble de la durée du confinement, a annoncé l'autorité régionale des transports. "L'épidémie de coronavirus et le confinement vont avoir des conséquences colossales sur l'économie des transports franciliens. (...) Les usagers ne pourront payer les conséquences du confinement, mis en place par le gouvernement", a déclaré la présidente d'IDFM et de la région Ile-de-France, citée dans un communiqué.
Le manque à gagner vient de la suspension du versement mobilité (ex-versement transport), prélevé sur la masse salariale des entreprises de plus de 11 salariés, qui représente plus de 50% des ressources d'IDFM et de la quasi-disparition des recettes venues des voyageurs (la billetterie représentant environ 30% des ressources), a indiqué l'autorité organisatrice des transports franciliens.
A.L. / Localtis