Elections départementales et régionales : le gouvernement acte le report à juin 2021
Le gouvernement va déposer un projet de loi pour acter le report des élections départementales et régionales à fin juin 2021. Il entend suivre les conclusions que Jean-Louis Debré lui a remises ce 13 novembre. La nouvelle échéance recueille une large adhésion, souligne l'ancien président du Conseil constitutionnel. Il recommande par ailleurs de faciliter le vote par procuration, mais se montre réservé sur le vote par correspondance.
Les élections départementales et régionales, dont la tenue était prévue fin mars, devraient être repoussées de trois mois, à fin juin 2021. Dans le rapport qu'il a remis ce 13 novembre au Premier ministre, l'ancien président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré préconise ce report. Au terme d'une soixantaine d'auditions (scientifiques, représentants des partis et des groupes politiques, associations d'élus, etc.), l'ex-ministre de l'Intérieur de Jacques Chirac estime que cette option est celle qui serait "susceptible de recueillir le plus large assentiment politique" et présenterait les risques de contentieux les moins élevés.
Il pousse par ailleurs le gouvernement à annoncer "dans de brefs délais" la date à laquelle il envisage l'organisation des deux scrutins locaux. Un message reçu cinq sur cinq par le Premier ministre. Jean Castex a en effet fait savoir, dans un communiqué, qu'il déposerait au Parlement "dans les toutes prochaines semaines" un projet de loi "proposant ce nouveau calendrier électoral et les conditions d’organisation de ces scrutins, sur la base des propositions" du rapport Debré. Dans l'entourage du chef du gouvernement, on précise que le projet de loi serait présenté en conseil des ministres entre le 2 et le 16 décembre. L'idée étant que la loi soit promulguée au plus tard "fin février 2021".
Point de situation
A l'approche des échéances électorales, un point sur la situation sanitaire devrait être fait par le conseil scientifique Covid-19 et remis au Parlement, recommande la mission conduite par Jean-Louis Debré. Cette proposition, qui a recueilli un large soutien parmi les personnalités auditionnées, consiste à reconduire le principe des rapports qui avaient été établis avant le second tour des élections municipales.
"Si un protocole sanitaire strict pourrait permettre d’organiser le scrutin lui-même (aux dates initialement prévues), ce n’est pas le cas pour la conduite de la campagne électorale, en particulier pour les élections départementales", souligne l'ancien président de l'Assemblée nationale.
Dans le souci de protéger la sécurité des électeurs qui se déplaceront, il recommande des "aménagements" qu'il qualifie lui-même "de portée limitée" pour "permettre la préparation et la tenue des scrutins dans de bonnes conditions". Il s'agit de la reconduction du protocole sanitaire et des règles d'organisation du bureau de vote qui ont été mises en place pour les municipales.
Simplifications
Reconduction également des assouplissements en matière de vote par procuration que le Parlement avait votés peu avant le second tour des élections municipales : possibilité pour un mandataire d'être porteur de deux procurations, suppression de la nécessité de justifier le recours au vote par procuration, déplacement des officiers de police judiciaire ou de leurs délégués au domicile des personnes fragiles pour retirer leur procuration. En outre, d'autres simplifications, d'ordre réglementaire, pourraient permettre d'"alléger la charge des communes", estime Jean-Louis Debré. Ayant sans doute en tête le taux d'abstention record enregistré aux dernières municipales, il recommande aussi au gouvernement d'engager une campagne d'information sur "les compétences des collectivités régionales et départementales".
D'autres aménagements techniques sont proposés : la majoration du plafond des dépenses des candidats (du fait de l'allongement de la période pré-électorale) et le doublement du format des professions de foi, ce qui permettrait aux candidats de développer davantage leurs propositions. Mais, dans l'entourage du Premier ministre, on n'est guère favorable à cette idée qui est à rebours de la dématérialisation et donc "ne va pas dans le sens de l'histoire".
Réserves sur le vote par correspondance
Sur l'introduction du vote par correspondance, qui est souhaitée notamment par la droite sénatoriale et des élus Modem, Jean-Louis Debré se montre réservé. Les griefs contre cette modalité de vote sont nombreux : risques de fraude et d'invalidation du scrutin, coût (272 millions d'euros selon le ministère de l'Intérieur), questions posées par le délai d'une semaine entre le premier et le second tour, difficultés d'acheminement… A Matignon, on insiste sur les mêmes questions et l'on souligne aussi que la nécessité pour l'électeur de se déplacer jusqu'au bureau de poste ne réduit pas les risques de contamination au Covid-19.
Sur le vote par internet qui nécessite une indispensable période d'"acclimatation", Jean-Louis Debré estime que sa mise en place est prématurée.
Ces derniers jours, les débats se sont focalisés non pas sur le report des élections départementales – celui-ci semble susciter le consensus – mais sur l'utilisation du vote par correspondance. L'idée "peut être explorée", a jugé le ministre chargé des Relations avec le Parlement, Marc Fesneau. Balayant le risque de fraude, l'eurodéputé EELV Yannick Jadot y est aussi favorable. Parmi les élus locaux, c'est par exemple le président du conseil départemental de la Mayenne, Olivier Richefou, qui lui apporte son soutien. L'édile préconise même qu'une expérimentation soit menée sur son territoire.
"Même s'il faudra y venir plus tard", l'heure n'est pas à l'utilisation du vote par correspondance ou du vote par internet", estime pour sa part le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (qui est aussi à la tête de Régions de France), Renaud Muselier. "Rien n'est prêt", insiste-t-il.