École inclusive : des annonces pour faire redémarrer la machine

La réunion du comité national de suivi de l'école inclusive – une première depuis vingt mois – a débouché sur une série d'annonces qui, pour la plupart, n'ont rien de nouveau. Comme une illustration de la difficulté à faire avancer la question du handicap à l'école.

"Poursuivre l'accélération du déploiement de l'école inclusive." C'est par cette formule pleine de bonne volonté qu'Élisabeth Borne, ministre de l'Éducation nationale, et Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée du handicap, ont introduit les annonces faites à l'issue de la réunion du comité national de suivi de l'école inclusive (CNSEI) qu'elles ont présidée le 24 février 2025. Et cette accélération sera la bienvenue tant les sujets liés à l'école inclusive ont connu ces dernières années des retards de mise en œuvre. 

Parmi les annonces du CNSEI, on retrouve celle déjà formulée il y a quelques jours au Sénat par Élisabeth Borne à propos de la mise en place, dès la rentrée de septembre 2025, de 500 nouveaux pôles d'appui à la scolarisation (PAS), avant un déploiement plus large de 3.000 pôles d'ici 2027 afin d'"assurer une couverture nationale" (voir notre article du 13 février). Les PAS sont un dispositif qui doit permettre à l'Éducation nationale de favoriser la scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers en apportant une réponse "de premier niveau" avant une notification d'accompagnement humain de la part de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH). 

À propos des MDPH, la réunion du CNSEI a été l'occasion d'annoncer que "la simplification des démarches [...] est également une priorité afin de réduire les délais de traitement des dossiers et améliorer l'accès aux dispositifs d'accompagnement". Or le chantier de la simplification des démarches auprès des MDPH commence à ressembler à un serpent de mer. Il en avait déjà été question en 2019 à l'issue d'un Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) (voir notre article du 16 juillet 2019).

Serpents de mer de l'inclusion scolaire

Autre annonce qui n'en est pas vraiment une, celle visant à "renforcer les structures médicosociales au sein des établissements scolaires" pour faciliter "un accompagnement de proximité" des enfants en situation de handicap. Une mesure déjà soutenue dans le cadre d'une circulaire du 7 décembre 2023 elle-même issue des décisions de la Conférence nationale du handicap d'avril 2023. Dans cette circulaire, il est question d'une enveloppe de "400 millions d'euros [sur la période 2024-2030], consacrés au financement de l'appui aux établissements scolaires par le secteur médicosocial pour la scolarisation des élèves en situation de handicap", un chiffre repris par les deux ministres le 24 février. Cette circulaire faisait en outre suite à une précédente, datée du 7 juin 2019, prévoyant les modalités de création à la rentrée suivante d'équipes d'appui médicosocial pour améliorer la scolarisation des enfants en situation de handicap (voir notre article du 3 juillet 2019). Le sujet n'est donc pas nouveau et ne semble pas avoir beaucoup progressé ces dernières années.

Autre serpent de mer de la politique d'inclusion scolaire : la formation des AESH (accompagnants d'élève en situation de handicap) et le renforcement de l'attractivité de ce métier marqué par une faible rémunération et des temps de travail incomplets. Le CNSEI annonce pour eux "un plan de formation renforcé [...] avec l'objectif de leur offrir des perspectives de carrière plus attractives et d'améliorer leur reconnaissance au sein de l'Éducation nationale". Là encore, il s'agit d'une volonté maintes fois affichée mais qui n'a toujours pas trouvé de concrétisation à la hauteur des enjeux. Il y a près d'un an, le gouvernement annonçait même un "plan métier pour les AESH"... avant l'été 2024 (voir notre article du 16 mai 2024).

Des points soulevés dès 2018

Ces différentes annonces du CNSEI arrivent par ailleurs après des mois d'atermoiements autour de la question de la prise en charge par l'État de la rémunération des AESH lors de la pause méridienne. Votée en mai 2024, la loi instituant cette prise en charge n'a été rendue effective que le 14 février 2025, par la publication d'un décret d'application, alors que la rentrée de septembre 2024 s'était faite dans des conditions chaotiques (voir notre article du 24 septembre 2024).

Cette situation est d'autant plus paradoxale que, dès 2018, le gouvernement avait pris la mesure des enjeux et des problèmes posés par l'école inclusive. Parmi les points d'amélioration que le ministre de l'Éducation nationale et la secrétaire d'État aux personnes handicapées de l'époque avaient alors identifiés, on relevait déjà la nécessité de développer l'interaction entre le secteur médicosocial et l'école – un "accroissement significatif" de l'appui des services médicosociaux aux établissements scolaires était même annoncé – ou celle de "promouvoir" le métier d'AESH (voir notre article du 18 juillet 2018).

Comme un aveu de cette volonté maintes fois empêchée de faire suivre d'effets les annonces en faveur de l'école inclusive, Élisabeth Borne et Charlotte Parmentier-Lecocq ont enfin annoncé que le CNSEI se réunirait "à nouveau tous les six mois"... alors qu'il ne s'était plus réuni depuis juin 2023.