Dotations aux collectivités : les députés veulent renforcer le contrôle
Une mission d'information de l'Assemblée nationale appelle à améliorer l'information et le contrôle des parlementaires sur quelque 40 milliards d'euros annuels de dotations de l'État aux collectivités. Leurs propositions pourraient bien déplaire aux élus locaux.
Une mission d'information de la commission des finances de l'Assemblée nationale sur la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) d'août 2001 propose d'engager "une réflexion" sur une évolution du statut de la dotation globale de fonctionnement (DGF), du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), ainsi que de diverses dotations dans le budget de l'État.
Cet ensemble financier constitue ce que les spécialistes appellent les "prélèvements sur les recettes" (PSR) de l'État, opérés au profit des collectivités territoriales. Comme leur nom l'indique, ces derniers minorent les recettes totales inscrites au budget général de l'État et ne représentent donc pas une dépense de l'État. Dans la loi de finances pour 2019, ceux-ci se sont élevés à 40,6 milliards d'euros, un montant considérable malgré la baisse brutale de la DGF ces dernières années.
La mission d'information, qui a dressé un bilan mitigé de la mise en œuvre de la Lolf, forme le vœu "qu’une réflexion sur l’opportunité de la transformation des PSR en dépenses budgétaires soit engagée". La suppression des PSR "permettrait de renforcer le pilotage et le contrôle budgétaires", explique la mission, qui était composée du président et du rapporteur général de la commission des finances, ainsi que de députés des différents groupes politiques. Les PSR présentent en effet plusieurs inconvénients, selon elle : ils "ne font pas l’objet d’une justification au premier euro et ne sont pas accompagnés d’objectifs et d’indicateurs de performance." Ainsi, "l’évaluation et le contrôle budgétaire sur les PSR sont plus limités que sur les dotations budgétaires."
La mission estime que la suppression des PSR "ne pose pas de difficultés au niveau technique." Mais elle sait qu'elle poserait un problème de principe pour les élus locaux. Ces derniers rappellent en effet, régulièrement, que les dotations de l'État ont vocation à compenser la suppression d'impôts locaux. La mission en prend acte. Elle estime, ainsi, que "des garanties" devraient être apportées aux collectivités territoriales, par exemple par "l’exclusion de ces dépenses de toute mesure de régulation budgétaire."
"Débudgétisation"
Mais Jean-René Cazeneuve, député (LREM) en charge des questions de finances locales au sein de l'Assemblée nationale, émet un doute sur l'efficacité d'une telle garantie. Elle serait "assez complexe à mettre en œuvre", a-t-il jugé le 11 septembre, lors de la présentation du rapport. Le député a expliqué que "la régulation budgétaire s'applique uniformément aux crédits d'une mission, quel que soit le statut des crédits."
Le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation a fait remarquer aussi que la transformation des PSR en dotations budgétaires "priverait les parlementaires de toute possibilité de proposer l'augmentation de la DGF, du FCTVA, des dépenses éligibles à ce titre." Des amendements qui iraient dans ce sens tomberaient inévitablement sous le coup de l'article 40 de la Constitution, lequel interdit aux initiatives parlementaires de créer ou aggraver une charge publique.
Les recommandations sur les PSR s'inscrivent dans un ensemble de propositions de la mission d'information, ayant pour but de lutter contre la "débudgétisation" des dépenses de l'État (via les agences, les taxes affectées, les budgets annexes, ou encore les comptes spéciaux). Il s'agit de permettre un renforcement de la mission de contrôle budgétaire exercée par le Parlement.