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Changement climatique - Deux députés veulent réveiller le paquet énergie-climat

Dans un rapport parlementaire rendu public le 15 mai, et faisant suite à celui de la Cour des comptes publié en janvier dernier, les députés Jean-Jacques Guillet (Hauts-de-Seine, UMP) et François de Rugy (Loire-Atlantique, EELV) proposent de dynamiser la politique française de lutte contre le changement climatique, en mobilisant des outils existants mais encore sous-investis.

Le 16 janvier dernier, la Cour des comptes avait tapé fort sur la pertinence de l'action publique en matière de lutte contre le changement climatique. Pilotage national défaillant, "objectifs irréalistes" pour la rénovation thermique, échec du marché européen du carbone : son rapport décrivait plus qu'il n'évaluait.
Les travaux et la série d'auditions entamés dès janvier par les députés Jean-Jacques Guillet et François de Rugy ont eu vocation à compléter sa portée. Leur but était d'apprécier l'efficacité des mesures prises par la France pour atteindre les objectifs du paquet énergie-climat, qu'elle a adopté en 2008. Pour rappel, celui-ci prévoit de réduire de 20% les émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne d'ici à 2020 par rapport à 1990. Tout en portant la part des énergies renouvelables à 20% du mix-énergétique. Objectifs multiples ou pas, les députés prescrivent avant tout de changer de cible en passant "de la notion d'émissions de gaz à effet de serre (GES) à celle d'empreinte carbone". Mesurer l'une ou l'autre aboutit en effet à des résultats différents. Ils estiment que "calculer en termes d'émissions nationales favorise la délocalisation des productions intenses en carbone vers des pays moins exigeants". Pour tenir compte du carbone importé et "apprécier fidèlement l'efficacité des politiques climatiques menées", ce passage à l'empreinte carbone devient selon eux - mais aussi la Cour des comptes et nombre d'experts et professionnels auditionnés pour ce rapport - une nécessité.

Déplacer le curseur

Ils recommandent aussi de mettre l'accent sur deux secteurs "aux marges de progression importantes" : les transports et l'agriculture. A leurs yeux, ces deux secteurs auraient du moins plus de marges de progression que les secteurs des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique des bâtiments. Côté transports, "les efforts doivent cibler la route" et, côté agricole, l'urgence est de mise au vu de "l'ampleur de sa contribution aux émissions polluantes, en comparaison des autres pays européens". Côté bâtiment, ils préconisent tout de même de mieux accompagner les ménages et de stabiliser les dispositifs (éco-PTZ, crédit d'impôt). "Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est un outil à consolider. La question se pose de le rendre juridiquement opposable, à condition de veiller à sa mise à jour régulière et à sa vérification régulière", indique le rapport. Les députés invitent aussi à mieux se saisir d'autres outils existants : fonds de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) pour accompagner les collectivités territoriales, espaces Info-Energie financés par ces dernières et l'Ademe, etc. Enfin, ils pointent un défaut du paquet énergie-climat : "La conduite du changement n'est pas son point fort. Campagnes de communication très verticales, incitations fiscales en évolution constante… Si plusieurs changements paraissent difficilement atteignables à moyen terme - changement de la ration alimentaire (moins de viande), développement du télétravail - d'autres qui paraissaient inimaginables hier sont advenus très soudainement, notamment grâce aux nouvelles technologies : covoiturage, auto-partage…". Les députés préconisent donc d'identifier et de lever les freins pratiques au changement. "Les citoyens sont prêts, le conservatisme qu'on dit généralisé n'existe pas. Il y a bien plus d'esprits volontaires qu'on ne le croit", a conclu François de Rugy.