Dette des collectivités : la Cour des comptes n'écarte pas tout risque
La dette du secteur public local, qui a atteint 178 milliards d'euros en 2017, demeure globalement maîtrisée, selon un rapport de la Cour des comptes. Mais les collectivités ne disposent pas toujours d'une bonne connaissance des engagements qui ne sont pas inscrits dans leur bilan, s'alarme-t-elle.
L’encours de dette des administrations publiques locales "comporte des risques a priori moins forts que par le passé", affirme la Cour des comptes dans une enquête sur "la dette des entités publiques" qu'elle a publiée le 20 février. Pour le secteur public local, "les risques de marché, en particulier celui de taux, apparaissent globalement limités", indique l'institution de la rue Cambon, dans ce rapport commandé par la commission des finances du Sénat. Toutefois, "les caractéristiques des emprunts à taux variable" – qui représentent 30% des emprunts souscrits – "ne sont pas connues", nuance-t-elle. "Un risque de marché ne peut être écarté" s'agissant de la dette locale, en déduit-elle.
Globalement, les collectivités territoriales sont relativement peu endettées. Le total des crédits qu'elles ont souscrits représentaient 178 milliards d'euros en 2017. Les deux tiers de cet encours étaient détenus par les communes et leurs groupements. Le nombre des situations critiques s'avère limité. En 2017, huit départements, 3.075 communes sur 36.110, 126 EPCI sur 1.266 et une métropole sur 22 dépassaient les seuils d'alerte définis par la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Or lorsque ces seuils sont franchis, cela ne signifie pas nécessairement que les collectivités sont en situation de surendettement. Si ce bilan est positif, c'est essentiellement parce que les collectivités territoriales sont soumises à la "règle d'or" qui les contraint à n'emprunter que pour financer leurs investissements.
Engagements hors bilan : trop d'opacité
Toutefois, la Cour des comptes alerte sur une information qui, concernant la dette locale, demeure insuffisante. Les engagements que souscrivent les collectivités territoriales et qui ne sont pas inscrits dans leur bilan sont en effet recensés de manière non exhaustive. Ainsi, 90% des 25 collectivités et EPCI participant à l'expérimentation de la certification des comptes locaux qui a débuté fin 2016 "n’ont pas mis en place une procédure formalisée de recensement" de ces opérations.
Lorsqu'un recensement est effectué, il est "souvent limité" à la prise en compte des garanties d’emprunt, dont bénéficient en particulier les bailleurs sociaux (fin 2016, les collectivités garantissaient près de 132 milliards d'euros de dettes des organismes de logement social). Mais ces garanties d'emprunt "présentent un faible risque", précise la Cour. En raison de ces garanties, les collectivités ont par exemple dû débourser un peu plus de 4 millions d'euros, en 2015, et seulement 300.000 euros en 2016. Autre carence, selon la Cour : l'information des assemblées locales sur la dette "n’est pas consolidée au niveau national".
Objectif de dépenses
La loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022 prévoit une réduction du poids de la dette publique de l’ordre de 5 points de PIB à la fin du quinquennat. Mais pour la Cour, ce scénario est "fragile". La trajectoire de la dette publique fixée par le législateur n’est "jamais respectée", observe-t-elle.
Pour limiter l'endettement, les magistrats préconisent la mise en place d'un "objectif global" d'évolution des dépenses de l'ensemble des administrations publiques, qui serait fixé en fonction de "la croissance potentielle". La loi de programmation des finances publiques préciserait alors "la répartition de l’effort" entre l'Etat, les administrations de sécurité sociale et les collectivités territoriales.
Selon la Cour, le Haut conseil des finances publiques, organisme indépendant créé en 2012 et veillant sur la politique budgétaire, devrait aussi avoir pour mission de surveiller "la trajectoire" de la dette publique.