Archives

Services - Des Bistrots de pays aux Bistrots de quartier ?

6.000 bistrots ont disparu en moins de dix ans en France. L'érosion est particulièrement sensible en milieu rural. C'est pour contrer cette tendance que les Bistrots de pays ont été créés il y a vingt ans. Il en existe 248 aujourd'hui, essentiellement concentrés en Paca et Midi-Pyrénées. La Fédération nationale des Bistrots de pays, qui a fêté cet anniversaire à Forcalquier les 18 et 19 mars, encourage aujourd'hui la création d'un label "Bistrot de quartier".

Les bistrots, symboles de l'art de vivre à la française, font grise mine.  Environ 500.000 au début du siècle dernier, ils n'étaient plus que 200.000 dans les années 60 et à peine 35.400 aujourd'hui, selon les données de l'Insee. "La situation est assez catastrophique, alerte Bastien Giraud, le coordonnateur de la Fédération nationale des Bistrots de pays. Les explications sont multiples. Il y a eu les réglementations sur le tabac et l'alcool, les comportements des consommateurs qui sont de plus en plus individualistes, mais aussi l'accumulation de normes qui deviennent inapplicables, en matière d'hygiène et d'accessibilité par exemple. Elles induisent des investissements trop chers pour les petits commerces…" L'arrivée d'internet et des réseaux sociaux comme Facebook ont donné le coup de grâce : 6.000 bistrots ont disparu entre 2003 et 2011, d'après l'Insee. L'érosion est aujourd'hui de 2% par an et touche aussi bien les villages que les villes et les banlieues. Aucune région n'est épargnée. Toutefois, c'est en Alsace et en Ile-de-France que les pertes ont été les plus fortes (-25 et –24% entre 2003 et 2011). A l'inverse, le Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes sont les deux régions qui ont le mieux résisté (-2 et -3%), suivies du Centre et de la Corse (-6% et -7%).

Plus que 5.000 bistrots de villages

Mais dans les villages, la situation est plus préoccupante. Il n'en reste plus que 5.000... Or les bistrots, "constituent bien souvent les seuls points de services de proximité encore présents au sein des villages", souligne la Fédération nationale des Bistrots de pays.
C'est pour contrer ces disparitions que le label "Bistrot de pays" a été créé il y a vingt ans, à Forcalquier (Alpes-de-Haute Provence). Il est réservé aux villages de moins de 2.000 habitants. Présentés comme des "ambassadeurs des territoires", les bistrotiers de pays doivent, en plus du couvert, fournir des services qui ne sont pas assurés ailleurs (poste, presse, épicerie, dépôt de pain, internet…). Le label n'est pas décerné à des établissements isolés mais à des réseaux regroupant au moins cinq bistrots sur un territoire. Les bistrotiers doivent respecter une charte et trouver un partenaire local : chambre de commerce, parc naturel régional, pays, intercommunalité… Après une formation, ils s'engagent à valoriser les produits du terroir et à organiser des animations culturelles voire sportives en plus des services aux habitants : cinéma, théâtre, randonnées…
Les Bistrots de pays, qui fêtaient leurs vingt ans à Forcalquier les 18 et 19 mars, sont 248 à travers la France, avec un rythme de progression de 10% par an ! Ils font vivre 700 personnes pour un chiffre d'affaires global de 25 millions d'euros. Mais ils sont encore concentrés dans huit régions à peine : 59 en Paca, 51 en Midi-Pyrénées, 45 en Rhône-Alpes, 35 en Languedoc-Roussillon, 21 en Picardie, 20 en Champagne-Ardenne, 11 en Limousin, 6 en Franche-Comté.

Bistrot de quartier

La fédération a interrogé ses adhérents pour en savoir plus. La quasi-totalité d'entre eux (92%) proposent une restauration complète, 8% seulement se limitent à un casse-croûte. Parmi les services fournis, 27% font débit de tabac, 23% ont une épicerie, 11% assurent le service postal, 7% fournissent la presse et 30% le dépôt de la presse locale. Preuve qu'ils savent aussi vivre avec leur temps : 48% proposent un accès wifi (le plus souvent gratuit) et 8% mettent un ordinateur à disposition.
Un quart seulement ont bénéficié d'un accompagnement à l'installation. Autre enseignement : 42% sont propriétaires, 40% sont locataires auprès d'une collectivité et 18% auprès d'un propriétaire privé. Parmi les locataires de murs communaux, 60% sont propriétaires du fonds de commerce.
Aujourd'hui, la fédération voudrait étendre le concept aux villes avec un label "Bistrot de quartier". "Les bistrots de quartier sont aussi un moyen de faire du lien social, certains fonctionnent comme des réseaux villageois, à l'image de Plus belle la vie, souligne Bastien Giraud, mais ils sont progressivement remplacés par des agences immobilières ou des banques." La fédération a déjà déposé la marque et recherche des financements publics ou privés pour pouvoir mettre en place ce nouveau label.