Déclassement de la protection du loup : la commission des affaires européennes de l’Assemblée prend part au débat
Emboîtant le pas à une possible révision du statut de protection du loup au sein de l’UE, un avis politique de la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale, adopté ce 31 janvier, plaide pour un ajustement des textes à l’état de conservation de l’espèce et un soutien accru aux éleveurs.
Alors que le nouveau plan Loup "2024-2029" devrait être très prochainement publié, la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale a adopté, ce 31 janvier, un avis politique sur le statut de protection du loup et le soutien aux éleveurs au sein de l’Union européenne (UE) sur proposition de la députée des Hautes-Alpes, Pascale Boyer (Renaissance).
La réapparition du loup dans certaines régions des pays de l’UE, la dynamique démographique de sa population et les pertes subies par les éleveurs ont relancé les débats sur l’ajustement du niveau de protection du loup ainsi que l’accompagnement des éleveurs. En réponse aux eurodéputés qui ont voté une résolution (2022/2952) y afférent, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a, dans une communication du 20 décembre dernier, soumis aux États membres, au terme d’une collecte approfondie de données, un projet de décision visant à modifier, le cas échéant, le statut de protection du loup au sein de l’UE, à savoir un déclassement au statut espèce “protégée” plutôt que “strictement protégée” tel que prévu par la Convention de Berne.
Des chiffres en hausse
L’avis poursuit trois objectifs : proposer un ajustement des textes à l’état de conservation de l’espèce, mieux accompagner les éleveurs et enfin promouvoir une vraie coordination européenne, et notamment sur les modes de comptage encore très hétérogènes.
"Il ne s’agit pas de revenir sur le principe même de protection du loup mais d’en ajuster les modalités car faute d’un soutien apporté aux éleveurs nous courrons le risque de voir décliner l’agropastoralisme et des abattages illégaux de cette espèce protégée", relève Pascale Boyer. "Il faut se féliciter que les mesures de protection des loups aient rempli leur objectif mais le dynamisme géo-démographique de leur population entraîne des conflits croissants avec les activités humaines en particulier les activités agropastorales, mais également les activités de tourisme", appuie-t-elle.
L’effectif estimé du nombre de loups à la sortie de l’hiver 2022-2023 est de 1.104 individus présents dans 55 départements. En cinq ans la population lupine a donc plus que doublé (430 en 2018). Côté prédation des troupeaux, on tient le loup pour responsable de la mort de 65.500 bêtes chaque année en Europe. Et l’Italie, l’Espagne et la France sont les trois pays les plus touchés par les attaques (entre 10.000 et 14.000 bêtes tuées chaque année en moyenne).
Muscler les financements
"C’est donc un appel qui est lancé au soutien des éleveurs car indépendamment du changement de statut de protection du loup, il est absolument essentiel d’améliorer le quotidien des éleveurs", argumente Pascale Boyer, soulignant "les difficultés croissantes auxquelles ils doivent faire face quotidiennement". Le triptyque "clôture, chiens de protection et gardiennage des troupeaux" doit donc rester la pierre angulaire de l’accompagnement des éleveurs.
L’avis invite également à financer des expérimentations, notamment via des nouvelles technologies, et à limiter au maximum le reste à charge des éleveurs tout en simplifiant les démarches administratives pour le financement des moyens de protection et les indemnisations des pertes. Les programmes LIFE consacrés à la coexistence avec le loup doivent par ailleurs être "intensifiés et évalués". L’avis appelle enfin, à "repenser les sources de financement des équipements de protection, en mobilisant davantage des fonds nationaux et européens dédiés à la biodiversité et à sa préservation".
Pour rappel, les avis politiques sont des textes de portée politique qui engagent la commission des affaires européennes seule et non l'Assemblée dans son ensemble comme les résolutions européennes.
Un nouveau plan Loup qui ne convainc pas
La nouvelle mouture du plan loup "2024-2029"- mise en consultation publique en novembre dernier (voir notre article ci-dessous) - a donné lieu à des tirs croisés des défenseurs du prédateur et des éleveurs. Aucun des camps n’est satisfait… Sa présentation au Groupe national loup (GNL) par la préfète coordonnatrice, Fabienne Buccio, en septembre a d’ailleurs provoqué l’ire des défenseurs du prédateur, sans guère davantage satisfaire les éleveurs, qui espéraient des ambitions rehaussées au regard des 12.000 bêtes attaquées en 2022. Et dans la foulée, les six associations de défense de l'environnement représentées au sein de cette instance consultative avaient annoncé leur retrait, indignées par le contenu "déséquilibré" du futur plan, et par les points d’engagement de l’Etat concernant la modification du statut du loup et son déclassement d’espèce strictement protégée.