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Elus locaux - Décentralisation : l'AMF détaille ses attentes

Le document a des allures de résolution générale de Congrès des maires. La prochaine édition de ce Congrès, la 95e, s'ouvrira d'ailleurs dans trois semaines. Il s'agit en fait d'une "contribution" de l'Association des maires de France (AMF), adoptée par son Comité directeur, au "nouvel acte de décentralisation". Une façon, notamment, de se positionner par rapport aux propos présidentiels du 5 octobre dernier. Une façon, peut-être aussi, de ne pas prendre de retard dans le ballet des prises de position des différentes associations d'élus, sachant que les autres ont déjà tenu leurs congrès respectifs et qu'une partie d'entre elles – ARF, ADF et, ce mardi 30 octobre, les représentants des grandes villes et agglomérations (voir ci-contre notre article de ce jour) - ont de surcroît été reçues à l'Elysée.
En préambule à ce document de huit pages détaillant "sa vision de la décentralisation", l'AMF tient à mettre l'accent sur quelques grands principes : "libre administration locale, interdiction de toute tutelle d'une collectivité territoriale sur l'autre, subsidiarité, droit à l'initiative, droit à l'expérimentation et péréquation en privilégiant la logique des blocs de compétences". Et à résumer ce qui doit à ses yeux être l'objectif de toute réforme en matière de décentralisation : "Améliorer, clarifier et simplifier ce qui peut l'être, au profit d'une efficacité accrue de l'action publique." "Ce qui peut l'être"… une façon peut-être de se démarquer des visions parfois réductrices qui - surtout depuis les préambules de la réforme territoriale de 2010 - ont largement jalonné les débats et ont par exemple laissé croire qu'il serait un jour possible de résoudre la question des compétences par un joli tableau supprimant toute interférence entre niveaux de collectivités...
Dans le détail, l'AMF s'intéresse en premier lieu aux relations entre Etat et collectivités, précisant notamment ses attentes concernant le futur Haut Conseil des territoires : que celui-ci rassemble "les trois grandes associations nationales de collectivités" (autrement dit que seules l'AMF, l'ADF et l'ARF y siègent…), qu'il soit doté d'un secrétariat permanent, se réunisse au moins une fois par an en formation plénière sous la présidence du Premier ministre, comprenne une formation restreinte et des groupes de travail thématiques, qu'il soit associé à l'ensemble des politiques "emportant des conséquences sur les collectivités" et à "la mise en place d'échanges de données entre l'Etat et les collectivités"…
Les maires vont plus loin en insistant sur "la nécessité d'une concertation bilatérale Etat-collectivités sur tous les grands sujets, avant même de saisir les organes de concertation plus ouverts à la société civile", arguant que "les collectivités ne sont pas des partenaires comme les autres". Ainsi par exemple, sur le chantier "refondation de l'école", il aurait été préférable de commencer par consulter les élus locaux avant d'élargir la concertation…
Sur le rôle même de l'Etat, l'AMF écrit notamment : l'Etat "a vocation à intervenir partout sur le territoire national mais doit également continuer de cibler son intervention vers les territoires ou collectivités en difficulté". Et demande à ce titre une clarification des dispositifs d'intervention prioritaire et de contractualisation.

Assouplir le principe d'exclusivité

Sur les relations entre niveaux de collectivités, l'AMF souligne évidemment la nécessité de maintenir la clause de compétence générale pour les communes – même si ce maintien a rarement été remis en question -, avec une jolie formulation à la clef : "la commune reste l'un des derniers lieux de synthèse". Elle souhaite de même une "meilleure mise en œuvre" du principe de subsidiarité.
Dans les relations de la commune avec le département et la région, l'AMF dit reconnaître "que le territoire régional, et dans certains cas départemental, constitue un périmètre pertinent pour coordonner l'intervention publique dans des domaines particuliers" et estime "indispensable de constituer des instances de collaboration avec tous les niveaux de collectivités". Elle est en revanche contre tout schéma régional ou départemental qui serait prescriptif et réaffirme que "l'attribution éventuelle d'un pouvoir réglementaire [à la région] ne doit pas aller à l'encontre du principe de non tutelle d'une collectivité sur l'autre".
Autre grand volet abordé, bien sûr : l'intercommunalité. Là-dessus, on connaît la plupart des positions de l'AMF (en résumé : l'AMF "soutient sans ambiguïté et avec détermination le développement de l'intercommunalité" mais "l'intercommunalité doit rester le prolongement des communes). Mais on voit aussi, à travers ce document, que certaines affirmations plus nouvelles se font jour. On retiendra notamment trois affirmations : "l'éventuelle attribution de nouvelles compétences aux EPCI doit être volontaire et non pas imposée par la loi" ; il faudrait assouplir le principe d'exclusivité "afin que certaines compétences communautaires puissent faire l'objet d'un exercice conjoint avec les communes membres dans le cadre d'un accord" ; "les très grandes métropoles de dimension européenne doivent pouvoir adopter un statut particulier".

Reconnaissance des spécificités des grandes métropoles

Suivent les questions électorales. L'AMF attend bien une loi "dès le premier trimestre 2013 sur les modalités de désignation des élus municipaux et intercommunaux" et redemande un abaissement du seuil de population pour le scrutin de liste. Si elle s'oppose pour le moment à un "bouleversement du mode de scrutin intercommunal", une petite ouverture semble s'esquisser : "Il semble indispensable à l'AMF de consolider préalablement l'intercommunalité avant d'envisager éventuellement d'aller plus loin dans l'introduction du suffrage universel direct." Un début d'ouverture suivi d'un autre : "Une réflexion sur une organisation spécifique pour les grandes métropoles de taille européenne doit être menée."
Le chapitre finances locales est également abordé par le document. Certains principes et vœux y sont rappelés : autonomie fiscale, poursuite du chantier de la révision des valeurs locatives, réévaluation de la réforme de la taxe professionnelle, évaluation du Fonds de péréquation des ressources communales et intercommunales (Fpic)…
Un autre point, enfin, retiendra l'attention : se penchant sur le statut de l'élu, l'AMF demande que "soient accordées de plein droit pour le maire l'indemnité maximale de fonction ainsi que le bénéfice, là encore de plein droit, d'une retraite complémentaire obligatoire", alors que cette disposition ne s'applique aujourd'hui qu'aux maires des communes de moins de mille habitants tandis que pour toutes les autres, c'est le conseil municipal qui détermine le montant de l'indemnité attribuée au maire. Et l'association d'expliquer, alors qu'une limitation du cumul des mandats est censée se profiler : "Le cumul de fonctions et donc d'indemnités (dans le respect du plafond fixé par la loi) permet à de nombreux élus de pouvoir se consacrer à l'exercice de leurs mandats en cessant temporairement leur activité professionnelle. Restreindre considérablement les possibilités de cumul nécessitera de revoir les conditions d'exercice des mandats locaux et en particulier le montant des indemnités versées aux élus communaux et intercommunaux."

 

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