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Innovation - De Lisbonne à Margaux : la route est encore longue

Alors que, selon une note du Centre d'analyse stratégique, la France peine à atteindre les objectifs de Lisbonne, les premiers Entretiens de Margaux, sorte de "Davos de l'innovation" co-organisés par la région Aquitaine et Oséo, ont débouché sur une table de "dix commandements".

 

En 2000, les pays de l'Union se réunissaient à Lisbonne pour arrêter une stratégie d'innovation. Objectif : faire de l'Europe "l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde" à  l'horizon 2010. Sept ans plus tard et à un peu plus de deux ans de l'échéance, les résultats tardent à venir. Symbole de cette stratégie, l'objectif d'une dépense en recherche et développement de 3% du PIB n'est que rarement atteint. "Seules la Finlande et la Suède dépassent pour l'heure" ce seuil, indique le Centre d'analyse stratégique (CAS), dans un ouvrage présenté jeudi 27 septembre ("La stratégie de Lisbonne : une voie européenne dans la mondialisation"). Danemark, Allemagne et Autriche affichent une nette progression depuis 2000 et se rapprochent du but. Pour le reste, on est encore loin du compte, certains pays même, dont la Grande-Bretagne et la France, ont vu leurs dépenses baisser.
En matière de déficits publics, en revanche, la plupart ont pris le pli : 22 pays dont la France respectent aujourd'hui le seuil des 3% du PIB. Plus surprenant, onze pays dégagent même des excédents (Irlande, Belgique, Bulgarie, Lettonie, Luxembourg, Espagne, Finlande, Danemark, Pays-Bas, Suède et Estonie). Italie, Hongrie, Pologne et Slovaquie ont au contraire vu leur situation se dégrader.
En matière de croissance, 15 pays ont un taux supérieur à 3% du PIB sur la période 2002-2006. "Il s'agit de l'ensemble des nouveaux pays adhérents (dynamique de rattrapage) sauf Malte, l'Irlande, la Grèce, l'Espagne et le Luxembourg", précisent les auteurs de l'ouvrage, Yves Bertoncini et Vanessa Wisnia-Weill.

 

"Davos de l'innovation"

S'ils se refusent à établir un palmarès des bons élèves, force est de constater les succès des pays du Nord de l'Europe (Danemark, Finlande et Suède) et de l'Autriche, sur l'ensemble des critères retenus. Ces écarts de situation conduisent aux choix des politiques nationales : chaque pays est en effet libre des moyens à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs de Lisbonne. "Dans certains pays, la stratégie de Lisbonne présente un horizon beaucoup plus présent qu'en France, notamment en Espagne où elle constitue un outil de pilotage avec des concertations très larges organisées dans le cadre des autonomies", souligne Yves Bertoncini. Il reste encore une chance de corriger le tir. L'Europe doit réviser ses lignes directrices en mars 2008 au moment du Conseil européen de printemps. Les Etats membres devront ensuite élaborer un programme national de réforme (PNR) pour octobre 2008. Ce double rendez-vous est d'autant plus important, insiste le CAS, que la France amorce "un nouveau cycle présidentiel et parlementaire propice à la mise en œuvre de réformes économiques et sociales" et qu'elle est "appelée à assumer la présidence de l'Union européenne au cours du second semestre de l'année 2008". Les régions ne comptent pas rester en retrait. L'Aquitaine annonce la couleur avec ses Entretiens de Margaux organisés avec Oséo, la banque publique d'aide aux PME. Cette première édition du "Davos de l'innovation" s'est conclue, jeudi 27 septembre, sur une table de "dix commandements" adressée au président de la République. Parmi ces propositions, on retrouve l'idée d'un Small Business Act et l'idée selon laquelle la région est "l'échelon de pertinence" pour les aides à l'innovation.

 

Michel Tendil


Les dix commandements de Margaux

1 : Promouvoir la mise en réseau, le partenariat, l'association d'entreprises et la mobilité des acteurs.
2 : L'échelon de pertinence des acteurs de l'innovation doit être la proximité régionale couplée à des réseaux élargis.
3 : Intégrer le triple résultat (économique, social, environnemental) dans les gouvernances territoriales et dans les passations de marchés ainsi que dans la gestion des entreprises.
4 : Privilégier l'approche par système dans l'enseignement et dans le management.
5 : Raisonner mondialement et promouvoir des écosystèmes compétitifs.
6 : Simplifier et accélérer les processus d'accompagnement de l'innovation.
7 : Jouer collectif : solidarité et responsabilité indispensables des acteurs dans la chaîne de l'innovation.
8 : Mettre en place des outils et des critères d'évaluation des hommes, des procédures et des structures, cohérents avec les objectifs.
9 : Revisiter le droit de la propriété industrielle à la lumière des exigences du développement durable.
10 : Mettre en place un droit de l'expérimentation afin de sortir des cadres contraignants (marchés publics, Code du travail).