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Cour des comptes : les collectivités devront faire "des efforts de maîtrise de leurs dépenses"

Dans le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques qu'elle a présenté ce 7 juillet, la Cour des comptes estime que les collectivités ne peuvent être exonérées d'une contribution au redressement des finances publiques. L'institution évoque les pistes qui pourraient être envisagées pour organiser cette contribution, dont un retour des contrats de Cahors.

Après deux années de crise sanitaire qui ont fortement dégradé les finances publiques, la Cour des comptes estime que les collectivités devront fournir "des efforts de maîtrise de leurs dépenses et, plus globalement, (...) une contribution au redressement des finances publiques". C'est le plaidoyer qu'elle développe dans le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques que le Premier président, Pierre Moscovici a présenté ce 7 juillet à la presse.

Alors que l'entourage du candidat Emmanuel Macron a évoqué en mars la nécessité pour le secteur public local de dégager une économie de 10 milliards d'euros, la Cour ne fixe aucun montant précis. Toutefois, elle dessine plusieurs pistes dont le gouvernement pourra se servir pour préparer le projet de loi de programmation des finances publiques, qui doit fixer la trajectoire des finances publiques et notamment des finances locales, pour la période 2023-2027. Le projet de loi sera présenté à l'automne.

Encadrer les finances locales

La Cour n'écarte pas la reconduction du dispositif de maîtrise des dépenses des grandes collectivités et intercommunalités ("contrats dits de Cahors"). Par le passé, les magistrats ont dressé un inventaire des défauts dont souffrait celui-ci. Mais aujourd'hui, ils reconnaissent qu'il a permis de réaliser 5 milliards d'euros d'économies au cours des deux années (2018 et 2019) où il a été opérationnel (le montant a été estimé par la direction générale des collectivités locales). Dans le cadre du dispositif, un encadrement de l'évolution de la masse salariale des collectivités locales pourrait être envisagé, suggère la Cour. Mais l'institution juge que le retour de l’inflation "ne rend pas aisé le suivi d’indicateurs d’évolution de la dépense des collectivités locales". C'est pourquoi, elle propose d'autres pistes, comme "la fixation d'un plafond d'endettement", ou "le recours à un critère fondé sur l’autofinancement". Cette dernière idée pourrait convenir par exemple à l'association France urbaine, qui préconise, si la contractualisation financière entre l'Etat et les collectivités devait être relancée, que soit déterminé "un niveau plancher d'autofinancement". La solution permettrait de préserver la libre administration des collectivités locales, comme le reconnaît la Cour. Qui pointe cependant un risque : en cas de progression des recettes, les dépenses pourraient accélérer.

La Cour évoque d'autres pistes beaucoup moins favorables aux collectivités locales, telles que "la réduction programmée dans le temps de certaines recettes de fiscalité ou de transferts de l’État, en fonction des situations d’excédents structurels constatés". Un scénario qui n'est pas sans rappeler la baisse des dotations de l'Etat que les collectivités ont connue entre 2013 et 2017.

Quel que soit le choix fait par l'exécutif, il faudra que celui-ci engage "une concertation approfondie avec les associations représentatives des collectivités", souligne la Cour.

Mettre la masse salariale sous surveillance

L'institution juge par ailleurs nécessaire "une réflexion d’ensemble sur le financement des collectivités locales". "Complexifié et rendue illisible par les réformes successives", celle-ci "pourrait s’inscrire dans le cadre de la prochaine loi de programmation des finances publiques". La Cour propose encore un "réexamen de la répartition des compétences entre administrations publiques". Objectif : "réduire les doublons d’intervention (dans le domaine économique, par exemple)" et "assurer, par une spécialisation accrue des différents niveaux d’administrations, une plus grande cohérence et lisibilité des politiques publiques". "Une telle réflexion devrait prévoir également une rationalisation de l’organisation territoriale de l’État comme des collectivités locales", écrit la Cour.

Alors que le gouvernement prévoit de supprimer la redevance audiovisuelle et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), la Rue Cambon appelle à "préserver les recettes" pour ne pas fragiliser par trop les finances publiques. "Une baisse de certains prélèvements imposerait soit d’en accroître d’autres, soit de réaliser un effort supplémentaire d’économies", écrit-elle.

Pour maîtriser l'évolution de la dépense publique, les pouvoirs publics auraient intérêt, selon la Cour, à surveiller la masse salariale. L'institution pointe du doigt l'évolution entre 1996 et 2020 de 47% des effectifs de la fonction publique territoriale - neutralisation faite des transferts des personnels de l'Etat liés à la décentralisation - alors que la population n'a augmenté que de 13% sur la période. La Cour préconise la détermination dans la prochaine loi de programmation des finances publiques d'un "objectif d’évolution de la masse salariale global, pluriannuel et documenté". Cet objectif exprimé en milliards d'euros serait décliné en "sous-objectifs selon les différentes catégories d’administrations publiques" (Etat, collectivités, organismes de sécurité sociale)

Le gouvernement tiendra-t-il sa prévision de déficit public de 5% fin 2022 ? La Cour des comptes pointe les "nombreux aléas" pesant sur cette prévision.

Confirmée dans le projet de budget rectificatif (PLFR) que le gouvernement a présenté jeudi après-midi, la cible de 5% de déficit public "reste entachée de multiples incertitudes" liées à "la situation sanitaire et géopolitique", juge la Cour des comptes dans son rapport annuel sur la situation et les perspectives des finances publiques.

Au-delà des conséquences de la guerre en Ukraine et de l'évolution de la pandémie sur les finances publiques, difficiles à quantifier, la Cour s'alarme de l'impact financier du collectif budgétaire, riche en dépenses nouvelles. Les mesures dégainées par l'exécutif pour soutenir le pouvoir d'achat, auxquelles s'ajoute le plan de résilience annoncé mi-mars, "vont venir détériorer le déficit 2022 par rapport au scénario de la LFI (loi de finances initiale, NDLR)", anticipe-t-elle ainsi.

Selon le projet de budget rectificatif que la Cour cite dans son rapport, les dépenses publiques devraient gonfler de près de 60 milliards d'euros par rapport à celles envisagées dans la LFI. Un surcoût attribuable en premier lieu à la forte inflation (+5,8% sur un an en juin selon l'Insee), qui devrait alourdir de près de 18 milliards d'euros la charge de la dette de l'État.

Avec la hausse du point d'indice des agents territoriaux au 1er juillet, le renchérissement du prix des matières premières, la revalorisation du RSA et une éventuelle accélération de l'investissement local, les dépenses publiques locales pourraient de leur côté dépasser de 4,6 milliards d'euros la prévision fixée par la LFI pour 2022.

Heureusement pour l'État, les recettes devraient augmenter presque autant que les dépenses, avec une hausse attendue de 57 milliards d'euros par rapport à la LFI.

T. B.

 

 

 

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