Consigne : entre réemploi et recyclage, le Cese plaide pour une "troisième voie"
Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a adopté ce 13 novembre, en présence de la secrétaire d'État Brune Poirson, une résolution qui appuie l'instauration d'une consigne. Mais alors que dans le cadre de l'examen au Parlement du projet de loi sur l'économie circulaire, le débat oppose le Sénat, les collectivités et les recycleurs au gouvernement et aux industriels sur la question du recyclage, le Cese se prononce pour une "troisième voie", couplant le cadrage de la consigne pour recyclage et la mise en place systématique de la consigne pour réemploi.
En plein débat sur la consigne, dans le cadre de l'examen au Parlement du projet de loi anti-gaspillage et pour une économie circulaire, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a adopté ce 13 novembre par 138 voix pour, 1 voix contre et 28 abstentions une résolution intitulée "La valeur de la matière première secondaire : l'exemple de la consigne". Le sujet divise aujourd'hui fortement les différentes parties prenantes. Dans son intitulé initial, le projet de loi défendait la mise en place d'un dispositif de consigne pour recyclage et pour réemploi des emballages. Mais le Sénat, sensible aux arguments des collectivités territoriales, a rejeté la consigne pour recyclage lors de l'examen du texte en première lecture en septembre, ne retenant que la consigne pour réemploi. La consigne pour recyclage concerne notamment les bouteilles plastiques. Le principe est de les collecter pour ensuite les recycler comme matière première pour refabriquer du plastique. La collecte pour réemploi, elle, s'applique principalement aux bouteilles de verre, qui sont lavées et remplies à nouveau. Alors que l'Union européenne a fixé un objectif européen de 90% de bouteilles plastiques collectées en 2029, le taux de collecte en France est aujourd'hui de moins de 60%.
"Encadrer toutes les formes de consigne"
Le Cese estime que, "parce qu'elle donne une 'valeur' aux emballages, la consigne est un outil de la REP (responsabilité élargie du producteur) qui peut favoriser un changement de comportement chez les consommateurs". Aussi préconise-t-il de "développer et encadrer toutes les formes de consignes pour augmenter le taux de tri des bouteilles en verre et en plastique ainsi que des canettes et atteindre les objectifs européens". Mais il veut dépasser le débat entre partisans et opposants du recyclage en se prononçant pour une "troisième voie" pour encadrer le principe de retour de la matière plastique pour recyclage et prioriser le financement des dispositifs de réemploi pour le verre. "En effet, soutient-il, la seule mise en place de la consigne pour recyclage risque de maintenir le modèle actuel d’utilisation des contenants plastique à usage unique ; c’est pourquoi il s’agit de coupler le cadrage de la consigne pour recyclage et la mise en place systématique de la consigne pour réemploi."
Concernant les flux financiers impactant les collectivités et les consommateurs, le Cese recommande la réalisation d’une étude d’impact afin, entre autres, d’estimer les conséquences de la mise en place du retour matière ou de la consigne pour recyclage plastique pour les collectivités, d’estimer et compenser les sommes de la déconsignation non réclamées par les consommateurs et encaissées par les producteurs de boissons et d’intégrer le financement du réemploi et de la recherche des alternatives au tout jetable par l’éco-organisme. À côté de la consigne, la résolution demande aussi que la France se fixe un cadre "pour élaborer un programme de fin de production et d'utilisation du plastique à usage unique issu du pétrole et du plastique non recyclable". Sinon, "aucun système ne sera valable", a déclaré la rapporteure Anne de Béthencourt.
Brune Poirson favorable à la "consigne mixte"
Brune Poirson, qui a assisté à la présentation de la résolution, s'est prononcée en faveur du système mixte combinant consigne pour recyclage et consigne pour réemploi. "Nous avons les moyens de faire de la consigne pour recyclage une locomotive pour le réemploi", a déclaré la secrétaire d'État auprès de la ministre de la Transition écologique. "C'est pour ça qu'il me semble essentiel d'inscrire dans la loi le principe de la consigne mixte", a-t-elle ajouté, estimant que la "consigne mixte" est "la solution".
"Le moyen de financer le mouvement vers une société libérée du plastique à usage unique issu des énergies fossiles, c'est la consigne pour recyclage qui devra financer la consigne pour réemploi", a souligné Brune Poirson. "Nous voulons que (...) la bouteille en plastique - pour ne pas la nommer - finance l'installation d'un dispositif mixte qui favorisera le développement d'initiatives volontaires de consigne pour réemploi sur les territoires", a-t-elle expliqué. Elle a assuré vouloir sortir "du pour ou du contre" sur la consigne, en indiquant que "la concertation continue en ce moment avec différents groupes de travail techniques pilotés par l'Ademe". Deux réunions de concertation se sont tenues le 12 novembre avec des associations d'élus, des organisations professionnelles et des ONG, en présence des ministres Élisabeth Borne et Sébastien Lecornu et de Brune Poirson. "Ces entretiens ont permis d'échanger sur l'objectif de réintroduire une consigne pour réemploi en France ainsi que de disposer d'un système de collecte des emballages en plastique jetables qui permette d'atteindre les objectifs de l'Union européenne, selon un communiqué du gouvernement. À cette occasion, les ministres ont tenu à réaffirmer le rôle central des collectivités locales dans le service public de gestion des déchets." Une nouvelle réunion est programmée le 25 novembre, alors que l'examen du projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire est prévu le 26 en première lecture par la commission du développement durable et de l'aménagement durable de l'Assemblée nationale puis en séance publique les semaines du 9 et 16 décembre.