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Congrès des maires – Les mobilités décarbonées déclinées sur tous les modes

Investissements attendus dans les infrastructures ferroviaires, tarification unique, intermodalité, desserte des territoires ruraux, véhicules électriques, politiques cyclables … : le forum d'échanges sur les déplacements organisé ce 22 novembre en ouverture du Congrès des maires a passé en revue les grands sujets de préoccupation des élus en matière de déplacements durables. Le ministre chargé des Transports, Clément Beaune, a annoncé à cette occasion que le gouvernement présenterait prochainement un plan sur le covoiturage.

"Collectivités et gouvernement, nous sommes dans le même bateau : nous devons aller vers des mobilités moins dépendantes des énergies fossiles alors que les transports du quotidien appellent des investissements de très long terme et qu'un gros décalage existe entre les préoccupations de nos concitoyens et le retard que nous avons pris", a résumé Frédéric Cuillerier, maire de Saint-Ay (Loiret) et co-président de la commission transports et mobilités de l'Association des maires de France (AMF) face au ministre chargé des Transports, Clément Beaune. Invité du forum d'échanges sur les déplacements ce 22 novembre, en ouverture du Congrès des maires, Clément Beaune a affirmé être le représentant d'un "ministère d'élus" qui se veut "ouvert aux solutions de mobilité portées dans les territoires".
Dans l'attente du rapport du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) il a affirmé que la priorité dans les années à venir devait aller au ferroviaire, "colonne vertébrale de la mobilité verte", selon la formule d'Elisabeth Borne, qui l'a précédé au ministère des Transports. S'il faut aller plus loin dans les investissements consacrés à ce mode de transport, pour remédier au vieillissement du réseau, la transition écologique concerne bien "tous les modes", "chacun à leur manière", a souligné le ministre. Ainsi, dès lors que la voiture représente 85% des déplacements quotidiens, la route doit également contribuer à la transition. "Il n'y a pas de contradiction entre le soutien à la mobilité électrique et le développement du ferroviaire", a-t-il martelé. Mais "si l'on remet de l'argent dans les infrastructures, il ne faut pas négliger les usages", d'autant que "lorsqu'on entreprend des travaux, on dégrade la situation". D'où la nécessité selon lui de promouvoir des solutions innovantes sur tous les territoires, qu'il s'agisse du billet unique qui permettrait, comme l'a fait l'Allemagne en quelques mois, de "comparer les tarifications" et de "simplifier le recours au transport public", du covoiturage – le gouvernement annoncera un plan en ce sens "dans les trois semaines à venir", a-t-il annoncé -, des navettes autonomes, "y compris dans les zones rurales", et de l'intermodalité, qui dispose d'"un énorme potentiel de progression".

Spécificités des territoires ruraux

Beaucoup de chemin reste en tout cas à parcourir, comme l'ont montré plusieurs élus de territoires ruraux. Maire de Decize, une commune de 5.000 habitants dans la Nièvre, Justine Guyot a témoigné du fait que dans son département, le ferroviaire était "une catastrophe", avec 2h45 pour faire le trajet Nevers-Paris - et des retards voire des annulations de trains "une fois sur deux" – et 2h30 pour parcourir 200 km sur la ligne Nevers-Dijon. Sa collectivité a pris l'initiative de mettre en place une navette gratuite de transport urbain, pour faciliter notamment les déplacements des personnes âgées et des jeunes. Ce mode de transport totalise 40.000 passages par an mais coûte 200.000 euros à la commune et "faute d'aide publique supplémentaire, nous risquons de devoir la supprimer", a prévenu l'élue. Elle se dit aussi préoccupée par les problèmes de mobilité des jeunes. S'il est souvent difficile selon elle de se repérer parmi la multiplicité des aides au permis de conduire, il faudrait aussi prévoir de rendre accessible l'acquisition d'un premier véhicule, faute de quoi les jeunes continueront à déserter les territoires ruraux comme le sien. Jean Girardon, maire de Mont-Saint-Vincent (Saône-et-Loire) estime pour sa part qu'il faudrait en priorité "inventorier les territoires éligibles au chemin de fer et ceux qui ne le sont pas" et prévoir un bouquet de solutions pour "satisfaire le maximum de besoins avec les mobilités décarbonées" face à une demande qui augmente et change de nature. "Avec la désertification médicale en milieu rural, on va se faire soigner de plus en plus loin, il faut donc prévoir des transports adaptés", illustre-t-il.

Enjeux énergétiques

Les mobilités décarbonées supposent aussi d'anticiper les besoins en énergie sur les territoires. C'est ce qu'a fait la Vendée à travers son syndicat départemental d'énergie et d'équipement (Sydev). "Nous travaillons depuis 2014 sur l'électromobilité, à travers le déploiement de bornes de recharge pour les véhicules et le maillage du territoire avec des stations de biogaz, pour aller chercher le transport de marchandises, a témoigné son président, Laurent Favreau, qui est aussi maire de la commune de Venansault. Nous avons aussi développé une usine de production d'hydrogène vert en bord d'océan. Si l'on y ajoute les parcs éoliens, le photovoltaïque et les méthaniseurs agricoles, nous pouvons proposer aux collectivités, à la population et aux professionnels tout un mix énergétique au plus près de leurs besoins et disposer de la maîtrise d'œuvre de ce maillage territorial. De cette façon, nous sommes déjà aux 10% souhaités par le gouvernement, avec l'objectif d'atteindre 20% en 2030." Olivier Dehaese, maire d'Acigné (Ille-et-Vilaine) a pour sa part présidé le schéma directeur d'infrastructures de recharge de véhicules électriques à l'échelle de son département et noué il y a un an une convention de partenariat avec le Cerema et Enedis. Objectif : "positionner les bornes pour avoir les bonnes puissances aux bons endroits" et "aller vers l'équilibre du territoire" en proposant aussi aux opérateurs privés qui ont tendance à aller dans les endroits les plus rentables une charte pour qu'ils s'insèrent dans le dispositif. L'élu mise ainsi sur "une montée en charge forte avec 240-260 bornes déjà installées, 800 en 2025 et 1.300-1.400 en 2030".

Développer le vélo partout

Autre mode de mobilité décarbonée dont l'usage a littéralement explosé dans les grands centres urbains avec la crise sanitaire : le vélo. "Il a répondu aux besoins d'individualisation des moyens de transport et 80% des pistes provisoires ont été pérennisées", a souligné Françoise Rossignol, maire de Dainville (Pas-de-Calais), vice-présidente en charge de la mobilité de la communauté urbaine d'Arras et présidente du Club des villes et territoires cyclables et marchables. La flambée des coûts de l'énergie favorise aussi le vélo comme "mode de transport pas cher, durable et vertueux", souligne-t-elle. Pour le développer, il faut selon la maire "poser la question des transports en commun, de l'intermodalité, de la cohabitation des usages, d'un nouveau partage de l'espace public" et "donner la juste place à la hiérarchie piétons-vélos-transports en commun et voiture".
"Les déplacements cibles pour le vélo sont ceux entre 1 et 7 km et sur créneau, son potentiel de développement est aussi important dans les grandes villes que dans les petites villes et en milieu rural", assure Nicolas Mercat, maire du Bourget-du-Lac et premier vice-président de Vélo & Territoires. Le linéaire cyclable à aménager aujourd'hui est évalué à 100.000 km. "Pour faire une bonne politique cyclable, il faut 30 euros par an et par habitant et nous en sommes aujourd'hui à 15, a détaillé Nicolas Mercat. Il faut mettre 20 euros dans les infrastructures et le reste dans les services et les politiques d'accompagnement." Il faudrait aussi selon lui doubler le nombre de personnes travaillant sur ces sujets dans les collectivités, qui sont aujourd'hui plus de 1.000. L'enjeu est donc d'aider tout particulièrement les petites collectivités s'impliquant dans le vélo, qui disposent de marges de manœuvre financières moins importantes que les plus grandes, estime Françoise Rossignol. "Nous avons insisté auprès du ministre pour que les 250 millions d'euros du plan vélo soient plutôt orientés vers les collectivités rurales", a abondé Frédéric Cuillerier. Le coprésident de la commission transports, mobilité, voirie de l'AMF a aussi relevé la nécessité de lever des "points bloquants" tels que la question de la création de parkings ou de pistes cyclables "pour faire en sorte que ces infrastructures échappent à l'artificialisation brute" et sur la difficulté du foncier en milieu rural pour pourvoir faire, comme en Allemagne, "des chemins ruraux mixtes, vélo et activités agricoles".   

 

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