Congrès des maires – Finances locales : les communes pourront-elles maintenir les services publics locaux ?

Lors du débat du congrès de l'AMF consacré aux finances, ce 23 novembre, les maires ont sonné l'alarme. Les contraintes financières de leurs communes font, selon eux, peser une menace sur les services publics locaux. Ils en ont appelé à un soutien financier plus vigoureux de l'État. Le ministre délégué aux Comptes publics a, lui, souligné le "dynamisme" de la fiscalité locale. 

Le débat était "difficile", a avoué le ministre délégué chargé des comptes publics, Thomas Cazenave, à l'issue de la table-ronde du Congrès des maires de France consacrée ce 23 novembre aux finances locales. Pour cause, il venait d'entendre plusieurs élus témoigner des grandes difficultés qu'ils rencontrent à boucler leurs budgets. "La situation n'a jamais été aussi dégradée dans ma commune", s'est ainsi alarmé Dominique Amiard, maire de Cures (Sarthe, 480 habitants). "Je suis dans l'incapacité de couvrir les frais de fonctionnement et il n'est plus question de dégager de l'autofinancement", s'est désespéré l'élu. "On est mis sous perfusion", a déploré un élu de la commune de Boisseuil (Haute-Vienne), appelant l'État à donner aux communes "les moyens" pour répondre aux demandes formulées par les citoyens.

"Point de rupture"

"Nous sommes à un point de rupture", a estimé pour sa part Charlotte Libert-Albanel, maire de Vincennes. "Faisons-nous comme nous le souhaiterions au risque d'endetter les collectivités, ou réduisons-nous la voilure des services publics locaux ? Il faudra choisir", a-t-elle prévenu. Pour diminuer les coûts tout en maintenant le niveau du service public, la ville du Val-de-Marne a fait "une relecture approfondie" de ses politiques publiques. À la clé : une réduction de 800 à 700 du nombre des agents. Mais la démarche trouve ses limites : "Il arrive un moment où le grain [à moudre] n'est plus là."

André Laignel, premier vice-président délégué de l'Association des maires de France (AMF), a pointé la responsabilité du gouvernement dans les difficultés budgétaires des collectivités. Selon lui, la loi de finances pour 2024 qui a été votée en première lecture à l'Assemblée nationale est, pour les collectivités, "la plus mauvaise de ces quarante dernières années". Si à 108 milliards d'euros, le montant des transferts financiers de l'État aux collectivités pour 2024 semble quasiment stable, il ne l'est pas, en fait, quand on prend en compte l'indice des dépenses communales – l'équivalent pour les communes de l'indice des prix à la consommation calculé par l'Insee. Pour 2023, la Banque postale estime que sa hausse s'établirait à 6%. Par extrapolation, le maire d'Issoudun évalue que les transferts financiers de l'État aux collectivités se réduiront de 7 milliards d'euros en 2024, en euros constants.

"Ressources fiscales très dynamiques"

Certaines communes connaissent des difficultés budgétaires, a concédé Thomas Cazenave. Mais, globalement, la situation financière des collectivités "résiste bien", s'est félicité le ministre, en écartant la demande exprimée par l'AMF d'une indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l'inflation. "Dans la situation qui est la nôtre" (avec un déficit public à "5%"), "on ne peut pas répondre à toutes les demandes", a-t-il lancé.

Toutefois, les communes qui ont souscrit des contrats de fourniture d'électricité à des prix "exorbitants" et qui ont bénéficié de l'amortisseur électricité, continueront à en bénéficier en 2024, a indiqué Thomas Cazenave. Un bon point pour André Laignel, l'élu jugeant que l'amortisseur est un dispositif "utile" pour "des milliers de communes et des centaines d'intercommunalités".

Les communes disposent de ressources fiscales "très dynamiques", a souligné le ministre. L'an prochain, les bases de la fiscalité foncière seront en effet revalorisées de "4,5%", un niveau qui sera nettement supérieur à l'inflation attendue ("autour de 2,5%"). Les députés de la majorité "se sont battus" contre des groupes de l'opposition qui voulaient ralentir le rythme d'évolution des bases de la fiscalité foncière, a rappelé Thomas Cazenave. Mais Charly Varin, maire de Percy-en Normandie (Manche), a relativisé. Dans sa commune, les bases foncières représentent "seulement 42% des recettes". Leur revalorisation n'est donc "pas l'alpha et l'oméga".

Refonte de la DGF

Le constat selon lequel la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) est devenue "incompréhensible", a, lui, fait consensus, tant du côté du gouvernement que de celui des élus. L'annonce mercredi soir par le président de la République d'un travail de refonte de la DGF a donc été bien accueillie. On notera que les maires ont d'ores et déjà jugé que, pour réussir, ce chantier devrait s'accompagner d'une "croissance de l'enveloppe globale" de la dotation.

Autre signe que l'exécutif peut parfois s'accorder avec les élus locaux sur les finances locales – en tout cas sur les principes – Thomas Cazenave a estimé que la subsistance d'un lien fiscal local uniquement avec les propriétaires (par la taxe sur le foncier bâti) n'était "pas satisfaisante à moyen et long terme" et imposait une "réflexion".

Les débats sur la DGF et la fiscalité locale devraient devenir centraux avec la préparation de la réforme de la décentralisation annoncée par Emmanuel Macron.

 

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