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Compétence sport : les paradoxes des grandes villes et métropoles

Dans une enquête menée auprès de grandes villes, agglomérations et métropoles, France urbaine dresse un portrait de la compétence sport dans ces collectivités. Où l'on s'aperçoit que les tiraillements entre acteurs territoriaux restent vivaces. 

Le sport dans les grandes villes, agglomérations et métropoles : quelle ambition ? quel fonctionnement ? quels moyens ? France urbaine répond à ces questions dans une enquête menée auprès d'une quarantaine de collectivités publiée le 23 juin. À plusieurs titres, les réponses apparaissent paradoxales.
Les moyens d'abord. Une majorité de répondants mentionnent une "légère hausse" du budget sport ces dernières années. La dépense moyenne par habitant s’élève à 68,71 euros. Avec de fortes différences selon le type de collectivité. Les grandes villes portent un budget moyen pour le sport de 95 euros par habitant. La palme revient à Nice. 208,70 euros par habitant. 72 millions d’euros pour le sport en 2019. 10,8% du budget de la collectivité. Les communautés urbaines et d'agglomération affichent 41,57 euros. Les métropoles 37,17 euros. Plus la taille augmente, moins on consacre au sport. 
À quoi servent ces subventions ? D'abord aux dépenses de fonctionnement. Frais de personnel, entretien des équipements, aides aux associations. Ces dernières sont de plus en plus ventilées sous conditions. Entre la collectivité et les associations, c'est désormais "donnant, donnant". Les dépenses d’investissement sont deux à trois fois moins importantes.

Commune-centre contre intercommunalité

L'étude répond à la question : le sport aujourd'hui, quel objet politique ? Le temps est loin où "le sport n’était qu’une question d’équipements et d’infrastructures". Les décideurs le regardent désormais comme "un vecteur important d’attractivité pour leurs territoires, de bien-être, de santé et de cohésion sociale ".
Ce constat conduit à un premier paradoxe. On observe "une mutualisation de plus en plus perceptible des services sports de la ville-centre et de la métropole". La métropole a désormais la compétence de gestion des équipements sportifs structurants. Pourtant, le sport reste encore "largement de compétence municipale". Il représente un enjeu "important et stratégique, qui met au contact de nombreux administrés et c’est sans doute ce lien de proximité que les élus urbains veulent conserver".
Le paradoxe grandit. On apprend qu’"il n’existe pas de lien entre la compétence intercommunale et les moyens effectivement mobilisés". La métropole de Saint-Étienne a consacré en 2019 plus de 8 millions d’euros aux politiques sportives sans avoir la compétence sport. L'étude pose la question-clé : "Vers une compétence sport obligatoire dans les métropoles ?" La réponse arrive en deux temps. "Les politiques publiques sportives ont toute légitimité à passer à l’échelle métropolitaine dans les grands centres urbains", estiment plusieurs collectivités. Ce qui ne tranche pas le débat. "La concertation, l’échange, la diffusion des bonnes pratiques, la mise en œuvre de projets communs sont nécessaires, au nom de l’équilibre territorial", pense une majorité Ce qui est déjà largement répandu.

Métropoles contre régions et départements

Finalement, que se cache-t-il derrière cette étude de France urbaine ? L'ambition – à peine voilée – de mettre en avant le rôle que grandes villes et métropoles veulent jouer dans la future gouvernance du sport. Celle issue de la création de l'Agence nationale du sport (ANS) en avril 2019. 
Les élus des grandes villes et métropoles sont favorables aux conférences régionales du sport, déclinaisons territoriales de l'ANS. À condition que les collectivités y jouent un rôle prépondérant. Les communes surtout, "principaux investisseurs/propriétaires/acteurs de la politique sportive de proximité". Quant à la conférence des financeurs, outil de décision territorialisé, elle "pourra s’établir sur un périmètre départemental et/ou métropolitain".
France urbaine va plus loin. Ne s'embarrasse plus de nuances. Parmi les "principaux enseignements" de son enquête : "Le couple intercommunalité/région s’impose dans la gouvernance souhaitée des futures politiques sportives." Notamment pour des raisons financières : "Les grandes villes, intercommunalités et métropoles sont de puissants pourvoyeurs de financements publics, au service des politiques sportives dans les territoires." Et tout en se gardant de "vouloir inutilement établir de concurrence entre échelons d’administration territoriale", France urbaine enfonce le clou : "Face à de nouvelles régions au périmètre parfois critiqué parce que trop large (les fameuses 'régions XXL'), les agglomérations urbaines apparaissent comme des structures de proximité en capacité de faire vivre une subsidiarité intelligente, ajustée aux besoins des habitants." Entre métropoles, régions et départements, le match est lancé.