Compensation de la hausse du RSA : le CNEN réservé sur deux projets de décrets

Réuni le 17 avril 2023, le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) a confirmé l’avis défavorable à deux projets de décrets qu’il avait déjà formulé le 6 avril de façon provisoire. L’un des décrets porte sur la revalorisation du revenu de solidarité active (RSA) applicable au 1er avril 2023, l’autre sur l’expérimentation "Territoires zéro non-recours".

Le RSA a été revalorisé de 5,6% au 1er avril 2023 par rapport à avril 2022, dont 4% de hausse appliquée dès le 1er juillet 2022, dans le cadre des mesures exceptionnelles votées l’été dernier (voir notre article du 25 juillet 2022). Dans sa délibération du 6 avril 2023, alors qu’il avait été saisi le jour-même, le CNEN précise qu’il est bien favorable à la revalorisation du RSA, mesure jugée nécessaire dans le contexte actuel, mais qu’il "regrette à nouveau le manque de concertation préalable des représentants des élus, notamment des départements". L’absence de concertation voire d’information préalable aux revalorisations est "habituelle", pour l’association Départements de France, qui explique à Localtis que les départements aimeraient au moins disposer d’une telle information au moment de préparer leurs budgets.

L’aspect financier est sans surprise le deuxième motif de réserve du CNEN, qui alertait le 6 avril le gouvernement sur "la progression continue des 'restes à charge'" et "la soutenabilité de la situation financière de certains départements". Au titre de 2022, la compensation par l’État de cette revalorisation a été de 240 millions d’euros, alors que Départements de France estime entre 350 et 400 millions d’euros le coût induit pour les départements. Par ailleurs, l’ensemble des revalorisations et primes actées en 2021 et 2022 – dont le Ségur de la santé, l’avenant 43 pour l’aide à domicile et la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires – représenterait une charge supplémentaire annuelle de 1,5 milliard d’euros pour les départements, anticipe l’association d’élus sur la base d’une enquête. Certes, le nombre de bénéficiaires du RSA diminue et les recettes sont actuellement dynamiques, mais les départements restent prudents (voir notre article du 21 février 2023). Désormais dans l’incapacité de lever l’impôt, ils font valoir qu’ils n’auront pas de marge de manœuvre en cas de retournement de conjoncture. 

Sur le projet de décret, relatif à la mise en œuvre de l’expérimentation "Territoires zéro non-recours", l’avis défavorable du CNEN est lié aux incertitudes quant à une éventuelle généralisation, à terme, de la démarche visant, comme son nom l’indique, à éradiquer le non-recours aux prestations. Pour Départements de France, absorber 30% de bénéficiaires de RSA en plus, qui sont aujourd’hui dans le non-recours, serait "intenable budgétairement" pour les départements.