Clément Pernot (président du département du Jura) : "Le Tour de France en septembre va être extraordinaire"
Le Tour de France cycliste aura finalement lieu du 29 août au 20 septembre 2020, a annoncé le 15 avril Amaury sport organisation (ASO), la société organisatrice. Clément Pernot, président du conseil départemental du Jura et référent Tour de France à l'Assemblée des départements des France (ADF), revient pour Localtis sur cette annonce et ses conséquences pour les collectivités.
Localtis - Quels échanges avez-vous eus avec ASO depuis le début de la crise sanitaire due au Covid-19 ?
Clément Pernot - J'ai une relation privilégiée avec Christian Prudhomme, le directeur du Tour de France. Nous nous voyons régulièrement dans l'année et nous échangeons, en dehors des périodes de crise, sur tous les sujets habituels. La crise du Covid-19 nous a amenés à échanger encore bien plus, d'autant que la commune de Champagnole, dont j'ai été maire et où je réside, accueillera l'arrivée de la 19e étape, reportée au 18 septembre. Les premières annonces concernant le sort du Tour de France ont été celles, dans des conditions un peu bizarroïdes, de la ministre des Sports qui a évoqué un huis clos, option dont nous avions déjà discuté avec Christian Prudhomme [le directeur du Tour s'est opposé à la tenue de la course à huis clos, ndlr]. Lorsque toutes les classiques du printemps ont été reportées, à commencer par Paris-Roubaix, c'est moi qui ai pris l'initiative d'échanger avec lui pour lui remonter le moral.
Comment avez-vous été averti du report du Tour 2020 ?
Nous avons suivi l'actualité en fonction des discours du président de la République. Nous avons bien compris que ça allait être compliqué de tenir les dates initialement prévues, avec un grand départ de Nice le 27 juin. Je commençais à être interrogé par la presse locale et c'est encore moi qui ai sollicité Christian Prudhomme sur la question du report. Nous avons donc évoqué la tenue du Tour de France au mois d'août. Puis le discours présidentiel du 13 avril a mis fin à cette hypothèse, car pour avoir le Tour en août, nous spéculions sur le fait que le Critérium du Dauphiné [qui sert traditionnellement de course de préparation pour le Tour de France, ndrl] pourrait se tenir au mois de juillet. Juste avant le discours du président de la République, Christian Prudhomme m'a rappelé pour me dire qu'il était en pourparlers avec l'Union cycliste internationale pour discuter de nouvelles dates portant sur la période de septembre.
Durant toute cette période, quels échanges avez-vous entretenus avec les autres présidents de conseils départementaux concernés cette année par le passage du Tour ?
Je ne me suis pas substitué au travail de Christian Prudhomme. Il fait ça de manière très révérencieuse. Il sait que les collectivités locales, les maires des communes de départ et d'arrivée et les présidents de département en particulier, l'accueillent et il a consulté chacun de ses interlocuteurs. ASO maintient en permanence un contact avec les collectivités, a fortiori en situation de crise. Au niveau des présidents de conseils départementaux, on fait contre mauvaise fortune bon cœur. Il est clair que tout le monde aurait souhaité que le Tour ait lieu en juillet, mais si nous avons la chance qu'il se tienne en septembre, je peux vous assurer que ce sera un soulagement pour tout le monde.
Chaque année, les agents des départements produisent un important travail pour permettre le bon déroulement de la course. Le report va-t-il leur poser un problème d'organisation ?
Techniquement, ce report ne pose aucun souci. Sur mon territoire, les routes avaient été revues bien avant que le Covid-19 arrive. Dès que nous avions eu confirmation que la course passerait bien chez nous [fin 2019, ndlr], nos équipes sont allées vérifier l'itinéraire pour analyser les manquements et refaire les routes de la meilleure des manières. Tout ce qui était nécessaire pour favoriser le bon passage de la course était dans les tuyaux depuis longtemps. Là où nous avons un souci, c'est avec l'animation. Ce qui est intéressant avec la réception du Tour de France est que vous mobilisez une bonne partie de votre population pour proposer différentes animations, différents décors mis en œuvre par les foyers ruraux notamment. Sur ce point, nous avons tout mis sur pause en attendant de savoir si le Tour pourra réellement avoir lieu. Ceci étant, nous aurons forcément un mois et demi devant nous pour réagir, et avec ce mois et demi nous devrions être à la hauteur de l'événement.
Un Tour de France en septembre, au moment où la France devrait se remettre au travail, peut-il entraîner une désaffectation du public et, partant, de moindres retombées économiques sur les territoires traversés ?
Nous serons dans le début du déconfinement cet été. Qui va travailler cet été ? Qui va prendre ses congés ? Je n'en sais fichtrement rien. On peut partir du principe qu'en septembre la population locale se déplacera en grand nombre, peut-être en plus grand nombre qu'elle ne l'aurait fait s'il n'y avait pas eu cette tragédie, dans la mesure où le Tour sera le premier spectacle sportif de haut niveau proposé après l'annulation de toutes les grandes manifestations. Nous pensons donc bénéficier d'un effet très positif en termes de spectateurs. Car je pense qu'il y aura aussi une population qui va se déplacer pour le Tour, comme de tradition. Nous retrouverons les camping-cars, ceux qui vont sur les étapes continueront d'y aller, je ne vois pas de blocage. Je pense qu'en termes de retombées, cela va être assez extraordinaire. Ce sera certainement le seul événement mondial de l'année 2020, le premier événement de l'après-confinement pour l'Europe. Dans l'histoire du Tour de France, l'édition 2020 aura un caractère plus que spécial. On peut se retrouver dans une configuration très positive.
En quoi consistera votre travail sur ce dossier dans les semaines à venir ?
Je vais voir avec ASO comment mettre en place toute la dynamique collégiale nécessaire pour bien profiter de tout ce que je viens de vous dire, de tous les éléments positifs. Le Tour de France, c'est l'anti-coronavirus. Au lieu du confinement, de la solitude et de la tristesse, vous avez le bonheur, la joie, les sourires.