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Clap de fin pour les classes immersives en langues régionales ?

Par une décision récente, le Dasen des Pyrénées-Atlantiques a refusé l'ouverture d'une classe immersive en langue basque dans une école publique. Une décision qui s'appuie sur la loi pour une école de la confiance de 2019. Pour les promoteurs des langues régionales, au contraire, la loi prévoit un droit à expérimentation spécifique.

C'est l'une des conséquences inattendues de la loi pour une école de la confiance de juillet 2019. Le Dasen (directeur académique des services de l'Éducation nationale) des Pyrénées-Atlantiques a refusé l'ouverture d'une classe immersive en basque dans une école publique de Saint-Pierre-d'Irube. Et annoncé la fin de toute nouvelle expérimentation.
Depuis 2008, l'Office public de la langue basque (OPLB) – groupement d'intérêt public comprenant des représentants de l'État, de la région Nouvelle-Aquitaine, du département des Pyrénées-Atlantiques et de la communauté d'agglomération Pays basque – a mis en place, par convention avec l'Éducation nationale, une expérimentation pour produire des locuteurs basques "complets" dans les écoles maternelles publiques du territoire. Dix-huit sections immersives publiques ont été ouvertes, complétées par vingt sections dans l'enseignement catholique. Cela a également permis un "saut qualitatif", selon Bernadette Soulé, directrice de l'OPLB.
Le 5 juin 2020, le maire de Saint-Pierre-d'Irube a sollicité auprès du Dasen l'ouverture d'une classe immersive en basque dans une école de sa commune. Dans un courrier du 10 juillet que Localtis s'est procuré, le Dasen annonce qu'il donne une "suite défavorable" à cette demande. Et avance deux arguments. D'une part, l'instruction est obligatoire dès l'âge de trois ans depuis l'adoption de la loi pour une école de la confiance. D'autre part, "la Constitution de 1958 prévoit en son article 2 que l'instruction obligatoire est dispensée en français, 'langue de la République'".
Ce dernier argument est contesté. Si aux termes de l'article 2 de la Constitution le français est bien "la langue de la République", il n'est pas fait mention de l'instruction obligatoire en français.

Une expérimentation inscrite dans la loi

Avec ce refus, un arrêt est donné à toute nouvelle expérimentation de nature immersive dans l'enseignement public. Pour le basque, précurseur en la matière, mais aussi pour toutes les langues régionales qui auraient pu suivre son exemple. 
Dans un communiqué, Max Brisson, sénateur des Pyrénées-Atlantiques et rapporteur du projet de loi pour une école de la confiance, "réfute […] l’argumentation utilisée et rappelle qu’à [son] initiative, le Parlement a inscrit dans la loi les langues régionales comme un des enseignements pouvant donner lieu à expérimentation, donc à sortir du droit commun et du cadre horaire habituellement utilisé, ce qui est bien le cas de l’enseignement par immersion". 
Les partisans de l'immersion regrettent d'autant plus son arrêt qu'elle donne de bons résultats. Lors de l'assemblée générale de l'OPLB du 2 juillet 2020, le Dasen a communiqué les conclusions des dernières évaluations réalisées auprès des élèves de CP. Elles montrent que les élèves ayant suivi un enseignement immersif à 100% en basque en maternelle avaient de meilleurs résultats en français que les élèves ayant suivi une classe à 100% en français selon la plupart des critères retenus. 
L'OPLB a sollicité une audience auprès du ministre de l'Éducation nationale pour demander une révision de la décision du Dasen mais aussi pour renouveler sa demande de prise en compte de l’enseignement bilingue dans la réforme du lycée et de différentes autres problématiques liées à l’enseignement bilingue (formation et recrutement des enseignants, etc.).