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Finances locales - Christian Eckert minimise l'impact de la baisse des dotations et voit l'investissement redémarrer

Devant la commission des finances du Sénat, le secrétaire d'Etat au Budget est revenu le 15 juin sur les comptes des collectivités en 2015. Une nouvelle occasion pour lui d'affirmer que la baisse des dotations de l'Etat a des effets relativement limités sur les finances locales et d'affirmer que l'investissement du secteur va entamer sa reprise. Avec, au passage, des précisions intéressantes sur la progression des recettes fiscales des collectivités.

Depuis plusieurs mois, le secrétaire d'Etat au budget tente de minimiser l'impact de la baisse des dotations de l'Etat sur les budgets locaux et répète que les collectivités ont la capacité d'absorber le choc, notamment par l'importance et le dynamisme de leurs recettes de fonctionnement. Pour Christian Eckert, le bilan de l'exécution des finances locales en 2015 confirme ce qu'il avançait jusqu'à présent. Malgré la baisse de 3,67 milliards d'euros des dotations de l'Etat l'an dernier, les collectivités ont en effet vu leurs recettes réelles de fonctionnement progresser de 1,73%.
Auditionné le 15 juin par la commission des finances du Sénat sur ce bilan, le secrétaire d'Etat au Budget a apporté des précisions sur le sujet. La progression des recettes réelles de fonctionnement du secteur public local s'est élevée en 2015 à 1,7% pour les communes et à 2,8% pour les intercommunalités, tandis que pour les départements et les régions elle a atteint respectivement 1,3% et 2%, a-t-il dit.

Dynamisme des bases fiscales

Cette croissance des recettes ne résulte que partiellement des hausses de taux, a-t-il souligné. Elle provient en effet en partie de la progression de recettes fiscales dont les élus locaux ne peuvent pas faire varier les taux, pour l'essentiel la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et les droits de mutation à titre onéreux (DMTO). L'an dernier, la première a connu une croissance de son produit de 4,5%, tandis que les seconds ont grimpé de 16%. Au passage, Christian Eckert a précisé que le produit des DMTO a encore progressé de 13% durant les premiers mois de 2016.
Il a précisé aussi que le produit supplémentaire de la taxe d'habitation, de la taxe foncière (sur les propriétés bâties et non bâties) et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) a progressé l'an dernier de 2,6 milliards d'euros et que les hausses de taux ont été responsables seulement du quart de ce résultat (726 millions d'euros). La croissance du produit des impôts directs locaux résulte pour moitié de la variation physique des bases – les nouvelles constructions par exemple – et pour un dernier quart de la revalorisation forfaitaire annuelle décidée par le Parlement, a complété le secrétaire d'Etat au Budget.
Pour lui, il apparaît donc clairement que le dynamisme des recettes locales ne résulte pas d'abord de décisions sur les taux. Christian Eckert a d'ailleurs comparé l'évolution des taux du secteur communal en 2015 avec celle de 2009, seconde année du mandat municipal précédent. Il en ressort que six ans auparavant, la croissance des taux de la taxe d'habitation et de la taxe foncière a été trois fois supérieure.

1.600 communes en difficulté financière

La progression des recettes de fonctionnement n'a pas été neutralisée par celle des dépenses de fonctionnement (+1,67%), s'est par ailleurs félicité le locataire de Bercy. Les élus locaux sont parvenus à freiner la hausse de ces dépenses à +1,67%, alors qu'en 2014, elles avaient crû à un rythme de 2,53%. L'inflation quasi-nulle et la réduction des prix de l'énergie ont contribué à cette évolution. Mais aussi la réduction de la croissance des charges de personnels, lesquelles n'ont progressé que de 1,9%, contre une hausse de 4,1% en 2014.
Dans ce contexte, le nombre des collectivités locales inscrites dans le réseau d'alerte des finances locales n'a connu qu'"une légère hausse" entre 2014 et 2015. A la fin de l'année dernière, 1.600 communes faisaient partie du réseau. Par ailleurs, la capacité d'autofinancement des collectivités locales s'est globalement améliorée (+2,1%).
Le secrétaire d'Etat a reconnu toutefois que cette capacité d'autofinancement a baissé pour les départements (-1,8%) et les régions (-2,1%). "Si la section de fonctionnement se porte globalement mieux, l'investissement a poursuivi sa diminution", a également concédé le secrétaire d'Etat. Après avoir dévissé de 7,8% (hors remboursements d'emprunts) en 2014, l'investissement public local a encore reculé de 8,8% l'an dernier. "Cette baisse est plus marquée que pour les cycles électoraux antérieurs, c'est indéniable", a-t-il dit.
Mais pour l'ancien rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, la baisse des dotations n'explique pas tout. La réforme territoriale a selon lui généré des incertitudes et celles-ci ont été renforcées par le "climat excessivement catastrophiste" créé par "certaines associations d'élus locaux" sur l'impact de la baisse des dotations. La "hausse inédite" de 15% des dépôts des collectivités sur le compte du Trésor – de 30,6 à 35,1 milliards d'euros entre 2014 et 2015 – serait "le signe de cet attentisme sur l'investissement local".

2016, année de la reprise de l'investissement local ?

Toutefois, avec la progression des recettes de fonctionnement en 2015, "les conditions sont aujourd'hui réunies pour une relance de l'investissement local", a conclu Christian Eckert. Et celui-ci de souligner que les annonces que le président de la République a faites en clôture du congrès des maires de France – notamment la réduction de moitié de la baisse des dotations des communes et intercommunalités et la poursuite du fonds de soutien à l'investissement local, celui-ci étant abondé de 200 millions d'euros supplémentaires – vont faciliter cette reprise.
Pour le sénateur socialiste Claude Raynal, il y a "sans doute" des "signaux" d'un redémarrage de l'investissement local, qui pourtant "n'est pas extraordinaire". En sachant que les élus locaux privilégieraient des investissements qui génèrent pas ou peu de dépenses de fonctionnement, comme la voirie et l'entretien du patrimoine. Les sénateurs de droite ont été quant à eux sceptiques sur une reprise de l'investissement. Face à l'optimisme de Christian Eckert, ils ont souligné la grande hétérogénéité des situations, notamment du fait des variations qu'enregistrent les territoires en matière de recettes de CVAE et de DMTO. De telles différences doivent conduire le Parlement à améliorer la territorialisation de la CVAE, a estimé Claude Raynal, rappelant par exemple que l'Ile-de-France tire de cet impôt des recettes supérieures à son poids dans le PIB.

Thomas Beurey / Projets publics

Moody's mise sur un rebond de l'investissement communal
Après le geste de François Hollande annoncé au congrès des maires, les investissements des communes devraient rebondir de 5% l'an prochain, a indiqué le 9 juin l'agence de notation Mooody's.
Selon les calculs de l'agence d'évaluation financière, la décision présidentielle va "faciliter un rebond de l'investissement en 2017 dans le secteur municipal" et va les aider "à maintenir leur niveau modéré d'endettement".
"Du fait des baisses de dotation moins élevées, nous prévoyons que l'investissement du secteur municipal atteindra 32 milliards d'euros en 2017, soit une augmentation de 5% par rapport à notre prévision pour 2016", précise Moody's.
L'agence a de ce fait revu à la baisse, à 10 milliards d'euros, les montants que les communes emprunteront l'an prochain.
Source AFP