Banque des Territoires et future agence des territoires : vers une "collaboration étroite"
La future Agence nationale de la cohésion des territoires va défendre "l'innovation locale", a assuré son préfigurateur, Serge Morvan, le 6 juin, à l'occasion du Printemps des territoires.
Plan Action cœur de ville, Territoires d’industrie – qui tiendront leur journée nationale le 12 juin – et, prochainement, plan en faveur des petits "pôles de centralité"… l’exécutif assure qu’un "changement de méthode" en matière d’aménagement du territoire est amorcé. "On n’est plus dans les appels à projets, on est dans les appels à manifestation d’intérêt", a déclaré Serge Morvan, le commissaire général à l’égalité des territoires (CGET), jeudi 6 juin, à l’occasion du "Printemps des Territoires", organisé par la Banque des Territoires pour fêter son premier anniversaire. Une façon un brin techno de dire qu’à travers ces trois politiques publiques, les services et agences de l’Etat accompagnent les projets des collectivités sans imposer leur choix. Au CGET, "on est assez forts pour expliquer au porteur de projet pourquoi son projet n’est pas bon., pourquoi le nôtre est meilleur", a expliqué l’ancien préfet des Yvelines, avant de le reconnaître : "L’innovation n’est pas forcément notre spécialité." Et de voir comme symbole de ce changement l’avènement de la future Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) dont il est le préfigurateur et dont la proposition de loi achèvera son parcours parlementaire le 1er juillet. L’ANCT, qui absorbera le CGET et se veut un "guichet unique" pour les élus en matière d’ingénierie, "n’est pas un gadget, ce n’est pas pour faire moderne", a martelé Serge Morvan. Pourtant, les débats parlementaires se sont cristallisés autour des relations entre l’Etat et les collectivités, notamment dans sa gouvernance, sachant que les représentants de l’Etat seront bien majoritaires au conseil d’administration de l'agence.
Millesoins sur le plateau des Millevaches
Pour son intervention, Serge Morvan aurait dû se faire accompagner de l’économiste Olivier Bouba-Olga qui n’a pas pu être présent. Lui-même avait estimé au mois de mars que cette logique d’AMI rompait avec la "course à l'armement" mortifère que se livrent les territoires. C’est non loin de ses terres poitevines (Olivier Bouba-Olga est professeur à l’université de Poitiers) que Serge Morvan est allé puiser un exemple de projet innovant : le réseau "Millesoins" sur le plateau des Millevaches. Un de ces déserts médicaux qui a peut-être trouvé la recette pour se rendre attractif auprès des jeunes médecins : une maison de santé virtuelle qui permet de connecter les villes entre elles et l’ensemble des professionnels de la santé (médecins, pharmaciens, kinés…) qui y exercent. "Il faut que demain, ce soit un programme que l’ANCT puisse faire aboutir", a promis le commissaire. "C’est cette force d’innovation locale qui, aujourd’hui, nous manque, et dont nous aurons à mettre en place des projets concrets (...) C’est sur ce sujet que nous serons jugés, que nous donnerons de l’espoir, sinon, nous aurons malheureusement à subir l’échec ; les mouvements qui depuis plusieurs mois sont à l’œuvre dans le pays traduisent une demande de participation aux décisions", a-t-il déclaré. Alors qu’un mouvement de grève s’est emparé des urgences dans tout le pays, on ne saurait mieux dire.
La ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault, est elle aussi venue défendre ce projet d'agence lancé par son prédécesseur Jacques Mézard. "Il ne s’agit pas d’aller concurrencer ce qui existe dans les territoires", a-t-elle insisté. En revanche, "il faut que l’Etat soit capable d’envoyer immédiatement des renforts" et de répondre à "l’événementiel", c'est-à-dire des crises comme les inondations de l’Aude à l'automne 2018. Une mission de "veille et d’alerte" a d'ailleurs été ajoutée au texte instituant l'agence. "On sera vraiment dans une collaboration très étroite avec cette agence", a pour sa part assuré Eric Lombard, le directeur général de la Caisse des Dépôts. Cette coopération sera inscrite dans les statuts de l’agence puisque la Banque des Territoires sera présente dans son conseil d’administration et participera à son comité d’orientation nationale.
Une "trajectoire 5.0" pour l’outre-mer
Zéro carbone, zéro déchet, zéro vulnérabilité au dérèglement climatique, zéro intrant polluant, zéro exclusion : la ministre des Outre-mer Annick Girardin a déroulé, jeudi 6 juin, le contenu de sa stratégie de développement durable pour les territoires ultramarins. Cette stratégie dévoilée début avril sera accompagnée d’un "label" qui "va venir sous peu", a-t-elle indiqué, l’occasion du Printemps des territoires organisé par la Banque des Territoires. Il s'agit de décliner en cinq points les 17 critères de développement durable de la Cop21. "On ne peut pas faire du copier-coller de la plupart de nos politiques publiques", a déclaré la ministre, répondant ainsi à Saïd Omar-Oili, maire de Dzaoudzi-Labattoir (Mayotte) et président de l’Association des maires de Mayotte. "Nous devons trouver des solutions d’aménagement qui nous correspondent (…) Nous sommes uniques et la solution doit être unique", a insisté l’édile, soulignant l’urgence de la situation de Mayotte dont "44% de la population a moins de 15 ans" qui fait face à une immigration massive (en provenance des Comores et depuis peu du Sri Lanka) et dont "la population a doublé dans les vingt ans et va doubler dans les 20 ans à venir". Le jour même à l’Assemblée, Christophe Castaner a annoncé la reconduite à la frontière de 12 migrants sri-lankais. "C'est un message politique que nous devons faire passer (...) Il n'y a pas de destination Mayotte pour une immigration irrégulière organisée par des passeurs", a déclaré le ministre de l'Intérieur.