Archives

Territoires - Artificialisation des sols : un nouvel outil de suivi opérationnel dans trois ans

Le ralentissement de l'artificialisation des sols observé depuis 2008 est davantage lié aux effets de la crise qu'aux nouveaux instruments mis en place, estime l'Observatoire national de la consommation des espaces agricoles, dans son premier rapport.

Entre 2000 et 2012, le grignotage des espaces naturels, agricoles et forestiers a été de 40.000 à 90.000 hectares par an. C'est ce qui ressort du premier rapport de l'Observatoire de la consommation des espaces agricoles (Oncea) remis au ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, le 15 mai. Une fourchette large qui s'explique par l'imprécision des données actuelles. Afin d'avoir une vision plus précise du problème, le ministre souhaite se doter d'un nouvel outil de suivi et de calcul qui sera disponible sur tout le territoire "d'ici trois ans", indique le ministère dans un communiqué. Cet outil pourrait s'appuyer sur les travaux engagés par l'IGN qui a été chargé de constituer une base de données d'occupation du sol à grande échelle, en partenariat avec les collectivités territoriales.
Dans l'attente de cet outil, l'Oncea, qui a été installé l'an dernier, a travaillé sur trois sources de données disponibles : l'enquête Teruti-Lucas du ministère de l'Agriculture, qui mesure l'occupation des sols cultivés, la base de données de la Fédération nationale des Safer (sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural) sur les changements de vocation agricole des terres et, enfin, la statistique agricole annuelle du ministère de l'Agriculture sur l'évolution des surfaces réellement exploitées.

Ralentissement à partir de 2008

Le croisement de ces données a permis à l'Oncea de dégager une césure en 2008. Ainsi, la consommation des terres agricoles a été particulièrement soutenue entre 2000 et 2008 avant de ralentir assez nettement.
D'après les données des Safer, les "surfaces susceptibles d'urbanisation future" ont augmenté de 76.803 à 99.095 hectares entre 2000 et 2007 avant de diminuer à partir de 2008 pour atteindre 68.819 hectares en 2012. "Ces chiffres donnent une estimation de l'étalement urbain potentiel", précise l'observatoire, mais pas de la consommation réelle des terres car "ils ne donnent pas d'information sur les transferts réels au sein des parcelles qui ne changent pas de propriétaire".
Les données de Teruti-Lucas aboutissent à peu près même constat. Celui d'une forte érosion des terres entre 2006 et 2008, au rythme de 113.900 hectares par an avant un ralentissement, avec 41.500 hectares de terres cultivées de moins chaque année, entre 2010 et 2012. Inversement, les terres "artificialisées" du fait de l'urbanisation (bâtis, infrastructures, jardins…) ont progressé de 422 milliers d'hectares entre 2008 et 2012 ! A titre de comparaison, c'est bien plus que la superficie d'un département comme le Vaucluse (356.700 hectares) fortement touché par l'artificialisation.
Après des années de laisser-faire, des voix s'élèvent depuis quelques années pour tenter d'enrayer le phénomène. "Qui n'a pas remarqué, de-ci de-là, de nouveaux ronds-points, de nouveaux parkings provoquant petit à petit et par touches successives, une hausse globale de l'artificialisation et de l'imperméabilisation des sols ?", s'insurge la présidente de l'Oncea, Fanny Dombre Coste, en préambule au rapport.

Infléchissement de l'activité économique

Mais le changement de tendance de 2008 est-il lié à cette prise de conscience ? Rien n'est moins sûr pour l'observatoire qui l'explique surtout par les effets de la crise. "Il est très probable que la réduction du rythme de consommation constatée récemment soit imputable à un infléchissement de l'activité économique" et à son impact sur la construction, estime l'Oncea. Selon ce dernier, il est encore trop tôt pour évaluer l'impact réel des prescriptions du Grenelle de l'environnement qui a imposé des objectifs de limitation de la consommation des terres dans les Scot et PLU, ou celles de la loi de modernisation de l'agriculture du 27 juillet 2010 qui a créé l'Oncea, ainsi que les commissions départementales de la consommation des espaces agricoles (CDCEA). Cette loi se fixait comme objectif de réduire de moitié le rythme de consommation des terres agricoles d'ici 2020.
Quant à Stéphane Le Foll, il place ses espoirs dans les nouvelles dispositions de la loi Alur (Accès au logement et un urbanisme rénové) et celles de la future loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, toujours en débat au Parlement. La loi Alur vise à concilier la construction de logements avec la maîtrise de l'urbanisation. Ce qui passe par la préservation des terres. Elle prévoit notamment qu'en l'absence de document d'urbanisme, en dehors des parties urbanisées, les aménagements devront être soumis à l'avis conforme de la commission départementale de consommation des espaces agricoles (article 140). Le projet de loi d'avenir, lui, fixe des objectifs de consommation économe et de lutte contre l'étalement urbain dans les Scot. Il étend l'avis conforme des commissions départementales lorsqu'une appellation d'origine protégée est fortement touchée par un projet d'aménagement. Il renforce par ailleurs le rôle des Safer.

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis