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Etat-civil - Apostrophe interdite dans les prénoms : la circulaire de 2014 pourrait être réexaminée

La maire de Rennes, Nathalie Appéré, va demander la modification d'une circulaire de 2014 qui interdit la transcription dans l'état-civil de certains signes, comme le tilde ou l'apostrophe, a-t-on appris mardi 23 janvier.
Cette démarche a été suscitée par le refus, en août dernier, de l'état-civil de la ville d'enregistrer sous l'identité choisie un nouveau-né que les parents souhaitaient prénommer Derc'hen. En effet, la circulaire de 2014 (voir ci-dessous notre article de 2014) interdit les apostrophes dans les prénoms, ainsi que l'a rappelé le procureur à la mairie, selon cette dernière. Les parents se sont donc finalement résolus à inscrire leur enfant sous l'orthographe Derchen, sans apostrophe. Or, le c'h en breton a une prononciation proche de la jota espagnole, sans rapport avec la prononciation de son orthographe francisée.
La circulaire, en date du 23 juillet 2014, liste un certain nombre de signes, comme les accents, la cédille ou le tréma, pouvant être utilisés dans l'état-civil. Certains autres signes, partie intégrante pour certains de la langue bretonne, ne sont plus autorisés au nom du respect de la langue française. Il s'agit notamment du tilde, très fréquent également en espagnol, par exemple. Ce problème pourrait ressurgir pour d'autres prénoms mais aussi pour les nombreux noms de famille bretons comportant une apostrophe, comme Guivarc'h ou Le Cléac'h.
"L'unité de la République n'est pas mise en danger à cause d'un tilde ou d'une apostrophe (...) mais le procureur a rappelé la circulaire de 2014 pour faire savoir que l'enfant ne pouvait pas être enregistré à l'état-civil avec un prénom comportant une apostrophe", a expliqué lors d'un point-presse Marc Hervé, adjoint au maire. "Il faut donc faire évoluer le droit pour que nos agents à l'état-civil puissent enregistrer de tels prénoms", a-t-il poursuivi. Une circulaire n'est pas une loi et peut donc être plus facilement modifiée, a-t-il expliqué.
Une vingtaine de députés de la majorité ont déjà demandé au ministère de la Justice de revoir la circulaire. Cette dernière est notamment contestée depuis le printemps dernier, en raison du refus d'enregistrer à l'état-civil un bébé que ses parents souhaitaient appeler Fañch, avec un tilde. Cette affaire devrait être jugée en appel dans le courant de l'année.
L'interdiction de l'apostrophe dans les prénoms pose un "risque de rupture d'égalité", a reconnu le lendemain le procureur de Rennes, Nicolas Jacquet.
Le procureur général de Rennes, Jean-François Thony, a en outre annoncé qu'il allait "procéder, de manière précise et détaillée, à un nouvel examen de cette situation juridique, en lien avec l'administration centrale", dans un communiqué publié mercredi. Le refus d'enregistrer le prénom "Derc'hen" avec une apostrophe "résulte d'une application exacte" de la circulaire, rappelle le parquet général.
"Nous avons parfaitement conscience avec Monsieur le procureur général de l'enjeu qui s'attache à l'acceptation ou non de l'apostrophe", a expliqué à l'AFP Nicolas Jacquet. "Il y a là un risque de rupture d'égalité entre ceux qui bénéficient d'ores et déjà d'une apostrophe dans leur état civil et ceux qui feraient l'objet d'une application stricte de la circulaire de 2014", a-t-il noté. "Cette situation justifie que cette question soit réévaluée avec le ministère de la Justice."
D'après des données en accès libre de la mairie, au moins quatre prénoms avec une apostrophe ont été acceptés par la ville de Rennes depuis 2014. En France, 3.188 prénoms contenant une apostrophe ont été donnés en France de 1900 à 2015, et plus d'une cinquantaine par an depuis 1999, un chiffre en augmentation. Au-delà de la Bretagne, cette circulaire a aussi par exemple empêché une habitante du pays basque, Alexandra Ibañez, 33 ans, de léguer le tilde de son nom de famille à son fils.

 

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