Territoires intelligents - Aix-Marseille-Provence : les élus métropolitains invités à s'engager sur le terrain du numérique
Chargées d'imaginer les conditions d'une transition numérique réussie pour le compte de la métropole Aix-Marseille-Provence (AMP), la Caisse des Dépôts et la mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence ont présenté leurs conclusions le 25 février dernier à l'occasion des "rencontres pour l'économie métropolitaine". Elaboré en collaboration avec les acteurs publics et privés métropolitains, ce document d'interpellations stratégiques (DIS) invite les élus de la toute jeune métropole à placer le numérique et l'innovation au cœur de leur politique. Doté d'une valeur indicative, ce document se présente comme un "premier jalon d'aide à la réflexion sur l'anticipation de ces enjeux [numériques] pour le territoire".
Le numérique, clef de voûte d'une stratégie métropolitaine transversale
Lancée en 2013, la mission interministérielle réunit sous l'autorité d'un préfet délégué à la métropole, un collège d'experts (économistes, juristes, urbanistes…), un conseil d'élus locaux et un conseil des partenaires (privés). Si le numérique fait aujourd'hui partie de l'avenir de la métropole, Vincent Fouchier, directeur du projet métropolitain à la mission interministérielle, confie que le sujet "n'était pas une évidence à l'origine [en 2013], mais qu'il s'est imposé presque de lui-même". Ainsi convaincue du caractère stratégique d'un numérique qui serait "[mis] au service d'un projet métropolitain transversal", la mission s'appuie en avril dernier sur la Caisse des Dépôts pour "fournir du matériel aux futurs élus pour pouvoir construire la métropole", comme le rappelle Elisabeth Viola, directrice régionale Paca de la Caisse des Dépôts.
Alimenté par un appel public à contributions, l'étude menée par la Caisse des Dépôts pourrait être une référence en matière de collaboration entre les acteurs publics et privés, comme le laisse entendre Elisabeth Viola : "Pour les futurs travaux de la métropole, nous nous inspirons de cette approche citoyenne". En effet, au-delà de l'inventaire de projets et de problématiques, c'est surtout la mise en avant d'un nouveau modèle d'innovation, ouvert, qui est à noter. A l'image de ce qui a été fait autour de l'initiative French Tech, la transition numérique de la métropole nécessitera une mobilisation collective de tous les acteurs territoriaux autour de projets structurants et fédérateurs, animés par une volonté d'ouverture et d'innovation. Comme le notent les auteurs du DIS, "le numérique ne permettra pas uniquement de faire […] en mieux et moins cher, mais également de faire 'autrement'".
Construire un modèle local de smart city
Une volonté d'innover localement, de manière coconstruite, qui "fait le plus sens" pour Stéphane Paoli, adjoint au maire d'Aix-en-Provence et membre du CNT Aix-Marseille-French Tech. Comparant l'innovation à un "mouvement" qui viendrait "de nous et qui doit se porter vers l'avenir", l'élu aquisextain insiste sur le caractère local de la démarche. "Il va falloir que l'on invente notre modèle, car le copier-coller ne fonctionne pas, [il faut] que l'on aille chercher en nous ce qu'il y a de meilleur", explique-t-il. L'objectif : accompagner la "transformation numérique [qui] est voulue dans nos entreprises, dans nos usages, et qu'il faudra faire demain dans nos collectivités".
Pour les auteurs du DIS, la métropole devra ainsi relever quatre "défis" pour réussir sa transition numérique. Celui de l'attractivité tout d'abord, pour les entreprises et à l'international, grâce aux savoir-faire et aux pôles d'excellence présents sur le territoire. De l'innovation ensuite, en soutenant la filière du numérique, les entreprises innovantes et en favorisant l'expérimentation. Sans oublier d'améliorer les conditions de vie des citoyens et de rendre la métropole "agréable". Enfin, à l'ère de la donnée, les politiques publiques devront être "efficaces" : outils de pilotage, gestion économe des ressources, durabilité des projets, gestion multirisques sont autant de chantiers qui pourraient être ouverts. A travers ces quatre défis, c'est finalement une grande partie du scope des smart cities qui devrait être retraduite localement sur le territoire métropolitain.
Des leviers pour débloquer les "atouts" du territoire
Pour mener à bien cette "transition numérique pour tous" et aider les élus à relever les défis qui les attendent, les auteurs du DIS présentent six "leviers" de développement, dont trois - connectivité, mobilité, médiation - sont considérés comme prioritaires pour 2016. Le déploiement d'une infrastructure numérique (THD et bas débit) est ainsi indispensable pour mener une politique de la donnée, moderniser l'outil de production ou encore améliorer la relation de proximité avec l'usager. Question usages, la médiation numérique apparaît nécessaire pour favoriser l'appropriation, tant par les individus que par les entreprises, de nouveaux outils et de nouvelles méthodes. Pour Stéphane Paoli, la métropole doit assurer "une vraie transformation numérique et pas une simple transition numérique, qui consisterait à laisser sur le bord du chemin […] notre ancien monde qui n'a pas trop mal marché". Son inquiétude : que les entreprises traditionnelles ne deviennent les laissées pour compte de politiques publiques numériques bien souvent orientées vers les startups. Enfin, pour répondre aux nouveaux besoins et lutter contre la congestion routière, le numérique peut apporter des solutions. Si les mobilités se "transforment toutes seules par ailleurs", le numérique est un "facilitateur" pour Vincent Tinet, de l'Agence d'urbanisme de l'agglomération marseillaise. Multimodalité, tiers-lieux, télétravail… sont autant de dispositifs que le numérique simplifie aujourd'hui, mais qu'il est nécessaire de penser dans un cadre plus large. A l'heure de définir une stratégie numérique, Elisabeth Viola s'est voulue optimiste en rappelant que "nous avons énormément d'atouts [sur le territoire métropolitain AMP], mais nous ne sommes pas allés au bout de tous ces atouts […], on peut assurément et très facilement mieux faire".