Développement des territoires - Aides régionales : le tour de vis de la Commission déplaît aux collectivités
A l'heure où les finances nationales de tous les pays d'Europe sont sous pression, la Commission scrute de près l'usage fait de l'argent des contribuables.
Celui-ci "doit être dépensé de façon plus judicieuse à une période où la plupart des budgets publics doivent être consolidés", estime le commissaire à la Concurrence Joaquin Almunia. "Les subventions publiques qui favorisent l'investissement dans les régions les moins développées peuvent faire une réelle différence, mais seulement si elles sont bien conçues."
Contexte de crise ou pas, la Commission reste indéfectiblement fidèle à son analyse historique. Elle perçoit les aides d'Etat comme un facteur potentiel de découragement de l'investissement privé et un risque important de violation de la libre concurrence.
Dans le cadre de la révision des aides à finalité régionale, qui permettent d'aider les entreprises dans des territoires bien délimités, la Commission donne un tour de vis pour limiter les aides publiques versées.
A partir de 2014, les entreprises de plus de 250 salariés ne seront plus éligibles et les projets pourront seulement être cofinancés à hauteur de 30%, contre 40% auparavant (taux abaissé de 70% à 50% pour l'outre-mer).
Bruxelles souhaite par ailleurs que les subventions publiques soient concentrées sur un territoire géographiquement continu de 50.000 personnes. Ce qui contraindrait la France à revoir sa répartition des aides, fondée sur un zonage très fin comme le montre une carte réalisée par la Datar.
La méthode française a l'avantage de favoriser l'équilibre du territoire, mais la Commission estime qu'elle conduit au saupoudrage.
En 1994, 40% de la population française était couverte par les aides à finalité régionale. La restriction des critères a eu pour effet mécanique de faire reculer le taux, qui se situe aujourd'hui aux alentours de 15%.
Ces subventions recouvrent de nombreux dispositifs comme la prime d'aménagement du territoire récompensant les entreprises qui embauchent dans des zones défavorisées, des exonérations de taxe professionnelle, d'impôt sur les sociétés, des aides sur le prix de vente ou de location de bâtiments professionnels, etc.
"Les aides d'Etat à finalité régionale sont des outils précieux - à plus forte raison dans le contexte actuel de crise économique et sociale -, qui participent à la promotion du développement harmonieux et équilibré des territoires. C'est pourquoi j'ai proposé une série d'amendements au projet de la Commission", a réagi le président du Limousin Jean-Paul Denanot, rapporteur d'un avis adopté au Comité des régions le 1er février.
L'élu propose notamment que la catégorie des "régions en transition" soit prise en compte dans le nouveau découpage des zones bénéficiaires des aides à finalité régionale.
Les territoires dont le PIB par habitant a progressé au delà du seuil fatidique de 75% de la moyenne européenne sont automatiquement "prédéfinis" comme zones éligibles aux aides à finalité régionale. Or, leur niveau de richesse est comparable aux "régions en transition" dont le PIB par habitant est compris entre 75% et 90% de la moyenne communautaire.
L'exclusion des entreprises de plus de 250 salariés du champ des aides publiques est également rejetée par les élus locaux européens, au profit d'un seuil plus élevé de 750 salariés. Des possibilités à envisager au cas par cas, selon le commissaire à la Concurrence.
Un premier échange de vues entre la Commission et les Etats aura lieu cette semaine, les 7 et 8 février. Le président du Limousin sera quant à lui auditionné le 19 février au Parlement européen par les élus de la commission du développement régional.