Agriculture - Gel historique : à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles
Face au gel historique intervenu dans la nuit du 7 au 8 avril 2021 et ayant causé d'importants dommages dans les vignes et les vergers de France, le Premier ministre a annoncé des mesures exceptionnelles, au-delà du déplafonnement du fonds des calamités agricoles déjà déclenché. Des réunions impliquant banquiers et assureurs devraient avoir lieu pour tenter de couvrir les charges des agriculteurs faisant face au phénomène qui a touché dix des treize régions françaises.
"J'ai d'ores et déjà le sentiment qu'il nous faudra aller au-delà, en dégageant des enveloppes exceptionnelles motivées par cette situation exceptionnelle". Le Premier ministre, accompagné du ministre de l'Agriculture et du ministre chargé des comptes publics, était sur le pied de guerre le 10 avril 2021 en Ardèche pour aider les agriculteurs face au gel historique qu'ils ont subi. Il était en déplacement pour constater les dégâts occasionnés par ce phénomène de gel intervenu dans la nuit du 7 au 8 avril. Un épisode sans pareil depuis ces dernières décennies et dont l'impact sur la production de l'année 2021 est encore difficile à mesurer.
Au total, dix des treize régions françaises ont été touchées, le gel ayant couvert une large partie de la France. De nombreuses cultures, vignes et vergers en particulier, ont ainsi été frappées du Nord à la vallée du Rhône, en passant par le Sud-Ouest, inquiétant le monde agricole. Et de nouvelles gelées étaient annoncées pour ce début de semaine, avec des températures allant jusque -3°C.
D'après le Comité national des interprofessionnels des vins à appellation d'origine et à indication géographique (Cniv), le gel aurait touché 80% du vignoble français. Il faut remonter à 1991 pour retrouver un épisode aussi dévastateur. Dans le nord de la France, 40.000 hectares de betteraves ont gelé, selon les informations de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA). Des difficultés qui s'ajoutent aux déficits subis par les professionnels durant la crise sanitaire…
Une cellule interministérielle de crise
Le Premier ministre a annoncé dès le 10 avril que le fonds des calamités agricoles sera déplafonné pour aider les agriculteurs à faire face à cet épisode de gel. Ce régime indemnise les pertes de récoltes et les pertes de fonds causées par des variations anormales d'intensité d'un agent naturel climatique (sécheresse, inondation, gel). Le fonds est alimenté par une taxe de 5,5% sur les assurances obligatoires. Mais la cotisation est plafonnée à 60 millions d'euros par an, l'État complétant avec des subventions à hauteur des besoins en cas de sinistres climatiques importants. "Le gouvernement, l'État, assumera les responsabilités qui sont les siennes", a assuré Jean Castex lors de son déplacement en Ardèche. "Tous les moyens dont nous disposons seront utilisés, notamment par rapport aux charges", a-t-il ajouté, prévoyant des réunions avec les banquiers et assureurs pour organiser une "mobilisation pour faire face à cette situation". Une cellule interministérielle devait aussi être installée dès le 12 avril pour organiser la mobilisation pour ce secteur.
Le Premier ministre a également insisté sur la nécessité de poursuivre et amplifier les actions structurelles pour adapter l'agriculture à ces changements climatiques, notamment à travers la politique agricole commune (PAC) européenne et le projet de loi Climat en cours de discussion à l'Assemblée nationale. "La France a besoin, et c'est aussi une question de souveraineté, d'une agriculture forte", a-t-il affirmé, se félicitant aussi des interventions annoncées par les collectivités territoriales.
Les régions demandent un fonds d'urgence dédié
Activant rapidement des fonds régionaux (15 millions d'euros) pour les agriculteurs sinistrés, Laurent Wauquiez s'est rendu dès le 9 avril au chevet d'arboriculteurs de Drôme et d'Ardèche pour constater les dégâts, faisant un premier bilan de l'impact potentiel du gel : entre 50.000 et 100.000 emplois directs et indirects pour l'arboriculture et la viticulture, 150 millions d'euros de pertes pour la région… Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a également affirmé à cette occasion que les aides habituelles ne sont pas à la hauteur des pertes provoquées, demandant un fonds spécial d'indemnisation avec une aide de l'État semblable à celle consentie dans le cadre de la crise sanitaire pour couvrir les charges et les salaires des agriculteurs touchés, tout en leur assurant un minimum de revenus.
Les régions se sont accordées dans ce sens sur une position commune, appelant dans un communiqué de Régions de France du 9 avril à la création d'un fonds d'urgence dédié. "Face à l'ampleur des dégâts, le fonds de calamités ou les solutions classiques, comme le report de charges ou des impôts, apportés en cas d'épisode de gel doivent être renforcés par un effort exceptionnel permettant la compensation des charges et des pertes de recettes", signale ainsi l'association dans son communiqué, demandant au gouvernement de mettre en place un dispositif à la hauteur du sujet et des pertes rencontrées par nos agriculteurs. Une demande qui semble avoir trouvé un écho auprès du Premier ministre. Reste à connaître les montants de ces fameuses enveloppes exceptionnelles.