Volontariat : le Sénat défend à son tour "l'ossature" du modèle français de la sécurité civile

Le Sénat demande, dans une résolution, la reconnaissance de "la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires". Spécificité en délicatesse avec la jurisprudence européenne depuis six ans.

Cela fait plus de six ans maintenant que le modèle de la sécurité civile à la française est suspendu à la jurisprudence "Matzak", du nom d'un célèbre arrêt de la CJUE du 18 janvier 2018 dans lequel le juge européen considère que le sapeur-pompier volontaire est un "travailleur" comme les autres. Et doit donc être soumis à la Dett (directive européenne du temps de travail). Six ans et toujours aucune réaction claire de l'Etat français, si ce n'est quelques déclarations se voulant rassurantes (voir notre article du 9 octobre 2023), malgré les consignes de la mission Falco en 2023 (voir notre article du 21 juin 2023) ou l'appel de l'IGA à "sanctuariser" l'astreinte (voir notre article du 20 février). 

Alors que le Beauvau de la sécurité civile subit, comme beaucoup de chantiers en cours, les contrecoups de la dissolution (voir notre article du 11 juin), le Sénat a pris la plume pour réclamer, dans une résolution adoptée le 20 juin et récemment publiée, la reconnaissance de "la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires" (et "renforcer le dispositif européen de protection civile"). Car, si la jurisprudence de la CJUE repose sur de "bonnes intentions", elle "n'est pas adaptée car elle contribuerait en pratique à négliger l'engagement civique qui est au coeur du volontariat, à mettre en péril les finances des services d'incendie et de secours, et à menacer la pérennité de notre organisation des secours".

Discorde

Les 197.800 sapeurs-pompiers volontaires, qui représentent 78,25 % des effectifs, constituent "l'ossature" du modèle français de sécurité civile, souligne la Haute Assemblée. Ce sont eux qui, présents dans les centres de première intervention, "garantissent un maillage territorial de proximité par les services de secours". Seulement, la CJUE est venue ébranler ce "socle" et semer la discorde. Les syndicats se sont rangés derrière l'arrêt pour demander sa pleine application "au nom de la sécurité et de la santé des sapeurs-pompiers" (voir notre article du 7 juin 2023). Position soutenue par la Cour des comptes en 2019. A l'opposé, la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), a, dès 2018, "déclaré craindre une remise en cause de la sécurité civile française et demandé l'élaboration d'une directive spécifique aux forces de sécurité et de secours d'urgence, conjointement avec ses homologues allemande, autrichienne et néerlandaise" (voir notamment notre article du 19 février 2024). Et les volontaires eux-mêmes, "dans leur très grande majorité", "refusent cette assimilation à la catégorie des 'travailleurs', très attachés au caractère altruiste et généreux de leur engagement", assure le Sénat, rappelant qu'ils effectuent 67% des interventions et la quasi-totalité des astreintes des pompiers.

 

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