PLF 2019 - Volet "collectivités locales" : dans la dernière ligne droite, les députés n'ont pas fait de quartier
Le marathon budgétaire a pris fin au Parlement, juste avant la trêve de Noël. Sans surprise, l'Assemblée nationale a le plus souvent imposé ses vues, notamment sur les dispositions du projet de loi de finances pour 2019 concernant les finances locales. Localtis fait le point sur un certain nombre des évolutions que ce volet du texte a connues en toute fin de parcours.
Le Parlement a définitivement approuvé le 20 décembre, par un ultime vote de l'Assemblée nationale, le projet de budget 2019, au terme d'un parcours rendu tumultueux par la crise des "gilets jaunes".
Avant de se pencher dans l'après-midi sur les mesures d'urgence répondant à cette crise, 182 députés ont voté pour ce deuxième budget du quinquennat, 52 contre et 3 se sont abstenus. Les élus LREM et MoDem ont voté pour, tandis que les groupes d'opposition ont majoritairement voté contre ou se sont abstenus.
Après l'échec de la tentative commune aux députés et aux sénateurs, de parvenir à un compromis sur le texte, lors d'une réunion le 12 décembre, les événements se sont accélérés. L'Assemblée nationale a examiné le projet de loi en nouvelle lecture lors des séances publiques des 17 et 18 décembre. La discussion sur les 350 articles que comporte désormais le projet de loi (trois fois plus que dans le texte initial) s'est terminée mercredi 19 décembre, peu avant six heures du matin. Le même jour, le Sénat a rejeté en nouvelle lecture le texte et, le lendemain, l'Assemblée nationale l'a donc adopté définitivement dans la version établie la veille en nouvelle lecture.
Taxe carbone : les espoirs des collectivités sont une nouvelle fois douchés
Dans la dernière ligne droite, les députés ont balayé d'un revers de manche la plupart des dispositions introduites en première lecture par le Sénat, dont plusieurs étaient favorables aux finances des collectivités territoriales. Pêle-mêle, ce sont l'affectation d'une fraction de la taxe carbone aux collectivités et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ayant adopté un plan climat-air-énergie territorial, l'augmentation de 45 millions d'euros des moyens affectés aux départements pour l'entretien de leur réseau routier, le remboursement partiel des frais de carburant aux centres départementaux d'incendie et de secours, ou encore la compensation intégrale des exonérations de longue durée de fiscalité locale pour les constructions neuves et les acquisitions de logements sociaux, qui sont ainsi passés à la trappe. On notera aussi que le triplement (de 60 à 180 millions d'euros) de la solidarité financière entre les départements franciliens et la possibilité pour les élus locaux de déduire de leur impôt une partie de leurs frais de déplacements n'ont pas plus trouvé grâce aux yeux des députés.
Les dispositifs voulus par les sénateurs pour éviter que les collectivités territoriales ne subissent d'une année à une autre des variations de leurs attributions de dotations (rapport sur les conséquences des modifications du périmètre des EPCI sur leurs communes membres et garantie pour les communes de conserver leur montant de dotation globale de fonctionnement lorsqu'elles intègrent une nouvelle intercommunalité) n'ont pas, non plus, survécu à la discussion en nouvelle lecture dans l'hémicycle du Palais Bourbon. Les députés ont toutefois maintenu la dissociation de l'arrêté portant notification des attributions individuelles de dotations et les informations dues par l'Etat lorsque les dotations des communes connaissent des variations importantes. On notera qu'en vertu d'un amendement du député (LREM) Jean-René Cazeneuve, les services de l'Etat auront un délai de deux semaines pour faire parvenir ces informations (et non deux mois).
La plupart des évolutions voulues par les sénateurs concernant l'attribution de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ont également disparu du projet de loi final. Les députés ont seulement conservé les dispositions qui amélioraient la transparence de ces dotations.
Communes nouvelles, taxe sur les friches commerciales... ce qu'il reste du texte établi par le Sénat
Dans une majorité de cas, ils ont fait le choix de rétablir les dispositions qu'ils avaient adoptées en première lecture, sans même les retoucher. L'Assemblée nationale a ainsi rétabli les dispositions maintenant, au titre de 2018, l'exonération de taxe d'habitation pour 550.000 personnes. Une option préférée à celle du dégrèvement (qui, lui, avait la faveur des sénateurs). La différence n'est pas neutre pour les collectivités territoriales, qui vont voir leurs budgets locaux réduits de 56 millions d'euros, l'an prochain.
Les députés ont également décidé le retour de la minoration en 2019 (dans le cadre des "variables d'ajustement") de 49,1 millions d’euros des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP). Gérés par les conseils départementaux, ces fonds doivent permettre de soutenir des communes défavorisées.
La nouvelle dotation Natura 2000 (5 millions d'euros) sera attribuée en 2019 aux communes de moins de 10.000 habitants dont les ressources financières ne dépassent pas un certain niveau et qui sont couvertes à plus de 75 % par un site Natura 2000 (les sénateurs s'étaient opposés à l'instauration de ce seuil). Les dispositions sur l'aménagement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) font également leur retour dans leur version votée par l'Assemblée nationale.
Quelques-unes des dispositions votées par le Sénat demeurent quand même dans le projet de loi. Il en va ainsi d'une bonne partie de celles qui prévoient la prolongation du pacte de stabilité financière en faveur des communes nouvelles, des mesures visant la composition du comité des finances locales, du maintien de la taxe sur les friches commerciales, de la prise en compte dans le calcul du coefficient d'intégration fiscale (CIF) des communautés des attributions de compensation versées par les communes au groupement auxquelles elles appartiennent. S'agissant de la prise en compte des redevances d’eau et d’assainissement dans le calcul du CIF des communautés de communes, les députés ont accepté un report à 2026 (au lieu de 2020) de cette modification pour les seules redevances d'eau. Instaurée par les sénateurs, la possibilité pour les EPCI d’arrêter le produit de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi) dans les mêmes conditions que pour les autres impositions locales, soit jusqu’au 15 avril de l’année d’imposition, est également conservée.