"Villes intelligentes"  : la Cour des comptes européenne juge le programme Phare peu éclairant

Dans un rapport spécial rendu public le 30 octobre dernier, la Cour des comptes européennes a dressé un premier bilan du programme "Phare" de la Commission européenne, conduit lors de la programmation 2014-2020 dans le cadre du programme Horizon 2020. Phare visait, d’une part, à aider les villes lauréates (48 villes "phares", dont Dijon, Lyon, Nantes et Nice, et 72 villes "associées", dont Bordeaux, participaient au total à 18 projets) à déployer des solutions et technologies innovantes pour améliorer leur gestion et, d’autre part, à dupliquer ces dernières dans d’autres villes dans un second temps.

La Cour juge que le premier objectif a peu ou prou été atteint. Jugé "globalement bien conçu" – quand bien même les incidences attendues étaient insuffisamment décrites et dépourvues "de valeurs cibles et d’indicateurs quantitatifs globaux" –, le programme a selon elle profité aux villes participantes. Les projets clôturés (9 à fin 2022, 4 devant s’achever en 2023, 4 autres d’ici 2024 et une en 2025) ont "donné des résultats positifs" et la majorité des objectifs visés ont été atteints (la plupart des solutions déployées étaient liées à l’énergie). Et ce, en dépit des difficultés rencontrées. En l’espèce, si la Cour mentionne sans surprise le Covid, elle insiste sur le fait que l’adhésion citoyenne, pourtant "cruciale", a souvent été difficile à obtenir.

En revanche, tel ne serait pas le cas du second objectif et ce, pour plusieurs raisons. La Cour estime d’abord que le programme s’inscrivait "dans un paysage fragmenté d’instruments de financements et d’autres initiatives de l’UE [plus de 50 recensées sur la même période, 'directement ou indirectement liées au développement urbain'], dépourvu de stratégie globale et de coordination appropriée". Elle observe ensuite que les villes concernées n’ont jusqu’à présent pas réussi à attirer des investissements privés par l’intermédiaire du service de soutien pourtant mis en place à cet effet par la Commission. Plus globalement, elle estime que le manque de financement, tant public que privé, freine la reproduction de ces solutions.

Ce retour d’expérience est d’autant plus important que le programme Phare s’est prolongé dans l’actuelle programmation 2021-2027 sous la forme du programme "Villes intelligentes et neutres pour le climat", qui doit aider 100 villes (dont 9 françaises) à atteindre la neutralité climatique d’ici 2030 et les autres villes de l’UE à faire de même d’ici 2050 en s’inspirant de leurs expériences (voir notre article du 28 avril 2022). La Cour redoute que l’expérience acquise par les villes participantes ne soit sous-exploitée, considérant que "le niveau actuel de coordination entre ces deux programmes ne permet pas de reproduire et d’exploiter pleinement les solutions issues des projets". Un constat étonnant quand on sait que 51 des 120 villes "phares et associées" du programme Phare font également partie des "100 villes intelligentes et neutres". En conclusion, la Cour dresse plusieurs recommandations à la Commission, parmi lesquelles l’évaluation de la capacité de financement des villes de la mission "100 villes" et l’intégration "d’activités de co-conception et de mobilisation des citoyens" dans ses programmes de travail d’Horizon Europe, en donnant suffisamment de souplesse à ces derniers pour qu’ils puissent intégrer les résultats de ces activités dans les projets.

 

 

 

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