Ville & Banlieue lance un "appel solennel" à Emmanuel Macron pour être reçu "en urgence"
Réunis en marge du Congrès des maires, les élus de Ville & Banlieue ont lancé "un appel solennel" au chef de l'Etat, "garant de la République", au vu de la "situation d'urgence" dans les quartiers politique de la ville. Les élus prédisent que "des pans entiers de leurs projets Anru" vont s'effondrer en début d'année 2025.
"Nous ne voulons pas être les gentils animateurs d'un comité des fêtes. Nous voulons pouvoir continuer à mener des politiques municipales", a ironisé Gilles Leproust, président de l'association d'élus Ville & Banlieue et maire d'Allonnes (Sarthe), lors d'une conférence de presse qui se tenait traditionnellement dans un café à deux pas du Congrès des maires, mercredi 20 novembre 2024. Selon eux, les contributions demandées aux collectivités dans le projet de loi de finances 2025 menacent la stabilité des projets de leurs communes, leurs investissements, y compris ceux liés au nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU). "Les villes, contrairement à l'État doivent équilibrer leur budget", rappelle Ville & Banlieue qui craint de devoir revoir ou annuler des prestations, supprimer des projets, de ne pas pouvoir recruter et au final d'affaiblir le service public "pourtant déterminant dans nos quartiers".
"Regardez bien dans les mois à venir"
Ces restrictions arrivent au moment où "nos programmes de renouvellement allaient enfin voir le jour", déplore Catherine Arenou, maire de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), la commune où s'est tenu le dernier comité interministériel des villes (CIV). "Limiter nos capacités d'investissements, c'est faire tomber complètement tout un tas de projets" portés pour certains depuis 2016, poursuit l'élue avant de préciser que ce sont des "projets de remise à niveau des lieux d'éducation, des projets qui permettent d'offrir de la culture et du sport, des services publics de qualité". Tous les ans, "nos budgets municipaux sont adoptés à 50 euros près, même pour ceux atteignant plusieurs millions d'euros". Mais cette année, la mise à contribution des collectivités à l'effort de réduction de la dette publique dans le projet de loi de finances pour 2025 (à hauteur de 5 milliards d'euros environ) menace directement les investissements. "Regardez bien dans les mois à venir, prédit l'édile, vous allez voir le nombre de projets de renouvellement urbain qui vont céder." Elle rappelle que ces projets sont portés par l'Agence nationale de renouvellement urbain (Anru) mais également par les EPCI, les départements et les régions aussi. En effet si les communes comportant des quartiers prioritaires politique de la ville (QPV) peuvent échapper au dispositif prévu par l'exécutif du fait de la prise en compte "d'indices de fragilité" par le projet de loi de finances, ce n'est pas le cas des EPCI, des départements et des régions, gros contributeurs aux projets d'investissement des villes. "Nos habitants se sentiront encore une fois les premières victimes et ils ne croiront plus en la démocratie et ils auraient raison", tacle l'élue. Agnès Bourgeais, maire de Rezé (Loire Atlantique), le confirme : "Nos banlieues sont les premières victimes de ces restrictions budgétaires." "Nous obliger à contraindre nos budgets, à remettre en cause nos investissements, certaines embauches, c'est impacter directement la population de ces quartiers."
Un appel avant que cette "digue" ne lâche
C'est pourquoi, avant que cette "digue" ne lâche, les élus de Ville & Banlieue, "fatigués", lancent un "appel solennel" à Emmanuel Macron qui est le "garant de la République". Ils demandent à être reçus "en urgence, vu la gravité de la situation" pour lui remettre la synthèse de leur "Tour de France des quartiers populaires 2024", réalisé après les émeutes de l'été 2023. "Il ne peut pas continuer à laisser de côté 6 millions d'habitants des quartiers populaires", s'emporte Gilles Leproust. "La relation entre le président de la République et les habitants n'est pas un long fleuve tranquille depuis 2017", renchérit Catherine Arenou mais "lui seul peut se porter garant de la démocratie qui doit exister sur tous les territoires". S'ils n'étaient pas reçus, les élus promettent déjà de porter le document directement à l'Élysée.
Un point d'étape plutôt qu'un CIV
Les élus de Ville & Banlieue disent avoir déjà rencontré Valérie Létard, ministre du Logement et de la Rénovation urbaine en charge de la politique de la ville. Mais plutôt qu'un nouveau CIV, ils souhaiteraient un point d'étape pour évaluer les décisions prises jusqu'alors. Ils saluent les "très bons dispositifs" que sont les cités éducatives, les quartiers d'été, les colos apprenantes. "Cela fonctionne mais ce n'est à la hauteur des enjeux, ce n'est pas suffisant." Ils alertent enfin sur une chose : "Il n'y a pas de politique de la ville efficace si le droit commun est en déshérence dans les quartiers."