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Economie sociale - Vers un label européen pour les financeurs solidaires ?

L'UE cherche à attirer les capitaux privés vers les activités à vocation sociale. Une manière de changer l'image de la finance, tout en aidant les entrepreneurs à ne plus dépendre uniquement des subventions publiques. En France, une loi de programmation va être préparée, a confirmé le nouveau ministre délégué à l'ESS, Benoît Hamon, qui a aussi convié les représentants du secteur à la conférence sociale des 9 et 10 juillet.

Une entreprise européenne sur dix relève de l'économie sociale et solidaire (ESS), alors que le secteur reste invisible ou indéfinissable pour la plupart des citoyens. Existe-t-il d'ailleurs vraiment ? "La sphère de l'économie sociale est longtemps restée en dehors des préoccupations traditionnelles des économistes", admet l'Insee dans une étude publiée en mai.
Elle traverse pourtant de nombreux domaines, qu'il s'agisse de l'agriculture, de la santé, de l'environnement, des transports ou de la culture. Et tend à la réalisation d'objectifs sociaux, comme la réduction des inégalités et non à l'accumulation de profits.
Un discours qui porte en période de crise et mobilise donc l'UE. D'ici la fin du mois de juin, les députés européens et les Etats pourraient parvenir à un accord politique afin d'accélérer la mise à disposition de capitaux privés au profit de l'ESS. Prêts, garanties, prises de participation dans l'entreprise, capital risque… La palette des instruments financiers est large. Mais sans contrepartie, les investisseurs continueront de se tourner vers les secteurs lucratifs, où la marge de rentabilité est plus forte. D'où la proposition d'introduire un "label européen" qui atteste de la nature de l'investissement réalisé.
Les gérants de portefeuilles seront donc habilités à commercialiser dans toute l'Union des produits estampillés "fonds d'entrepreneuriat social" à condition de respecter plusieurs critères : 70% du capital doit être dévolu au financement de projets portés par des associations, entreprises ou fondations oeuvrant pour l'ESS et la somme investie doit être conséquente, avec un seuil minimum fixé à 100.000 euros. Si l'ensemble des conditions prévues par le texte sont respectées, le gérant pourra alors recevoir l'agrément nécessaire. En France, c'est l'Autorité des marchés financiers (AMF) qui aura cette mission.

Dispositif fiscal européen

Ces facilités financières, portées initialement par le commissaire français Michel Barnier, dressent un pont entre des objectifs souvent antagonistes. Elles affirment "l'exigence de rapprocher les marchés financiers de l'économie réelle", résume Sophie Auconie, députée européenne Nouveau Centre/PPE désignée rapporteure de l'un des textes. Bien engagées, des discussions avec les Etats ont eu lieu cette semaine et devraient se poursuivre aux alentours du 12 juin. Le seul grain de sable susceptible de contrarier les esprits porte sur la présence d'un contrôleur, appelé "dépositaire", qui puisse tracer les transactions et savoir à n'importe quel moment où l'argent se trouve. Les Etats, qui craignent un surcoût pour les gestionnaires d'actifs, rejettent ce principe de sécurité.
Les avancées constatées au plan européen font écho à la stratégie mise en place dans l'Hexagone. L'élection de François Hollande a changé le paysage ministériel, désormais marqué par la création d'un maroquin spécifique à l'économie sociale et solidaire, confié à Benoît Hamon. Contrairement à d'autres pays, comme la Belgique ou l'Espagne, la France ne s'est pour le moment pas dotée d'une loi sur l'ESS mais un projet de loi cadre ou de programmation sera bientôt préparé, a annoncé le nouveau ministre, le 6 juin. Octroyer un statut spécifique à ces structures permet de tracer une frontière entre les activités lucratives et celles qui ne le sont pas, donnant ainsi des gages de transparence aux financeurs solidaires, privés comme publics. Favorable à cette idée, Roselyne Bachelot n'était pas parvenue à faire adopter un projet de loi.
Le sujet reviendra donc rapidement sur le devant de la scène, encouragé par la convocation d'une conférence sociale en juillet (voir encadré ci-dessous). Au-delà du phénomène de labellisation, des financements spécifiques pourraient être mis en place. Une réflexion émerge aussi au sein de l'UE pour qu'un "dispositif fiscal européen" puisse être étudié au moment où Bruxelles évalue l'application du règlement.

Marie Herbet / EurActiv.fr

Les acteurs de l'ESS participeront la conférence sociale des 9 et 10 juillet
Les acteurs de l'Economie sociale et solidaire (ESS) participeront à la conférence sociale des 9 et 10 juillet, a annoncé Benoît Hamon, lors d'un point presse, le 6 juin. Le ministre délégué chargé de l'Economie sociale et solidaire a également détaillé sa feuille de route et conformé qu'une loi de programmation ou de loi cadre de l'ESS serait élaborée "fin 2012-début 2013", pour un vote en 2013. L'idée d'une loi cadre est une revendication forte des acteurs de l'ESS et constitue l'un des engagements de François Hollande. "L'un des objectifs de la loi est qu'elle clarifie la représentation du secteur", a précisé Benoît Hamon, alors que les contours de l'ESS restent assez flous. Il réunira le Conseil supérieur de l'ESS au mois de juillet pour poser les jalons de ce projet de loi. Le ministre est également revenu sur la question du financement de l'ESS et sur le rôle clé de la future Banque publique d'investissement présentée le même jour en Conseil des ministres. 500 millions d'euros pourraient être spécifiquement fléchés vers l'ESS au sein de la banque qui devrait voir le jour début 2013. Par ailleurs, un travail pourrait être mené pour faciliter l'accès des entreprises du secteur dans les marchés publics, a ajouté le ministre.
M.T. avec agences