Vélos, trottinettes… : une hausse "préoccupante" des accidents mortels, alerte la Sécurité routière

Dans un bilan provisoire publié ce 1er février, la Sécurité routière constate une forte hausse des accidents mortels dont sont victimes les cyclistes, surtout hors agglomération, et les utilisateurs d'engins de déplacements personnels motorisés comme les trottinettes électriques.

Les mobilités "douces" ne le sont pas toujours, à en croire le bilan provisoire de l'accidentalité routière en 2022 publié ce 1er février. Alors que la mortalité des automobilistes et des usagers de deux-roues motorisés a baissé l'an dernier – 59 tués de moins pour les premiers, 34 pour les seconds –, l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière a recensé une hausse qualifiée de "préoccupante" de celle des cyclistes et des utilisateurs d’engins de déplacements personnels motorisés (EDPM) qui réunissent, outre la trottinette électrique, le monoroue, le gyropode et l'hoverboard. Ils représentent désormais 8% des tués et 20% des blessés graves de la route.

Hausse marquée des accidents graves

La mortalité des cyclistes s'est accrue de 30% l'an dernier, avec un total de 244 tués (+57 tués par rapport à 2019, année d'avant la pandémie). On compte aussi parmi eux davantage de blessés graves : 2.600 (+300, soit une augmentation de 13%). "La pratique cycliste rurale/hors agglomération accuse une hausse préoccupante de +47% de sa mortalité et de +22 % du nombre de blessés graves par rapport à 2019", précise la Sécurité routière.
Les utilisateurs d’EDPM subissent, eux, une forte augmentation de leur accidentalité : 34 "trottinettistes" ont perdu la vie en 2022 contre 10 en 2019 et la gravité de leurs blessures est également en forte hausse : 600 blessés graves estimés en 2022, soit 400 de plus qu’en 2019. Le nombre de piétons tués sur la route a été de 484 l'an dernier (+1 par rapport à 2019). On recense aussi 2.000 blessés graves chez les piétons (–13%). Le bilan constate une hausse des heurts de piétons hors agglomération et sur autoroute où 57 piétons sont décédés.

Côté cyclistes, l'augmentation de la pratique conduit à accroître le risque d'accident si des règles élémentaires, rappelées par la sécurité routière, ne sont pas observées. Le Club des villes et territoires cyclables et marchables s'est de son côté engagé dans une démarche de prévention, la stratégie Vision Zéro – zéro blessé grave et zéro mort – portée par la prévention routière et milite pour la généralisation de la limitation de vitesse à 30 km/h en ville.

Trottinettes électriques : l'alerte de l'Académie de médecine

Mais c'est l'essor des trottinettes électriques, dû notamment à la multiplication des offres d'engins en location qui suscite le plus d'inquiétudes. L'Académie de médecine a même publié en novembre dernier un rapport sur les risques que comporte ce mode de déplacement. "Une réglementation tardive par rapport aux avancées technologiques et médiocrement observée par les usagers, ajoutée à un environnement souvent mal adapté", ont rendu le développement des trottinettes électriques "chaotique et source d'une accidentalité croissante", a constaté l'Académie. Parmi les blessures fréquentes, les lésions affectent principalement l'extrémité crânio-faciale et les membres, plus particulièrement le membre supérieur. Ces localisations des blessures résultent d'une chute en avant qui rend la tête, bras et avant-bras très exposés. Le crâne est ainsi plus souvent atteint dans les accidents de trottinette que dans les accidents de vélo où la chute se produit latéralement (74% contre 43%).

"Les principaux risques encourus en cas d'accident sont le traumatisme crânien ou les blessures au visage, les fractures, des lésions cutanées qui peuvent laisser des cicatrices, des fractures des dents, du nez, mais aussi de la clavicule, du bras et de l'avant-bras", a précisé à l'AFP Gilles Bagou, anesthésiste réanimateur au Samu de Lyon. En août 2022, la mort de deux adolescents, Iris et Warren, percutés alors qu'ils circulaient en trottinette dans le centre de Lyon, avait suscité une intense émotion dans la ville.
Auteur d'un rapport en 2021 sur les traumatismes consécutifs aux accidents de trottinettes dans le Rhône, Gilles Bagou souligne que le nombre d'accidents a été multiplié par 7,3 dans ce département entre 2018 et 2019. "En 2019, sur 1.200 accidents, 3% d'utilisateurs ont eu des blessures considérées comme graves et 12% des blessés ont dû être hospitalisés", a-t-il détaillé. Pour l'urgentiste, "il y pourtant des moyens de protection : le casque et les gants me paraissent indispensables sur une trottinette pour limiter la gravité du traumatisme", a ajouté l'urgentiste. Or le port du casque serait encore insuffisant. Si 86% des propriétaires de trottinettes en mettent un, seul un loueur sur dix porte un casque, a montré une étude réalisée en 2020 pour la Fédération française de l'assurance.

Une proposition de loi pour immatriculer vélos et trottinettes électriques

Le sénateur Xavier Iacovelli (groupe RDPI à majorité Renaissance), annoncé ce mardi 7 février avoir déposé une proposition de loi pour rendre obligatoire l'immatriculation des vélos et trottinettes électriques.
"Ces nouveaux modes de transports ont profondément modifié la circulation au coeur de nos espaces publics, entraînant de nombreux abus, des incivilités et des comportements dangereux", souligne l'élu. Il propose en conséquence la création d'un certificat d'immatriculation des trottinettes et vélos électriques et plus largement des "engins de déplacement personnel motorisés".
La proposition de loi, qui pourrait être examinée lors d'une prochaine niche parlementaire réservée au groupe RDPI, entend répondre à trois objectifs : "assurer un contrôle de ces véhicules" pour "responsabiliser les utilisateurs en cas d'accidents ou d'infractions", "permettre une meilleure identification de ces appareils, souvent abandonnés sur la voie publique" et "donner des moyens supplémentaires aux forces de l'ordre afin de lutter contre les dérives" que peut occasionner leur utilisation.