Vélos en libre-service : le free-floating sous toutes les coutures
L'Ademe vient de présenter une étude sur les impacts des services de vélos en free-floating sur les mobilités actives. Ce service novateur, "qui crée en grande partie son propre marché" et n'est pas forcément utilisé par d’anciens usagers du vélo, gagne du terrain dans huit autres villes que Paris.
L'étude présentée par l'Ademe, réalisée à partir d'un questionnaire diffusé durant l'automne dernier par 6t-bureau de recherche, recense les différents services de vélos en libre-service (VLS) sans station ni borne d’attache, dits "en free-floating" (VFF). Porté par la révolution technologique des smartphones, leur développement en à peine un an a été très rapide. Mais ce service mobilisant, comme le pointe le bureau d'études, "des investissements moindres que les VLS en station" taraude les élus et pose des problèmes d’occupation de l’espace public. Par ailleurs, il peut "représenter une forme de concurrence pour les systèmes de VLS en station déjà présents dans les villes", ce qui fait alors "oublier l’objectif d’augmentation de la part modale du vélo mis en avant par les acteurs publics, et auquel le VLS en free-floating peut contribuer".
20% de l’offre de vélos partagés
Sept services de VLS en free-floating - dont six subsistent aujourd’hui - se sont déployés à Paris et dans huit autres villes. Soit 15.000 VFF ce qui représente "20% de l’offre de vélos partagés sur le territoire".
Plus de 2.300 usagers ont répondu au questionnaire web. Le nombre d’usagers "dans les villes de province ne permettant pas une analyse statistiquement significative", l’étude repose sur une enquête quantitative réalisée auprès des usagers parisiens des services Ofo et Mobike, et se concentre sur ceux qui ont réalisé "au moins une location dans les trente jours avant l’enquête". Hormis cette enquête sur les usages centrée sur Paris (voir ses principaux enseignements en encadré), l'état des lieux dressé de l’ensemble des offres de VLS, avec ou sans station, intéressera d'autres collectivités.
Celles qui s'équipent, celles qui abandonnent
L'étude revient en effet sur ce "vif engouement pour le VLS " : marqué entre 2007 et 2010, il s'est atténué, ce qui "témoigne d’une certaine saturation de l’offre", observe le bureau de recherche. L'étude recense 50.000 VLS sur l’ensemble du territoire. Hormis Toulon, Reims et Grenoble, les grandes villes sont équipées de VLS en station. De plus petites aussi, comme Laval ou Vannes. Pour rappel, d'autres (Aix-en-Provence, Plaine Commune, Chalon-sur-Saône, Perpignan) ont mis fin au service "en raison d’une trop faible utilisation pour des coûts importants", mais sans nécessaire corrélation à la taille ou à la population de la ville. Pourquoi avoir jeté l'éponge ? Hypothèse émise : "L’abandon du service est dû au contexte spécifique dans lequel était inscrit chacun des systèmes qui ne sont plus en activité aujourd’hui, de nombreux facteurs pouvant entrer en ligne de compte : pratique du vélo sur le territoire, choix de localisation des stations, modèle économique, etc".
Des flottes de tailles variées dans huit villes
Ailleurs, les offres les plus fournies sont celles d’agglomérations de tailles très variées avec Strasbourg en tête (6.000 Vélhop, soit 16 VLS pour 1.000 habitants), "bien loin devant Lorient avec près de 7 VLS pour 1.000 habitants puis Cergy-Pontoise (5,7), Lyon (5,3) et Toulouse (5,1)". Autre observation : les plus grosses agglomérations, comme Paris, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Lille, Nice ou Montpellier ne disposent pas de services de location de vélos de longue durée. "Lyon, Nantes et Strasbourg font cependant exception". Lille fut la première à accueillir des VLS en free-floating (ceux de Gobee.bike en octobre 2017). Reims et Lyon ont suivi, jusqu'à ce que cet opérateur dépose le bilan. La présence de ses vélos verts y fut donc très éphémère. Avec son offre Indigo Weel, le groupe Indigo s'est engouffré sur ce créneau - boudé par les grands opérateurs asiatiques - des villes de province (huit villes). "La taille des flottes d’Indigo varie de 450 vélos pour Angers ou Tours à 1.500 à Toulouse ou Lyon", chiffre l'enquête.
Free-floating à Paris : les principaux enseignements
Il ressort de l'enquête réalisée auprès des usagers parisiens des services Ofo et Mobike que les vélos en free-floating (VFF) sont principalement empruntés par un "public principalement masculin, sans enfant, très diplômé mais aux revenus modérés, assez proche des usagers du vélo dans leur ensemble". Les usagers des VFF sont très jeunes : "Un quart des usagers a moins de 25 ans, 60% ont moins de 35 ans". Les vélos sont empruntés pour des motifs variés, "avec une forte part de trajets pour se rendre à ou revenir d’activités de loisirs". Ils se positionnent donc "sur les déplacements les moins structurants et les plus diffus du quotidien". S'il s'agit bien d'un marché nouveau, qui attire en grande partie "des personnes qui n’utilisaient pas ou peu le vélo auparavant, que ce soit sous la forme du vélo personnel ou du Vélib’", il ne marche pas tant que cela sur les plates-bandes de ce dernier : "Les effets de remplacement total d’un service par l’autre ne représentent que 6% de la clientèle des VFF". Les trajets en porte à porte et le gain de temps (bon rapport vitesse-prix) qu'ils permettent de réaliser séduisent en revanche les usagers des transports en commun et les piétons. "Mais là encore une forme de complémentarité prévaut, les VFF étant fréquemment utilisés pour réaliser les premiers ou derniers kilomètres d’un trajet par ailleurs réalisé en transports en commun". M.B.