Vélo : des pistes pour (re)mettre en selle collégiens et lycéens
L'Ademe vient de publier une étude inédite sur la mobilité à vélo des élèves du secondaire. Cet état des lieux de la pratique cyclable des jeunes met en exergue les freins qui subsistent pour développer ce mode de déplacement auprès des 5,7 millions de jeunes potentiellement concernés, ainsi que les bonnes pratiques à l'œuvre dans certains départements et régions. Il fournit aussi une vingtaine de recommandations pour engager des actions en faveur du vélo. Certaines d'entre elles sont inspirées d'exemples étrangers.
A l'occasion de la Semaine européenne de la mobilité et juste avant la présentation du deuxième plan vélo du gouvernement, dont l'un des volets cible directement l'apprentissage du vélo pour les élèves du primaire (lire notre article), l'Ademe a publié la première étude nationale sur la mobilité à vélo des collégiens et lycéens, menée notamment en partenariat avec le portail national de l’écomobilité scolaire Mobiscol. Cet état des lieux concerne 5,7 millions de jeunes - 3,43 millions de collégiens et 2,27 millions de lycéens (dont 0,46 million de lycéens professionnels) -, soit environ 8,5% de la population française qui constitue un public de choix pour développer la part modale du vélo en France.
Enjeux d'autonomie et aussi de santé
"Si les adolescents d’aujourd’hui sont particulièrement sensibles à l’urgence climatique et à la nécessité de transformer nos modes de vie, ils ne savent pas toujours par où commencer, relève cependant l'Ademe. Le vélo comme mode de déplacement au quotidien peut être, pour ceux résidant à des distances compatibles de leur établissement, une réponse concrète à leur volonté de transition." L'étude rappelle qu'en 2020, 29% des collégiens et 19% des lycéens étaient accompagnés par un adulte pour se rendre dans leur établissement. "Se déplacer à vélo répond également à des enjeux d’autonomie et d’indépendance, pour plus de liberté et de confiance en soi, et permettra également demain un plus grand choix d’orientation et un accès facilité à l’emploi pour ces adultes en construction, en évitant l’achat d’une voiture", souligne l'Ademe. L'étude fait aussi ressortir un enjeu de santé. La mobilité à vélo est également un moyen de lutter contre la sédentarité, estime l'Ademe qui relève dans l'étude que 73% des jeunes de 11 à 17 ans n'atteignent pas les recommandations de 60 minutes d'activité physique par jour. Enfin, la pratique du vélo est aujourd’hui jugée "extrêmement genrée parmi les adolescents, une situation imputable aux représentations qu’ont les adolescentes du vélo". Le vélo garderait ainsi une image "trop sportive", et les modèles de vélos proposés ne seraient pas adaptés aux jeunes filles, en termes de confort et d'ergonomie, fait ressortir l'étude. Il y a donc lieu selon elle d'imaginer des actions qui permettront de faire entrer le vélo dans les normes sociales pour ancrer sa pratique chez les jeunes, par exemple en intégrant cette dernière dans les médias qu'ils suivent le plus (télévision, cinéma, plates-formes de séries, réseaux sociaux), et de rendre personnalisable l’esthétisme, l’ergonomie et l’accessoirisation des vélos.
Aménagements, équipements : des freins à lever
Au-delà de l'image du vélo auprès des jeunes, la mobilité cyclable se heurte à plusieurs freins majeurs, même pour les 50 à 70% d’élèves résidant à une distance de leur établissement compatible avec des déplacements en petite reine. L'étude fait ressortir "l’insuffisante desserte des établissements en infrastructures cyclables sécurisées, frein indépassable pour de nombreux parents", "le manque de services vélo (stationnement, atelier de réparation…) aux abords des établissements, en quantité et en qualité" - la majorité de ceux qui sont pourvus en stationnement utilisent des râteliers (ou pince-roues) insuffisants pour sécuriser correctement les vélos, et la capacité est réduite puisque plus de la moitié des répondants disposent de moins de 30 places de stationnement, alors qu’en moyenne un collège comporte 490 élèves et un lycée 587 élèves", "le manque d’outils et de supports à destination des élèves et équipes pédagogiques pour transmettre les bons messages, les bonnes pratiques" ou encore le fait de "disposer d’un vélo en bon état par élève".
Initiatives locales pionnières
L'étude montre aussi les initiatives prises par les acteurs locaux pour développer la mobilité à vélo des jeunes. Du côté des départements, l’Hérault, la Gironde, la Savoie, notamment, se sont employés à promouvoir l’usage du vélo en collaboration étroite avec les établissement et collectivités, en développant tout à la fois des aménagements cyclables, du stationnement qualitatif, des services de marquage et de réparation, des animations… Au collège Mendès à Jacou (Hérault) ou encore à celui de l’Estey à Saint-Jean D’Illac (Gironde), plus de 50% des élèves se rendent déjà en classe à vélo. L’engagement des régions en faveur de la mobilité cyclable des lycéens est, lui, globalement plus récent. "Il se traduit aujourd’hui principalement dans les intentions et ambitions affichées dans les plans vélo et schémas vélos régionaux, en majorité en matière de stationnement vélo", relève l'Ademe. A titre d’exemple, elle cite la région Bourgogne-Franche-Comté qui a inscrit dans son plan vélo publié en 2020, plusieurs propositions à destination des lycéens : encourager les trajets scolaires (lycées) à vélo grâce à un stationnement sécurisé ; créer des pistes ou bandes cyclables locales desservant les lycées ; mettre en place des achats de vélos et de vélos à assistance électrique, des sorties vélo et l’installation de parking vélo dans le cadre du label "Ecolycée".
Une vingtaine de recommandations
Outre ses propositions à caractère transversal (accompagner spécifiquement le développement de la mobilité à vélo chez les adolescentes, sensibiliser les parents d’élèves à la mobilité à vélo, mieux communiquer auprès des adolescents, équiper et rendre systématiquement accessibles à vélo les nouveaux établissements secondaires), l’étude présente 21 recommandations, illustrées d’exemples français et étrangers, pour encourager les acteurs locaux à développer la mobilité vélo des jeunes du secondaire. Elles sont organisées en 5 thématiques :
- la sécurisation de l’accès cyclable et l’apaisement de la circulation aux abords des établissements scolaires ;
- l’équipement des établissements en stationnements vélo, services vélo et l’accessibilité à des vélos aux élèves ;
- l’apprentissage et la sensibilisation des élèves du secondaire à la pratique cyclable, par exemple en intégrant le sujet dans les programmes scolaires ;
- le développement des mobilités actives (marche, vélo) vers les établissements secondaires par l’élaboration de documents cadres et d’études de références du niveau national au local ;
- la communication sur le vélo en s’appuyant, notamment, sur les grands événements nationaux et les réseaux sociaux.
L’Ademe propose en complément un guide méthodologique à destination des communes, intercommunalités, départements et régions afin de réaliser un diagnostic mobilité cyclable de leurs établissements.