Une proposition de loi sur le droit à l’emploi sera portée par le député Stéphane Viry
Les 17 organisations ayant porté la concertation sur le droit à l’emploi rendent publiques ce jour leurs conclusions, appelant à s’appuyer sur des solutions diverses – IAE, Esat, entreprises à but d’emploi… - pour créer des emplois adaptés aux personnes en situation de chômage de longue durée. Ces acteurs espèrent que des coalitions transpartisanes vont pouvoir se nouer autour d’une proposition de loi qui pourrait être déposée à l’Assemblée nationale d’ici cet été.

© Capture d'écran/ Conférence de presse sur le droit à l'emploi en présence de Laurent Granguillaume, Pierre-Edouard Magnan et Pascale Ribes
Le député Stéphane Viry (Liot, Vosges) portera une proposition de loi (PPL) sur le droit à l’emploi, en s’appuyant sur les propositions des 17 organisations* engagées sur ce sujet. "Nous avons démontré qu’il est possible d’éradiquer la privation durable d’emploi", a affirmé Laurent Grandguillaume, président de l’association TZCLD, lors d’une conférence de presse organisée ce 25 mars 2025.
À l’issue d’une concertation ayant mobilisé un millier de personnes – publics concernés, associations, collectivités, État… - dans le cadre de cinq conférences territoriales, les 17 réseaux rappellent que plus de 2 millions de personnes étaient au chômage depuis plus d’un an fin 2024 (soit 43% de l’ensemble des chômeurs) alors que le nombre d’emplois vacants serait de l’ordre de 500.000. Ils invoquent le préambule de la Constitution qui fixe "un horizon commun" : "Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi."
Pour que ce droit à l’emploi soit effectif, "notre pays doit se mobiliser et innover", soutiennent ces organisations, faisant valoir les bénéfices sociaux et économiques qu’entraînerait une réduction significative du chômage de longue durée. Elles appellent à développer "une pluralité de réponses, de solutions qui soient à la hauteur du nombre de personnes qui sont privées durablement d’emploi", explique Nathalie Latour, déléguée générale de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), citant les structures de l’insertion par l’activité économique (SIAO), l’emploi adapté et les entreprises à but d’emploi (EBE) de l’expérimentation territoires zéro chômeur de longue durée. Ce droit à l’emploi ne serait pas "opposable", comme le droit au logement opposable (Dalo), les acteurs de cette mobilisation préférant insister sur les conditions d’"effectivité" de ce droit.
Des convergences à construire avec le Réseau pour l’emploi
"Le droit à l’emploi s’adresse à toute personne volontaire et en droit d’occuper un emploi en France, sans distinction d’aucune sorte", écrivent les organisations à l’article 1 de leur proposition. Le premier volet du principe constitutionnel, celui du "devoir de travailler", n’est donc pas retenu. La démarche doit être "volontaire", sans "injonction" ou méthode "coercitive", indique Pascale Ribes, présidente d’APF France Handicap, sans toutefois évoquer les sanctions associées aux 15 heures d’activité prévues dans la réforme du revenu de solidarité active (RSA). Membre de cette coalition pour le droit à l’emploi, ATD Quart monde lancera ce 26 mars 2025 une pétition pour s’opposer à la publication prochaine du décret sur ces sanctions.
Collectivement, les 17 organisations préfèrent insister sur les aspects consensuels du droit à l’emploi et sur les convergences avec le Réseau pour l’emploi issu de la loi Plein Emploi, qui se met actuellement en place. "La lutte contre le chômage de longue durée, c’est d’abord une affaire de coopération et d’engagement", insiste François Nogué, président du fonds ETCLD, suggérant la création d’une enceinte centrée sur ces questions dans le cadre du comité national pour l’emploi. Localement, à l’heure de la généralisation du nouveau RSA, "c’est le moment de créer ces conditions de rencontre", ajoute Nathalie Latour, appelant à ne pas laisser "la technostructure s’installer" et à s’appuyer pleinement sur les acteurs de terrain pour "que cette dimension de proximité soit réellement opérationnelle".
"Le financement ne doit pas être un frein à ce droit à l’emploi"
Interrogées sur les moyens nécessaires, les organisations renvoient à l’estimation réalisée par ATD Quart Monde en 2015 : la privation durable d’emploi coûterait chaque année 43 milliards d’euros à la collectivité. "En investissant même un petit pourcentage de ce montant, je suis persuadé qu’on aura un effet bénéfique sur tous les territoires", affirme Laurent Grandguillaume. Concernant l’expérimentation TZCLD, le fonds ETCLD a récemment calculé que les coûts de la démarche étaient couverts à 75% par des économies et recettes nouvelles (voir notre article), sans compter les autres bénéfices induits en termes de santé, cohésion sociale, etc., souligne François Nogué. "Le financement ne doit pas être un frein à ce droit à l’emploi", tranche ce dernier.
Ces propositions seront présentées ce jour au Conseil économique, social et environnemental (Cese), en présence de Stéphane Viry et d’autres parlementaires issus de différents groupes. La démarche a aussi été récemment détaillée devant le président du Sénat. "Nous espérons que Stéphane Viry dépose cette proposition de loi avant l’été", conclut Laurent Grandguillaume, indiquant que ce futur texte sur le droit à l’emploi proposera notamment une suite à l’expérimentation TZCLD.
› Huit nouveaux territoires zéro chômeur de longue durée habilités portent à 83 le nombre de territoires expérimentateursAu Journal officiel du 23 mars 2025, un décret habilite huit nouveaux territoires pour mener l'expérimentation "territoire zéro chômeur de longue durée". Il s’agit de Jaunay-Marigny/Dissay (Vienne), Bottière - Pin Sec et Nantes Est pour le droit à l'emploi (Loire-Atlantique), Rives du Haut Allier (Haute-Loire), Loireauxence (Loire-Atlantique), la communauté de communes de Mimizan (Landes), Rezé (Loire-Atlantique), Grammont-Grenet-Voltaire-Lods (Sotteville-lès-Rouen/Rouen, Seine-Maritime) et Plessé (Loire-Atlantique). Avec eux, "83 territoires font aujourd’hui partie de l’équipe expérimentale", selon l’association TZCLD qui rappelle que "la période de candidatures est clôturée depuis juin 2024". Référence : décret n° 2025-262 du 21 mars 2025 habilitant de nouveaux territoires pour mener l'expérimentation "territoire zéro chômeur de longue durée", publié au Journal officiel du 23 mars 2025. |
* Les 17 organisations sont L’Association nationale des directeurs et cadres d’Esat (Andicat), APF France handicap, ATD Quart Monde, CCSC-VLC (Vaincre le chômage), Coorace, Emmaüs France, Fondation pour l’inclusion (Face), le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée (ETCLD), ESS France, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), Hosmoz, le Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP), le Pacte civique, le Secours catholique - Caritas France, Solidarités nouvelles face au chômage (SNC), l’association Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD) et l’Unapei.