Une facture d'eau en hausse de plus de 10% en moyenne depuis 10 ans en France
Selon une enquête de 60 Millions de consommateurs portant sur 130 communes, la facture d'eau a gagné 10,7% en moyenne depuis dix ans, avec des écarts allant du simple au quintuple selon les villes. Mais la France reste l'un des pays européens où le prix de l'eau est le moins élevé.
Le prix de l'eau en France a augmenté de 10,7% en moyenne depuis dix ans, selon une enquête de 60 Millions de consommateurs publiée ce 25 mars, portant sur 130 communes. De 2011 à 2020, la croissance moyenne du prix de l'eau a dépassé le rythme de l'inflation hors tabac. Selon les cas, les prix ont flambé, quand d'autres régressaient.
Fortes hausses dans les villes moyennes
Aujourd'hui le prix moyen du mètre cube d'eau est de 4 euros. Mais les factures présentent des disparités, allant de 1,45 euro/m3 à Antibes à 8 euros à Mamoudzou (Mayotte). Il est de 5,80 euros/m3 à Saint-Brieuc (+71% en dix ans), 2,67 à Bourg-en-Bresse, 3 à Reims ou Aix-en-Provence, 3,42 à Paris. Les plus fortes hausses concernent des villes moyennes : Pau (+43%, à 4,27 euros), Annecy ou Bar-Le-Duc (+38%, à 4,13 et 4,54), Chartres (+34% à 4,96)... La municipalité d'Antibes explique, elle, avoir renégocié en forte baisse (-60%) son vieux contrat avec Veolia.
Globalement, la facture porte pour environ 40% sur la distribution d'eau potable, pour 40% sur l'assainissement et les 20% restants sont des taxes et redevances. Ces dernières années, le coût du traitement des eaux usées a crû sous l'effet de normes environnementales plus strictes et, souvent, d'un retard à rattraper sur l'installation d'équipements (stations d'épuration). Autre facteur de hausse, le relèvement de la TVA sur l'assainissement, passée de 5,5% à 7% en 2012. La TVA sur la distribution de l'eau est, elle, restée à 5,5%. "On pourrait souhaiter un retour au seul taux réduit pour l'ensemble de la facture d'eau", souligne 60 Millions de consommateurs.
Gestion publique : "pas de recette miracle"
S'interrogeant sur les conséquences en termes de prix des deux modèles - régie ou délégation de service public -, l'étude constate que le passage en gestion publique dans plusieurs villes n'a pas fait baisser l'addition. Au contraire, à Paris mais surtout à Rennes ou à Grenoble, les prix ont monté : de ce point de vue, "le retour dans le giron public n'est pas une recette miracle", note le mensuel de l'Institut national de la consommation (INC), qui explique avoir sollicité préfectures, grandes villes et services de l'eau pour cette étude.
La disponibilité de la ressource aquatique pèse aussi sur le prix. Environ 65% du territoire profite de nappes souterraines, bien moins coûteuses à exploiter que lorsqu'il s'agit de recourir à des eaux de rivières ou de surface, qu'il faut traiter. Mais le réchauffement du climat promet des difficultés supplémentaires.
Lourds investissements à venir dans les infrastructures
"Il y aura encore beaucoup de progrès à faire dans l'assainissement, et plus encore avec le changement climatique", tant pour son impact sur la ressource que sur les possibilités de rejet, a déclaré à l'AFP Tristan Mathieu, délégué général de la Fédération des entreprises de l'eau (FP2E). La FP2E s'est félicitée jeudi de cet exercice de transparence sur les prix régulièrement mené par 60 Millions de consommateurs.
"Un des défis à venir sera la maîtrise de la facture d'eau, car les services publics de l'eau ont besoin de réinvestir lourdement dans les infrastructures", prévient Tristan Mathieu. Environ 6 milliards d'euros sont investis chaque année en France sur l'eau et l'assainissement, mais de l'avis des Assises de l'eau, l'état du réseau, vieillissant, nécessiterait 9 milliards d'euros. De nouvelles normes aussi se profilent, telles que la directive de l'UE sur la qualité de l'eau potable, prise en décembre et qui enrichit la liste de polluants à surveiller. Face à ces besoins à prévoir, les entreprises de l'eau appellent l'Etat à se retenir de "piocher dans les factures d'eau pour financer autre chose que l'eau", souligne Tristan Mathieu.
A ce stade, la France reste toutefois un des pays européens où l'eau est la moins chère, avec ses 4 euros/m3 en moyenne contre 5,21 euros en Allemagne et 6,61 euros au Danemark, selon des chiffres 2017 de l'Office international de l'eau.