Commande publique - Un soumissionnaire unique pour un marché passé sans publicité ni mise en concurrence...
Dans un arrêt du 28 janvier 2013, le Conseil d'Etat se prononce sur le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique et d'égalité de traitement des candidats, donnant raison au département du Rhône dans l'affaire de l'achat de places pour les matchs de l'Olympique lyonnais. Plus précisément, il annule un arrêt de la cour administrative d'appel (CAA) de Lyon selon lequel le conseil général du Rhône ne pouvait acheter des prestations à l'Olympique lyonnais sans procéder à une mise en concurrence.
Le département du Rhône avait lancé des consultations en vue de passer des marchés à bons de commande pour des abonnements, places et "pass" permettant d'assister aux matchs de l'Olympique lyonnais. L'association des contribuables actifs du Lyonnais (CanolL) a saisi le tribunal pour l'annulation des délibérations par lesquelles la commission permanente du conseil général du Rhône avait lancé les consultations. Le tribunal ayant rejeté sa demande, la Canol saisit la cour administrative d'appel qui annule ces délibérations "au motif que l'achat de ce type de prestations ne pouvait se faire sans mise en concurrence entre les prestataires du secteur" (sur cet arrêt de la CAA, voir ci-contre notre article du 5 janvier 2012).
Suite au pourvoi du département, le Conseil d'Etat annule l'arrêt de la cour d'appel et tient le raisonnement suivant :
Oui, les contrats en cause étaient des marchés publics
Les juges de la Haute Cour se prononcent sur la nature des contrats dont l'objet était principalement l'achat de places pour valoriser l'activité sportive auprès des collégiens et des jeunes en difficulté du département et encourager l'encadrement bénévole de cette activité. Cet objet répond donc "à une mission d'intérêt général" dont le département a la charge conformément à l'article L.100-2 du Code du sport qui donne aux collectivités la possibilité de participer à la promotion et au développement des activités physiques et sportives. Afin de promouvoir cette activité, l'article L.113-3 du Code du sport permet aux collectivités territoriales de passer des contrats de prestations de services avec les sociétés sportives, permettant l'acquisition de places pour des rencontres sportives. De cette analyse, le Conseil d'Etat conclut que les marchés en cause répondent aux besoins du département du Rhône et qu'il s'agit bien de marchés publics au sens de l'article 1 du CMP. Cet article dispose que "les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, fournitures et services." Il est intéressant de noter que le pouvoir adjudicateur avait respecté la procédure en déterminant la nature et l'étendue des besoins à satisfaire conformément à l'article 5 CMP.
Lancer une procédure d'achat alors qu'un seul candidat peut y répondre : oui c'est possible
L'article 28 CMP permet de conclure des marchés à procédure adaptée en dérogeant aux règles de publicité et de mise en concurrence notamment quand l'objet du marché le justifie. En l'espèce, l'analyse des délibérations litigieuses montre que l'objet des marchés était l'achat de billets pour participer aux matchs de l'Olympique lyonnais et non pas de faciliter l'accès au spectacle sportif, promouvoir l'activité sportive et encourager son encadrement bénévole. Dans la mesure où le Club de football de l'Olympique lyonnais était le seul distributeur des billets, le département a légalement décidé que les marchés seraient passés sans publicité ni mise en concurrence.
Par cette décision, le Conseil d'Etat entérine la possibilité de lancer un marché public alors qu'un seul candidat peut y soumissionner.
Référence : CE 28 janvier 2013, n° 356670