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Sylviculture - Un rapport propose la création d'un "label qualité" pour la forêt française

Les différents plans lancés depuis 2013 pour redresser la filière bois "n'ont pas révolutionné la situation". "Le travail de convergence entre l'amont et l'aval est encore loin d'être réalisé", estime la députée PS de la Gironde Pascale Got, co-auteur avec son homologue Damien Abad (LR, Ain) d'un énième rapport sur le sujet, "Pour une meilleure valorisation économique de la filière bois-forêt en France", présenté le 14 octobre. Les deux parlementaires demandent un "changement de braquet". "On a une perspective d'action et de mise en œuvre législative", explique Damien Abad, avec le projet de loi de finance rectificative et "la clause de revoyure de la loi d'orientation agricole", sans parler de la COP 21, où la question de la forêt sera en première ligne.

Un label qualité

Les rapporteurs se placent avant tout sous l'angle économique, et non patrimonial, sachant que la filière bois-forêt a encore subi un déficit commercial de 5,6 milliards d'euros en 2014. Ils en appellent au "patriotisme économique" avec la création d'un label "qualité France" qui permettrait par exemple de valoriser les bois certifiés. Ce label serait "un levier utile de compétitivité hors prix à l'international, et permettrait d'unifier la filière autour d'une bannière commune", considèrent-ils. Un besoin d'unification d'autant plus criant que l'aval et l'amont de la filière continuent de se tourner le dos.
En amont, le rapport pointe avant tout les fortes disparités géographiques et le morcellement "qui favorisent la sous-exploitation du bois". 3,5 millions de propriétaires forestiers se partagent 75% des forêts françaises, rappelle-t-il. En aval, ce sont les piètres performances des industries de première transformation, principalement les scieries, qui constituent le "maillon faible". "Elles n'ont pas la taille critique pour débiter de gros volumes de grumes", résume Damien Abad. Peu compétitives, ces industries font aussi les frais d'une double concurrence interne et externe, avec, d'une part, le dumping social de l'industrie allemande qui, comme en matière agricole, a fortement recours à des travailleurs détachés, et, d'autre part, la concurrence de pays émergents. Forte demandeuse des grumes françaises, la Chine "applique des droits douaniers sur les importations de biens issus de la transformation du bois (…) jusqu'à 100% pour un produit issus de l'ameublement". Pendant ce temps, Bruxelles regarde les grumes passer et n'applique aucun droit de douane sur les importations de produits du bois… 

Délégué interministériel

Les députés réclament la création d'un délégué interministériel sachant que ce domaine est aujourd'hui de la compétence d'au moins trois ministères (Agriculture, Economie, Développement durable) aux approches parfois contradictoires. Ce délégué permettrait de "montrer un seul visage aux acteurs de la filière". A l'échelon local, "la régionalisation d'un certain nombre d'actions irait dans le bons sens", estime Damien Abad.
Dans la perspective du PLFR, les députés envisagent des amendements pour réorienter les incitations fiscales "dans un sens plus gestionnaire et moins patrimonial", et ce afin d'encourager "une gestion plus productive des exploitations" et d'éviter les bois dormants. Leur proposition : conditionner l'abattement de 75% de la valeur de la forêt pour les propriétaires forestiers assujettis à l'ISF à une exploitation économique effective de leur forêt… Ils souhaitent aussi encourager le regroupement des parcelles (en étendant le dispositif d'exonération sur les droits de mutation à titre gratuit aux droits à titre onéreux) et celui des propriétaires au sein d'organisations de producteurs. En contrepartie de certaines obligations (comme la vente d'au moins 50% des volumes récoltés par voie de contrats d'approvisionnement avec les industries de l'aval), ces organisations bénéficient aujourd'hui de déductions fiscales au titre des Defi (dispositifs d'encouragement fiscal à l'investissement en forêt). Ces Defi étant amenés à s'éteindre en 2017, les rapporteurs demandent leur prolongation jusqu'en 2020 et d'en augmenter les incitations. Au passage, ils écornent les groupements d'intérêt économique et environnemental forestier (Gieef) instaurés par la loi du 13 octobre 2014 pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. "Nous avons des réserves sur l'efficacité du dispositif, il ne met en place que des contraintes administratives, nous attendons la mise en œuvre d'incitations fiscales", fait savoir Pascale Got.
Enfin le rapport met l'accent sur la formation, avec le souci de rendre plus attractive cette filière auprès des jeunes.
En trente ans, 250 rapports ont été produits sur le sujet, dont 50 depuis 2006, rappellent les députés. Voilà au moins une forme indirecte de soutien à la papeterie française.