Logement en Ile-de-France - Un article 55 "bis" de la loi SRU pour l'ensemble des constructions ?
Les états généraux du logement en Ile-de-France ont rendu le 13 mai leurs propositions qui, selon la ministre du Logement, Christine Boutin, "seront en très grande partie reprises par le projet de loi" de mobilisation pour le logement, annoncé pour un prochain Conseil des ministres courant juin. Les quatre groupes de travail mis en place en novembre dernier (qui, au delà du comité de pilotage réunissant des représentants de l'Etat, de la région, des départements, des maires et des organisations professionnelles, ont associé tous les acteurs de la chaîne de production de logements) se sont accordés pour mettre en avant la nécessaire territorialisation des objectifs de construction : pour atteindre les 60.000 logements par an, quelle que soit la catégorie de l'habitat, les maires devront remplir des objectifs définis en concertation avec l'Etat, la région et les départements, puis proposés par le préfet de région au comité régional de l'habitat. Les préfets auront ensuite la charge de vérifier que les documents de planification - programme local de l'habitat, plan local d'urbanisme ou Scot - serviront ces nouvelles ambitions.
Pour les rédacteurs de cette proposition, la démonstration est simple : alors que l'article 55 de la loi SRU impose un nombre de logements sociaux par rapport à un stock existant, la nouvelle règle imposerait aux élus de construire des logements. Il leur suffisait en effet jusqu'ici de ne pas donner de nouveaux permis de construire pour ne pas avoir à augmenter le nombre des logements sociaux. Dans le cas où une commune ne suivrait pas ces nouvelles directives, le préfet, s'inspirant du dispositif de l'article 55 de la loi SRU, pourrait prévoir des pénalités et se substituer aux élus récalcitrants pour préemption du foncier.
Et les logements sociaux ?
Favorable à la territorialisation, le président de la région Ile-de-France, Jean-Paul Huchon, a en revanche dénoncé la proposition visant à supprimer les droits de mutation. "Il n'est pas question de supprimer tous les droits de mutation, a renchéri Christine Boutin, mais de supprimer ceux qui sont strictement liés à une nécessaire mobilité professionnelle. Les gens doivent pouvoir revendre leur logement sans être pénalisés pour aller travailler dans un autre département."
Reste à savoir si le nouveau dispositif de territorialisation gagnera en efficacité par rapport à celui de la loi SRU, qui fait débat depuis des années, et si son impact sera suffisant pour répondre à la forte carence en logements sociaux. Les acteurs du logement social, comme le mouvement HLM, devraient en tout cas être déçus de ne pas retrouver dans les propositions des états généraux du logement en Ile-de-France un plan d'urgence spécifique (voir article de Localtis : L'Ile-de-France va-t-elle bénéficier d'un régime d'exception ?, 15 novembre 2007).
Pour jouer pleinement son rôle de planification, le programme local de l'habitat (PLH) sera renforcé : les communes isolées de plus de 15.000 ou 20.000 habitants situées en zone centrale auront l'obligation de boucler un PLH. Ce dernier devra aussi trouver sa place dans les plans locaux d'urbanisme (PLU) avec, à la clef, de nouvelles évolutions législatives : respect du délai de mise en conformité du PLU et droit de regard des EPCI.
Les états généraux du logement en Ile-de-France n'ont pas négligé une problématique forte dans cette région : l'immobilier de bureaux, en prônant le renforcement des outils existants tels que les conventions d'équilibre habitat/activité. Des conventions intercommunales pour les EPCI ayant la compétence aménagement et logement devraient devenir obligatoires.
En parallèle, la nécessité d'aider financièrement les maires bâtisseurs est mise en avant, en utilisant les outils existants : dotation générale d'équipement, dotation globale de fonctionnement et fonds de solidarité entre les communes de la région Ile-de-France.
Un outil spécifique pour l'accession à la propriété
Dans la mesure où "le logement n'est pas un produit hors sol", de nouvelles réserves foncières et la délimitation de nouvelles zones d'aménagement différé devront voir le jour. Pour le groupe de travail ciblé sur le foncier, les outils existent mais des efforts de pédagogie auprès des élus restent à faire.
Pour fluidifier le marché, les efforts devront être faits sur différents produits comme les résidences et le logement familial. Les rédacteurs proposent la mise en place d'un outil spécifique à l'accession sociale à la propriété ciblée sur les classes moyennes (conditions de ressources, prix de vente encadrés, TVA à 5,5%, etc.). Dans cette optique, Christine Boutin a rappelé son intention de proposer à nouveau au Parlement l'utilisation du pass-foncier sur le logement collectif.
Agnès de Fleurieu, présidente de la section "droit, logement et société" du conseil général des Ponts et Chaussées et présidente du groupe de travail ciblé sur l'hébergement, s'est attachée à promouvoir la mobilisation de l'ensemble des contingents (Etat, communes et 1% logement). "L'application de la loi Dalo ne peut pas seulement s'appuyer sur le contingent préfectoral", a confirmé Christine Boutin. Elle a demandé que la location en meublé soit ouverte aux organismes HLM et aux Sem et s'est déclarée favorable à la création de produits spécifiques, "innovants et adaptés" pour du logement transitoire "car il n'est pas possible, aujourd'hui, d'imaginer leur disparition totale". Enfin, la généralisation d'une formule d'intermédiation locative (sous-location par des associations) serait de nature à fluidifier l'offre de logements.
Clémence Villedieu
Trois propositions du conseil régional d'Ile-de-France
- La création d'un Slif (syndicat du logement en Ile-de-France) pour mieux organiser la chaîne de production ;
- l'instauration d'un plan d'urgence pour le logement social ;
- le triplement des sanctions pour non-respect de la loi SRU.