Tri à la source des déchets : un décret acte le passage aux "sept flux"
Un décret de la loi Agec, paru ce 18 juillet, renforce l’obligation de tri "cinq flux" pour les professionnels en l’étendant pour les déchets de construction et de démolition au plâtre et fractions minérales. En 2025, les déchets textiles seront eux aussi concernés par l’obligation de tri à la source et de collecte séparée. Côté emballages ménagers, la phase 4 du plan de performance des territoires mené par Citeo pour accompagner les collectivités qui souhaitent étendre leurs consignes de tri vient de débuter. 103 collectivités ont été retenues à l'issue d'un nouvel à projets, portant à 35 millions le nombre d'habitants pouvant trier leurs déchets d'emballages de manière effective.
Un décret, publié ce 18 juillet, modifie les dispositions réglementaires relatives aux conditions de tri à la source et de collecte séparée des déchets non dangereux des activités économiques conformément à l'article 74 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec). Ce faisant il permet de transposer les obligations de tri prévues par les articles 10 et 11 de la directive 2008/98/CE relative aux déchets modifiée par la directive (UE) 2018/851. Pour les déchets de construction et démolition, le texte ajoute ainsi aux "cinq flux" (papier, métal, plastique, verre et bois) - en vigueur depuis 2016 suite au décret n° 2016-288 du 10 mars 2016 - deux nouveaux flux ("sept flux") à trier séparément, à savoir des déchets de fraction minérale (gravats, béton, brique, tuile, ardoise, céramiques…) et de plâtre. L’obligation de tri des déchets de textile étant quant à elle prévue à partir du 1er janvier 2025.
Outre les ménages qui en sont exclus, ces dispositions ne sont pas applicables aux communes et leurs groupements compétents pour la gestion des déchets, ainsi qu'aux exploitants des établissements recevant du public "uniquement pour les déchets du public reçu dans leur établissement". Le décret concerne les producteurs et détenteurs de déchets qu’ils n’aient pas recours au service public de gestion des déchets ou qu’ils y aient recours, sous réserve pour ces derniers, qu’ils produisent ou prennent possession de plus de 1.100 litres de déchets par semaine, et ce "tous déchets confondus", ajoute le décret.
Dérogations trop encadrées
Le texte modifie par rapport au décret de 2016 la possibilité de collecter en mélange tout ou partie des six flux (papier/cartons, plastiques, métaux, verre, bois, fractions minérales, hors plâtre). La conservation en mélange ne doit pas affecter "leur capacité à faire l'objet d'une préparation en vue de leur réutilisation, d'un recyclage ou d'autres opérations de valorisation", précise-t-il. La collecte conjointe est possible si et seulement si "elle présente une efficacité comparable à celle obtenue au moyen d’une collecte séparée".
Consulté pour avis sur le projet de texte, le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE) avait porté un regard très critique sur cet encadrement très restrictif des dérogations, alertant sur les lourdes contraintes pour la filière du BTP. Les chantiers en zones urbaines denses entraînent, par exemple, un manque de place disponible à proximité de la zone de travaux pour trier les déchets séparément par flux, plusieurs bennes ne pouvant être installées. C’est également le cas dans les zones dont les documents d’urbanisme interdisent ou limitent le stockage temporaire de déchets, compliquant l’obtention des autorisations de voiries pour stocker les bennes. Pour pallier ces difficultés, le texte prévoit des aménagements supplémentaires par rapport à la version initiale. Tout d’abord s’il n'est pas possible d'affecter, sur l'emprise du chantier, une surface au moins égale à 40 m2 pour le stockage des déchets. Ou bien dans l’hypothèse où le volume total de déchets généré sur l'ensemble de la durée du chantier, tous déchets confondus, est inférieur à 10 m3.
Réalisation d’un audit
Autre nouveauté : le préfet de département ou l'autorité administrative compétente (le maire) pourront désormais déclencher la réalisation d'un audit par un tiers indépendant, en vue d'attester du respect des obligations de tri des "sept flux", des biodéchets, et, à compter de 2025, des déchets de textile. Le texte abroge en outre l’interdiction de mélanger des déchets de papier, de métal, de plastique, de verre et de bois qui ont été triés par leurs producteurs ou détenteurs avec d'autres déchets n'ayant pas fait l'objet d'un même type de tri, qui figurait à l’article D. 543-283 du code de l’environnement. Enfin, le décret précise que les obligations de tri à la source et de collecte séparée des déchets de papier sont applicables à tous les producteurs et détenteurs de papier de bureau, sur chacune de leurs implantations regroupant plus de 20 personnes.
Mise en consultation de la REP "bâtiment"
La promulgation de la loi Agec doit entraîner un autre changement majeur pour le secteur du bâtiment avec la création en 2022 d’une filière dédiée de responsabilité élargie du producteur (REP) pour les produits et les matériaux de construction. Le ministère de la Transition écologique a mis en consultation jusqu’au 26 juillet prochain le décret d’application y afférent. L’enjeu est d’éviter les dépôts sauvages, ce qui passe notamment par la densification du maillage des points de collecte. Le CSCEE en fait d’ailleurs "une priorité", avant la mise en œuvre progressive d’autres exigences dans la gestion et le tri des déchets. Le taux de valorisation des déchets du bâtiment est estimé à près de 70%, selon le ministère, avec une certaine hétérogénéité selon la situation des différents flux. En particulier, les déchets inertes sont en majorité envoyés en remblaiement de carrière, et leur recyclage matière représente 30%. Les déchets non dangereux du bâtiment sont quant à eux valorisés à 25%, dont 15% de recyclage et 10% de valorisation énergétique.
Référence : décret n° 2021-950 du 16 juillet 2021 relatif au tri des déchets de papier, de métal, de plastique, de verre, de textiles, de bois, de fraction minérale et de plâtre, JO du 18 juillet 2021, texte n° 4. |
Citeo a annoncé ce 15 juillet le lancement de la phase 4 de son plan de performance des territoires, dotée de plus de 29 millions d'euros, afin d'accompagner les collectivités locales qui souhaitent étendre leurs consignes de tri à tous les emballages ménagers. L'objectif est de simplifier le geste de tri des habitants, d'accroître la collecte et d'accélérer les performances de recyclage, rappelle l'éco-organisme dans un communiqué. Au total, 190 millions d'euros sont engagés dans le cadre de ce plan via cinq appels à projets successifs jusqu'en 2022. À l'issue des trois premiers appels à projets (avril 2018, juillet et décembre 2019), plus de 50% de la population était en mesure de trier tous ses emballages ménagers. Après le quatrième appel à projets qui a conduit à sélectionner 103 collectivités, 7,3 millions d'habitants supplémentaires vont pouvoir trier tous leurs emballages de manière effective dans les mois à venir, portant à 35 millions le nombre de personnes bénéficiant de la simplification du geste de tri, Citeo finançant le recyclage des emballages en plastique à hauteur de 660 euros/t. Anne Lenormand / Localtis |