Traitement des déchets : le Sénat adopte la proposition de loi pour prévenir les risques d’accidents liés aux piles au lithium et aux cartouches de protoxyde d’azote
Le Sénat a adopté ce 6 mars en séance la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre le risque incendie lié aux batteries au lithium et aux cartouches de protoxyde d'azote dans les installations de collecte, de tri et de recyclage des déchets. Il a voté au cours de la même séance un autre texte pour pénaliser "l'usage détourné" du protoxyde d'azote ou gaz "hilarant", refusant néanmoins d'en interdire la vente aux particuliers.

© Captures vidéo Sénat/ François Longeot, Jocelyne Antoine, Cyril Pellevat et Agnès Pannier-Runacher
Comme en commission le 19 février (lire notre article), le Sénat a adopté à l’unanimité ce 6 mars, en première lecture, la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre le risque incendie lié aux batteries au lithium et aux cartouches de protoxyde d'azote dans les installations de collecte, de tri et de recyclage, présentée par Jean-François Longeot (UC, Doubs) et Cyril Pellevat (LR, Haute-Savoie). Ce texte, qui a reçu le soutien du gouvernement, vise à améliorer la prévention des accidents dans les installations de traitement de déchets, liés aux erreurs de tri des batteries en lithium et des cartouches de protoxyde.
Campagnes de communication relevant des cahiers des charges des filières REP
Il prévoit notamment de permettre aux éco-organismes, dans le cadre de leur mission de prévention, de prendre en charge la prévention et la sensibilisation aux bonnes pratiques de tri permettant de limiter les risques d'incendie liés aux batteries en lithium (art. 1er). "Des campagnes de communication à destination du public et des professionnels sont indispensables", a déclaré la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, approuvant l’approche préventive choisie par les sénateurs. "Je souhaite qu'elles soient obligatoirement intégrées dans les cahiers des charges des filières REP de batteries et équipements électriques électroniques", a-t-elle souligné. Les sénateurs ont adopté l’amendement du gouvernement allant dans ce sens : les obligations relatives aux campagnes de communication ou de sensibilisation sont définies dans les arrêtés du ministre chargé de l'environnement portant cahiers des charges de chacune des filières à responsabilité élargie des producteurs, et non au niveau d’un décret, souligne l'exposé des motifs.
Financement des équipements de prévention des incendies par les producteurs
Contre l’avis du gouvernement et de la rapporteure du texte, Jocelyne Antoine, les sénateurs ont adopté un amendement de Cyril Pellevat à l’article 2 précisant que la contribution des metteurs sur le marché au financement de la prévention passe notamment par le financement des équipements de prévention des incendies. En outre, l’amendement prévoit qu’un texte réglementaire fixe les modalités de la prévention ainsi que sa répartition.
En revanche, ils ont rejeté un amendement défendu par le sénateur de la Gironde Hervé Gillé et ses collègues du groupe Socialiste, écologiste et républicain (SER) et soutenu par Amorce visant à rétablir, à l’article 2, le principe d'une indemnisation des collectivités gestionnaires d'installations de traitement de déchets en cas de dommage causé par des batteries au lithium ou des cartouches de protoxyde d'azote. Mais la rapporteure a estimé que la prise en charge proposée - il s’agissait de prévoir dans les cahiers des charges des éco-organismes que les éco-contributions qui leur sont versées puissent financer la réparation de ces dommages - était "contraire à la directive-cadre sur les déchets" et "déresponsabiliserait les opérateurs". Agnès Pannier-Runacher s’est rangée à l’avis de la rapporteure, ajoutant que les filières REP "n'ont pas vocation à se substituer aux assureurs".
Pénalisation de l'usage détourné du protoxyde d'azote
Les sénateurs ont également adopté en séance ce 6 mars une proposition de loi pour pénaliser "l'usage détourné" du protoxyde d'azote ou "gaz hilarant". Utilisé pour les siphons à crème chantilly, ou encore des usages médicaux, ce gaz devient dangereux lorsqu'il est détourné pour ses effets euphorisants ou récréatifs. En cas d'inhalation, il peut entraîner des risques d'asphyxie, des brûlures voire des troubles neurologiques plus sévères. Le texte du sénateur Ahmed Laouedj (Parti radical de gauche) entend combler les "lacunes" d'une loi de mai 2021 qui interdit la vente de protoxyde d'azote aux mineurs et sa commercialisation dans les débits de boissons et tabacs.
L'une des mesures centrales du texte, soutenue par le ministre de la Santé Yannick Neuder, est la création d'une nouvelle infraction pour l'usage détourné de protoxyde d'azote, sanctionnée d'une amende de 450 euros. Mais cette contravention pour l'usage n'a pas convaincu le groupe écologiste, qui l'a jugée "contreproductive": "Nous privilégions une option mieux-disante, il faudrait tout simplement interdire la vente de protoxyde d'azote aux particuliers", a plaidé la sénatrice de Paris Anne Souyris. Les groupes socialiste et communiste ont soutenu cette proposition, et le gouvernement ne s'y est pas opposé.
Déjà adoptée à l'Assemblée nationale fin janvier dans une autre proposition de loi, cette mesure a néanmoins été rejetée par la chambre haute, cette dernière préférant plutôt poursuivre "une stratégie de lutte contre les mésusages seuls et non contre le protoxyde d'azote lui-même", comme l'a expliqué la rapporteure Maryse Carrère (Parti radical de gauche). "Nous aurions souhaité que ce produit soit réservé aux professionnels, mais son usage demeure aujourd'hui utile dans certains secteurs, en particulier l'agro-alimentaire", a regretté le sénateur LR Khalifé Khalifé.
La Haute Assemblée s'est tout de même positionnée pour une interdiction de la vente aux particuliers la nuit, entre 22 heures et 8 heures du matin. Jeter sur la voie publique des cartouches ou bonbonnes serait par ailleurs sanctionné d'une amende de 1.500 euros, et le niveau de sanction prévu en cas d'infraction aux interdictions de vente aux mineurs a aussi été relevé.