Trafic de drogue : plus de 1.000 points de deal démantelés en deux ans
Les saisies de drogues ont atteint "des niveaux historiques" en 2022, selon un rapport de l'Ofast, publié le 1er mars. Par ailleurs, le nombre de points de deal a diminué de 22% en deux ans, passant de 4.034 à 3.159.
En deux ans, le nombre de points de deal est passé de 4.034 à 3.159, soit une diminution de 22%, indique le bilan publié par l’Office anti-stupéfiants (Ofast), mercredi 1er mars. L’organisme interministériel créé début 2020 "répond à la volonté de mieux organiser et structurer la lutte contre le trafic de stupéfiants", peut-on lire dans ce bilan. Il repose sur un réseau de 191 agents au niveau central (qui devraient passer à 230 d’ici à 2027 dans le cadre de la Lopmi) et de 475 agents au niveau territorial.
En 2022, près de 15.160 opérations de démantèlement de points de deal ont été menées contre 5.849 en 2021. Ce qui représente une progression de 159% sur un an. "La lutte contre le trafic de drogue est plus que jamais la mère de toutes les batailles", a martelé Gérald Darmanin lors d'une conférence de presse organisée aux côtés des ministres de la Justice Eric Dupond-Moretti et des Comptes publics Gabriel Attal, pour commenter ces résultats. Environ 2.000 opérations sont menées chaque mois, a précisé Gérald Darmanin, avec un record à Marseille où "un point de deal est harcelé" toutes les heures.
Les saisies de drogues ont atteint des "niveaux historiques", se félicite l’Ofast, avec 156,7 tonnes, dont 128,6 tonnes de cannabis (+15%) et 27,7 tonnes de cocaïne (+5%). Les trois quarts de saisies de cocaïne sont réalisées "par voie maritime" et 55% des saisies proviennent des Antilles et de la Guyane, "zones de stockage et de rebond de la cocaïne produite en Amérique du Sud".
Le Havre, "point d'entrée" de la drogue en France
"Nous allons tripler les effectifs d’officiers de police judiciaire qui dépendent du ministère de l’Intérieur au port du Havre dans la cellule spécifique de lutte contre l’importation de cocaïne, mais aussi de lutte contre les règlements de comptes et la corruption qui touche bien souvent le port du Havre", a déclaré Gérald Darmanin. Le port normand est "le point d'entrée de la drogue dans notre pays", a-t-il insisté. Le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a indiqué de son côté que, le 19 février, la douane a réalisé "la plus grosse saisie de cocaïne de son histoire, en bloquant 1,9 tonne de ce stupéfiant dans le port du Havre". "Nous devons éviter que ce tsunami blanc fasse irruption sur nos côtes", a-t-il appuyé.
Alors qu’un rapport sénatorial montrait en 2020 que la ligne aérienne Cayenne-Paris est une véritable passoire pour le trafic de cocaïne, Gérald Darmanin s’est voulu rassurant. En octobre 2022, les trois ministres se sont rendus à Cayenne pour demander que 100% des vols vers la métropole fassent l’objet de contrôles, ce qui a permis d’interpeller 170 "mules" et de saisir 285 kg de cocaïne. "Ce n’est qu’une partie émergée de l’iceberg", a reconnu le ministre de l’Intérieur, mais "ces contrôles ont leur effet dissuasif et ont surtout permis d’éviter l’embarquement de mules, les no shows (personnes qui ne se sont pas rendues à l'embarquement, NDLR), il y en a eu 4.258 depuis notre déplacement à Cayenne". De plus, 3.300 arrêtés d’interdiction d’embarquement ont été pris par le préfet. Ces contrôles sont réalisés par des scanners millimétriques, auxquels viendront s’ajouter des scanners corporels au sein de l'aéroport d'Orly. Le discours de fermeté du ministre tranche avec les récentes instructions du procureur de la République de Cayenne, prévoyant une procédure simplifiée : jusqu'à 1,5 kg de cocaïne, les mules bénéficient d'un classement sous condition avec interdiction de paraître à l’aéroport pendant six mois (voir notre article).
"Pas de consommateurs, pas de trafiquants"
Le bilan fait enfin état de la saisie d’1,4 tonne d'héroïne (+8%) et de 273 kg de drogues de synthèse (+21%). L’Ofast alerte sur la consommation croissante de nouveaux produits de synthèse comme la "3-MMC" qui a récemment fait parler d’elle dans l’affaire Palmade. "Jusqu’à maintenant réservée à des cercles très restreints", elle "se démocratise à un public plus large notamment dans les univers festifs". "La 3-MMC est un produit très addictif qui provoque des états délirants et dépressifs ainsi que des complications somatiques", précise l’Ofast qui s’inquiète aussi de l’essor de la "cocaïne rose" (2-CB).
Les membres du gouvernement entendent aussi intensifier la lutte contre la consommation. "Pas de consommateurs, pas de trafiquants", a résumé Eric Dupond-Moretti, regrettant que le sujet se limite trop souvent aux questions de santé publique.
En un an, le nombre d’amendes forfaitaires délictuelles (AFD), créées pour sanctionner les consommateurs, a ainsi augmenté de 34%, passant de 106.476 en 2021 à 143.447. "Depuis sa création, ce sont plus de 298.000 AFD qui ont été dressées par les forces de l’ordre dont 288.000 AFD cannabis, 8.400 AFD cocaïne et 1.400 AFD ecstasy-MDMA", détaille l’Ofast, qui ne précise pas combien sont réellement recouvrées. Les Bouches-du-Rhône est le département qui enregistre le plus d’AFD en 2022 (19.718), bien loin devant Paris (8.982) ou la Seine-Saint-Denis (6.391).
Par ailleurs, le nombre de mis en cause pour usage de stupéfiants s’est élevé à 249.800 en 2022 (+13%) et celui de trafiquants mis en cause à 37.510 (+4,7%).