Municipales - Tous les candidats ne veulent pas qu'on leur colle une étiquette
Le président de l'Association des maires de France (AMF), Jacques Pélissard, a alerté Manuel Valls sur l'attribution par son ministère d'une "nuance politique" aux candidats aux municipales "qui pose problème aux candidats sans étiquette ou non-inscrits" dans les petites communes.
"Avec l'abaissement du seuil de scrutin de liste de 3.500 à 1.000 habitants (6.659 communes concernées par ce nouveau scrutin), de nouveaux candidats se voient confrontés à la pratique de la 'nuance politique' apposée par les services de l'Etat", souligne Jacques Pélissard dans un courrier adressé le 25 février au ministre de l'Intérieur et rendu public le lendemain (voir lien ci-contre). "Dans bon nombre de petites communes rurales, les candidats s'engagent en faveur de listes d'intérêt local, sans considérations politiques ou partisanes, avec pour seule ambition d'oeuvrer pour le bien commun de leurs territoires et de ses habitants", souligne l'AMF dans un communiqué. "Ces candidats, pour la plupart 'sans étiquette' ne souhaitent pas être classés, à leur insu, dans une catégorie politique", ajoute l'association.
La "nuance politique" attribuée par le ministère de l'Intérieur aux candidats et aux listes est rendue publique lors de la clôture de toutes les candidatures au premier comme au second tour et lors des résultats. Elle est distincte de l'étiquette politique librement choisie par le candidat et la liste.
Dans la liste du ministère de l'Intérieur sont prévues des nuances pour les principaux partis ou purement politiques (Liste Union de la gauche, UMP ou extrême droite par exemple). Pour les autres cas, sont prévues les nuances "DVG", "DVD" ou "DIV" (pour Chasse Pêche Nature Tradition, Parti pirate, parti socioprofessionnel...).
"Dans le cas d'un candidat se déclarant 'sans étiquette' ou de candidats figurant sur une liste regroupant diverses sensibilités, aucune solution ne semble donc exister pour tenir compte de leur volonté", regrette l'AMF, qui demande en conséquence "la création d'une catégorie 'non inscrit' ou 'sans étiquette' afin de ne pas nier cette réalité" (voir liste ci-contre).
Si la question prend une ampleur inédite avec, en effet, la modification des règles du jeu pour les communes comprenant entre 1.000 et 3.500 habitants, elle n'est pas franchement nouvelle. Elle avait ainsi émergé de la même façon il y a deux ans, lors des dernières cantonales. D'aucuns déploraient déjà qu'il ne soit pas possible de se déclarer "non inscrit ou sans étiquette", à l'instar de Jean-Louis Masson, sénateur - non inscrit -, qui avait même déposé une proposition de loi en ce sens (voir notre article du 7 mars 2011).
Quand le logo s'efface...
En mars 2011, on évoquait un regain des candidatures sans étiquette, surtout à droite. "La baisse de la cote de popularité du gouvernement pousserait en effet certains candidats de droite à masquer leur appartenance à la majorité", écrivions-nous également à l'époque...
Cette problématique resurgit naturellement aujourd'hui : de nombreux candidats de gauche comme de droite aux élections municipales hésiteraient à afficher le logo de leur parti sur leur matériel de campagne et certains dissimuleraient même leur appartenance politique au profit de listes et de slogans très locaux.
C'est cette fois le climat politique marqué par l'impopularité de François Hollande qui est en toile de fond. Mais le phénomène vaut de façon générale pour les municipales. Pour Frédéric Sawicki, professeur de science politique à l'université Panthéon-Sorbonne, il y aurait "une stratégie partagée entre le PS et l'UMP pour localiser les enjeux de l'élection". Et ce, même dans les plus grandes villes - à Bordeaux, Brest, Dunkerque, Lyon ou Lille, les logos PS se font discrets sur les affiches... voire n'y figurent pas du tout.
Et puis il y a toutes ces listes multi-partisanes. Comme à Cognac (Charente), où Michel Gourinchas (PS), assure mener une campagne "au-delà des partis politiques". Le matériel de ses militants ne portera le sigle d'aucun des partis de la liste (PS-PRG-EELV).
A l'UMP aussi, certains choisissent aussi de sacrifier l'amour du maillot à ce scrutin local. A Aurillac (Cantal) par exemple, il faut lire la presse pour savoir que Jean-Antoine Moins est investi par l'UMP. S'il propose sur son site internet de "mettre fin à 30 ans de socialisme", le candidat affirme avoir composé "une liste ouverte, avec des gens de droite et de gauche".