Tourisme social : des chèques-vacances sociaux financés par l'Etat et les régions ?
Le secrétaire d'Etat en charge du tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne, a annoncé "travailler avec les régions pour mettre en place des chèques vacances tourisme pour cet été" dans le cadre du plan en faveur du tourisme social. Régions de France a immédiatement tenu à rectifier le tir.
L'idée de chèques vacances pour les ménages modestes fragilisés par la crise sanitaire et économique, cofinancés par l'Etat et les régions, n'aura peut-être pas duré davantage qu'une matinée. Interviewé le 20 mai au matin sur RTL, Jean-Baptiste Lemoyne a en effet affirmé "travailler avec les régions pour mettre en place des chèques vacances tourisme pour cet été".
Une annonce anticipée, mais des contours encore très imprécis
Cette mesure, visant le tiers des Français qui ne partent pas en vacances, pourrait être intégrée au plan en faveur du tourisme social, dont le principe a été annoncé par Édouard Philippe lors de la présentation du très attendu plan Tourisme, le 14 mai (voir notre article ci-dessous du même jour). Pour justifier le décalage temporel avec les autres mesures présentées ce jour-là, le Premier ministre avait alors expliqué qu'une concertation était en cours avec les acteurs du tourisme social.
Pour sa part, le secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, en charge du tourisme a affirmé, sur RTL, que la négociation est en cours avec l'association représentant les régions. Ce qui expliquerait que les modalités de ces chèques vacances "sociaux" restent encore assez imprécises : "Certaines [régions] veulent mettre l'accent sur des publics modestes. D'autres veulent également encourager celles et ceux qui ont été en première et deuxième lignes. Ce sera très adapté aux souhaits des régions", a indiqué Jean-Baptiste Lemoyne. Même chose sur la question du budget : "On est en train d'y travailler. Réponse début juin". En revanche, il a opposé – comme Jean-Baptiste Djebbari, le secrétaire d'Etat aux Transports – une fin de non-recevoir à la proposition de Carole Delga, la présidente de la région Occitanie, qui suggérait d'instaurer la gratuité des autoroutes pour favoriser les départs en vacances.
Régions de France : "L'annonce indigne de Jean-Baptiste Lemoyne"
Changement de ton radical, quelques heures plus tard, avec un communiqué de Régions de France, titré "Chèques vacances : l'annonce indigne de Jean-Baptiste Lemoyne". Les présidents de régions y dénoncent "une méthode d'autant plus détestable que les régions et l'État collaborent activement sur les plans d'urgence et les mesures de soutien à l'économie, et encore récemment sur le plan tourisme annoncé jeudi dernier et dont les régions ont salué l'ambition". Les régions se disent donc "particulièrement choquées d'apprendre par voie de presse l'annonce unilatérale par le secrétaire d'État d'un dispositif national qu'elles seraient amenées à cofinancer" et rappellent que "les régions ne sont pas le tiroir-caisse de l'État".
Régions de France indique que "l'idée de contribuer à la relance du tourisme par un dispositif de chèque vacance est une idée élaborée et financée par quelques régions, et notamment la région Sud qui a été la première à le mettre en place". L'Etat s'est alors montré intéressé, "au point de proposer aux régions volontaires un mécanisme permettant d'en faciliter le déploiement. Des réunions de concertation étaient en cours entre les services à cet effet".
La réaction de Régions de France ne remet cependant pas forcément en cause le projet, mais relève avant tout de la susceptibilité face à une appropriation pour le moins maladroite. En attendant, Régions de France demande "que le secrétaire d'État revienne immédiatement sur cette annonce et poursuive la discussion qui avait été engagée avec les régions volontaires afin que la mesure conserve son caractère régional et différencié, avec les régions qui l'ont initiée, dans le respect de leurs prérogatives".
Des mesures aussi pour les chèques vacances traditionnels
De leur côté, les chèques vacances traditionnels, accordés notamment par certaines entreprises à leurs salariés et valables deux ans, bénéficient également de mesures liées à la crise sanitaire. Dans son interview sur RTL, Jean-Baptiste Lemoyne a ainsi rappelé que "l'Agence nationale pour les chèques vacances a pris l'initiative de prolonger ceux qui venaient à échéance au mois de mars". Il a ajouté qu'"il faut regarder pour les mois d'avril et de mai, pour les prolonger d'un ou deux mois et permettre qu'ils soient dépensés". Les chèques vacances bénéficient aujourd'hui à environ 11 millions de salariés. Cette mesure se combine avec le doublement, annoncé dans le cadre du plan Tourisme, du plafond d'utilisation journalière des tickets restaurant, qui passe de 19 à 38 euros et la possibilité de les utiliser également les weekends et les jours fériés (voir notre article ci-dessous du 14 mai 2020).
Pour sa part, l'ANCV a annoncé, le 4 mai, sa décision de baisser son taux de commission sur les chèques vacances. Celui-ci passera ainsi de 2,5% à 1%. Il s'agit en l'occurrence de soutenir le secteur du tourisme, mis à mal par la crise sanitaire. Une intervention de l'Etat sera néanmoins sans doute nécessaire pour la saison 2021, car les excédents de l'ANCV servent à financer des actions sociales en faveur des vacances des publics les plus fragiles (programmes spécifiques pour les personnes âgées, pour les jeunes...).