Soutien à la population ukrainienne : la mobilisation des collectivités s'intensifie
Le "fonds d'action extérieure des collectivités territoriales" a été activé mardi pour permettre à toutes les collectivités de financer des actions humanitaires auprès de la population ukrainienne. Un fonds salué par les régions qui, réunies en conseil extraordinaire lundi, s'engagent à "organiser les actions de solidarité nécessaires, tant vis-à-vis des populations ukrainiennes qu’en vue de l’accueil éventuel de réfugiés". Dans chaque département, les préfets sont chargés de construire avec les élus un dispositif d'accueil des réfugiés.
Au sixième jour de l’attaque russe en Ukraine, les collectivités françaises poursuivent leur mobilisation pour venir en aide aux réfugiés et à la population locale. Après les maires, vendredi (voir notre article du 25 février), les présidents de régions, réunis lundi en "conseil extraordinaire", ont manifesté "leur engagement pour organiser les actions de solidarité nécessaires, tant vis-à-vis des populations ukrainiennes qu’en vue de l’accueil éventuel de réfugiés". L’association Régions de France salue ainsi, dans un communiqué du 1er mars, l’ "immense élan de générosité" qui s’est manifesté en France, "avec des dons spontanés sur l’ensemble du territoire". Les régions se proposent de "coordonner ces initiatives" aux côtés de l’Etat. Les régions se disent également prêtes à prendre part "dès que possible à l’effort de solidarité nationale", à travers le fonds de soutien promis par le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. "Ce fonds pourra venir à l’appui de l’action des ONG, des associations, et plus globalement de tous ceux dont la mobilisation sera requise par la crise que nous traversons", indiquent-elles. Dès mardi, le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE) a activé ce "fonds d'action extérieure des collectivités territoriales" (FACECO). Il permettra de "fédérer les initiatives et l'élan de solidarité exceptionnel avec le peuple ukrainien dans les territoires", a-t-il indiqué de son côté. Toutes les collectivités, quelle que soit leur taille, pourront y apporter une contribution financière. "Mutualisées au sein d'un fonds géré par des équipes spécialisées du Centre de crise et de soutien (CDCS) du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, ces contributions permettront de financer des opérations humanitaires d'urgence répondant aux besoins prioritaires des victimes du conflit", explique-t-il. Pour les collectivités qui souhaitent contribuer, un mode d’emploi a été mis en ligne. Le ministère indique qu’une réunion d’information et de coordination se tiendra "très prochainement" avec les collectivités territoriales.
L’association Intercommunalités de France a pour sa part tenu à rappeler, mardi, "l’absolue nécessité de protéger les populations civiles", renvoyant à la possibilité de faire un don au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (lien) ou bien de distribuer des produits de première nécessité via le Comité international de la Croix-Rouge.
Train gratuit
Dans la foulée des maires, les présidents de régions et d’intercommunalités se mobilisent aussi pour organiser l’accueil des réfugiés. Les régions "pourront organiser, avec l’ensemble des collectivités concernées, les dispositifs permettant un accueil fidèle aux valeurs de la France". Après la SNCF qui a annoncé, lundi, que les réfugiés pourraient voyager gratuitement dans les trains en France, les régions ont décidé de leur accorder "la gratuité des déplacements dans les TER et les transports interurbains". De son côté, la CGT-Cheminots a demandé mardi au PDG de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, de ne pas se limiter aux réfugiés ukrainiens mais d’accorder la gratuité à tous les réfugiés sur le sol français.
Face à l'afflux des initiatives des collectivités, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a demandé aux préfets de prendre attache avec les élus de chaque département "dans les plus brefs délais" pour construire avec eux un "un dispositif d'accueil", comme il l'indique dans un courrier du 28 février adressé aux associations d'élus. Ces derniers sont invités à faire connaître au préfet "les solutions et initiatives possibles, en lien avec le secteur associatif".
La journée de mardi a aussi été marquée par de nombreux discours politiques, notamment celui de Jean Castex devant les députés et celui de Ursula Von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, devant le Parlement européen. Tous deux appuyant l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne, au risque de jeter de l’huile sur le feu.
Le Premier ministre français a par ailleurs annoncé "un appui économique renforcé portant sur 300 millions d'euros d'aide immédiate" pour l'Ukraine. Il a aussi promis "des livraisons de carburant et de matériel militaire, y compris de l'armement, en liaison avec nos partenaires européens" pour les forces armées ukrainiennes. Dans le cadre du mécanisme de protection civile européen, "33 tonnes de matériel humanitaire parties de Paris sont déjà arrivées à la frontière ukrainienne". Assurant la Présidence du Conseil de l’Union européenne, la France proposera un dispositif de solidarité pour "une juste répartition des efforts d’accueil de ces réfugiés entre les pays de l’Union".
Sanctions économiques
Dans un discours particulièrement martial, la présidente de la Commission a énuméré les "trois séries de lourdes sanctions" infligées à la Russie , "ciblant le système financier, les industries de haute technologie et l'élite corrompue". Ces sanctions (interruption du réseau Swift pour les principales banques russes, blocage des transactions pour la Banque centrale russe…) "infligeront de sévères dommages à l’économie russe et au Kremlin". "Il s'agit là du plus vaste train de sanctions de l'histoire de notre Union", a-t-elle dit. Dans la foulée de son entretien en visioconférence avec le président des Etats-Unis Joe Biden, le 11 février, la présidente de la Commission a aussi expliqué que l’Europe allait devoir assurer son approvisionnement énergétique, notamment avec la construction de nouveaux terminaux GNL (gaz naturel liquéfié). Pour les Etats-Unis, qui n'ont pas ménagé leurs efforts pour faire capoter le projet de gazoduc Nordstream II, c’est une aubaine.
Si le ministre français de l’Economie Bruno Le Maire, s’exprimant sur France info, mardi matin, était sur la même posture belliqueuse ("Nous livrons à la Russie une guerre économique et financière totale. Nous allons provoquer l’effondrement de l’économie russe"), il a dû revenir sur ses propos. Dans une déclaration envoyée à l’AFP, il a reconnu que le terme de "guerre" était "inapproprié" et ne correspondait pas à "notre stratégie de désescalade".
Repérer et accompagner les filières françaises
Quoi qu’il en soit, Bercy se prépare aussi aux répercussions de toutes ces mesures sur l’économie française. "Nous bâtirons les dispositifs d'accompagnement qui seront nécessaires le moment venu", a affirmé le ministre délégué au Commerce extérieur, Franck Riester, lors d'un point presse, mardi, à l'issue d'une réunion avec une soixantaine d'entreprises. Les secteurs les plus exposés sont "l'aéronautique, la chimie, les cosmétiques, les produits pharmaceutiques et dans une moindre mesure l'agroalimentaire", a-t-il poursuivi. Les régions ont annoncé pour leur part vouloir prendre "l’initiative d’une démarche auprès du Premier ministre et du ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance pour engager sans tarder un travail de repérage des filières économiques françaises pouvant être impactées au plan économique afin de définir les meilleures modalités de soutien".