Sobriété énergétique, saison 2 : des mesures supplémentaires pour poursuivre l'effort
Aide à l'achat de thermostats pour contrôler les températures, règles durcies pour limiter l'éclairage des vitrines et des bureaux, promotion du vélo… : le gouvernement a annoncé ce 12 octobre de nouvelles mesures censées inscrire "dans la durée" les économies d'énergie engagées l'an dernier en pleine envolée des prix.
Pour le premier anniversaire du plan de sobriété énergétique du gouvernement, qui a donné lieu à un colloque ce 12 octobre à Paris, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher n'a pas fixé de nouvel objectif chiffré de baisse pour cet hiver mais a souhaité que l'effort accompli depuis un an devienne "structurel" et "une habitude".
"On ne doit plus se poser la question !", a-t-elle dit. "Il y a des enjeux de climat, de biodiversité, de factures, de santé" et "c'est aussi une question d'indépendance politique et économique de notre pays". Selon ses calculs, les consommations de gaz et d'électricité ont diminué de 12% entre le 1er août 2022 et le 31 juillet 2023 comparé à la même période de 2018-2019, avant le Covid. "L'important, c'est de ne pas avoir d'effet rebond", a précisé l'entourage de la ministre à la presse, et "d'inscrire la réduction dans la durée" alors que franchir une nouvelle marche pour un deuxième hiver consécutif s'annonce difficile faute d'importants investissements ou changements d'habitudes.
Lors du colloque, des secteurs comme le football ou les cinémas ont exposé leur contribution à cet effort de sobriété, en réduisant l'éclairage des terrains, la luminothérapie des pelouses ou en baissant la climatisation l'été dans les cinémas. "On a même demandé de raccourcir les génériques qui sont de plus en plus longs", a précisé Marie-Christine Désandré, de la Fédération nationale des cinémas.
"Sobriété choisie"
Des élus locaux ont aussi apporté leur vision de la sobriété énergétique. Jean-Baptiste Hamonic, maire de Villepreux, vice-président de la communauté d'agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines et membre du bureau de l'Association des petites villes de France (APVF) estime qu'après le choc de l'an dernier, "il faut passer de la sobriété subie à la sobriété choisie" et s'engager plus résolument dans des travaux de rénovation énergétique. "Le fonds vert est essentiel pour ça". Marie-Guite Dufay, présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté a mis en avant les 11% d'économies réalisées grâce à l'abandon de locaux non utilisés mais aussi la "preuve par l'exemple" pour sensibiliser les citoyens et les valoriser dans les écogestes. "Nous promouvons dans notre région les éco-lycées en laissant les jeunes à la manœuvre pour traquer les économies d'électricité, de chauffage et d'eau à réaliser et en fournissant les équipements nécessaires".
Dans le détail, hormis l'éclairage, les nouvelles mesures que le gouvernement a présentées pour cette "saison 2" du plan de sobriété énergétique ne ciblent pas directement les collectivités.
Pour les entreprises, les efforts demandés l'an passé aux sociétés du CAC40 pour se doter d'un plan de sobriété sont élargis aux 120 plus grosses sociétés cotées. Elles doivent indiquer les mesures mises en place pour lutter contre le gaspillage, mieux régler leurs dispositifs de gestion de l'énergie, promouvoir la vitesse des collaborateurs sur la route à 110 km/h.
Plan thermostats
Du côté des ménages, parallèlement à des aides à la rénovation des logements augmentées en 2024, ils seront incités à s'équiper de thermostats programmables, qui coûtent "entre 650 et 1.000 euros l'unité", selon la ministre. Ce matériel, dont environ 27 millions de foyers restent à équiper, réduit la consommation de 15%. L'achat et l'installation seront aidés jusqu'à 80% via les certificats d'économies d'énergie (CEE). "J'ai demandé aux enseignes de bricolage de faire des offres clé en main pour les ménages", a-t-elle annoncé. Objectif : respecter une température de 19°C degrés à l'intérieur (et 16°C degrés pour les pièces inoccupées).
Les fournisseurs d'énergie vont proposer des outils de pilotage de la consommation et de nouvelles offres de réduction tarifaires, à condition que les clients réduisent leur consommation lors des pics de tension sur le réseau, quelques jours par an. Plusieurs d'entre eux (EDF, Engie, TotalEnergies, EniGas Alpic, ES Energie Strasbourg et GEG) annoncent des cadeaux ou des bonus sur la facture pour encourager les gestes de sobriété.
Eclairage des bureaux et magasins à revoir
Côté bureaux et magasins, un arrêté est en préparation "pour obliger commerces et entreprises à n'allumer leurs vitrines qu'une heure avant le début de leur activité et les éteindre une heure après la fin", a également annoncé la ministre. Un arrêté devrait faciliter les sanctions, avec 1.500 euros d'amende en cas de non-respect. Les ministres lanceront aussi une "concertation associant l’ensemble des parties prenantes, en particulier les associations d’élus locaux, pour travailler à la réduction de l’intensité lumineuse des éclairages publics".
Nouvelles mesures pour le vélo
Pour les déplacements, domaine dans lequel la sobriété est à la peine malgré les prix élevés à la pompe, deux nouvelles mesures sont annoncées pour le vélo. Le remboursement par les employeurs des dépenses de transport des salariés va ainsi être étendu aux services de location de vélos privés et la réduction d'impôt sur les sociétés octroyée aux entreprises qui mettent une flotte de vélos de fonction à disposition de leurs salariés prolongée "jusqu'au 31 décembre 2027".
Pas question en revanche pour le gouvernement de relancer le débat sur un abaissement obligatoire de la vitesse sur autoroute de 130 à 110 km/h, une proposition de la Convention citoyenne sur le climat, pour économiser du carburant. "Très clairement, ce n'est pas sur la table aujourd'hui", a déclaré la ministre sur France 2. Mais la réduction de la vitesse en voiture est encouragée tout comme le recours au covoiturage ou aux transports en commun.
Télétravail à optimiser
Le ministère de la Transition énergétique va en outre diffuser auprès des partenaires sociaux une étude montrant comment le télétravail peut être optimisé pour économiser 25 à 35% d'économies d'énergie par télétravailleur et par jour s'il s'accompagne de la fermeture d'un site pendant plus de 48 heures. En zone urbaine dense, l'économie vient de la mise en sommeil des bureaux, en zone périurbaine ou rurale, elle vient surtout des transports évités.
"Le plan n'est pas construit sur la contrainte, mais la responsabilité et l'information", insiste le ministère. Toutes les mesures prévues seront soutenues par une campagne publicitaire sur internet, suivie de spots télévisés et radiodiffusés jusqu'en février. Au triptyque lancé l'an dernier, "Je baisse, j'éteins, je décale" (l'horaire de mes consommations en dehors des périodes de pointe, NDLR), s'ajoutera le mot d'ordre "et je lève le pied".